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THEORIE DES CORDES (La) – Singes électriques

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La Théorie Des Cordes est un groupe français originaire du Sud-Ouest, fondé par le duo Mathieu Torres et Stéphanie Artaud. La formation ne tarde pas à s’enrichir de nouveaux instrumentistes pour aboutir à un combo pleinement opérationnel dans le domaine du jazz-rock progressif. Le style du groupe est effectivement inspiré de la scène progressive britannique des années 70, notamment des groupes de Canterbury.

La Théorie des Cordes relève donc un double défi. D’une part, faire du jazz-rock progressif en France, pays encore marqué par la variétoche décérébrée de l’ère Eddy Barclay, sans parler du rock à papa de Johnny Hallyday. D’autre part, jouer du jazz-rock progressif seventies en plein 21e siècle, marqué par les mélodies faciles et vite torchées des petits groupes rock et pop acidulés qui envahissent actuellement la planète, sans parler du rap pour m’as-tu-vu bas du front.

Mais tout cela ne fait pas peur à Mathieu Torres (guitare), Stéphanie Artaud (piano), Julien Langlois (saxophone), Fah Pigny (batterie) et Alexandre Henri (basse). Ils poussent même le panache jusqu’à adopter un nom abscons qui ne dit quelque chose qu’aux physiciens chevronnés. En effet, la théorie des cordes est, en physique (et je cite Wikipédia), « un domaine actif de recherche traitant de l’une des questions de la physique théorique : fournir une description de la gravité quantique, c’est-à-dire l’unification de la mécanique quantique et de la théorie de la relativité générale ». Je ne sais pas si le Professeur Tournesol est dans le coin pour nous donner un aperçu de ce que ça peut bien vouloir dire mais moi, je viens de cramer un demi-million de neurones rien qu’en essayant de comprendre cette phrase.

Et du neurone, il va falloir aussi en laisser sur le tapis pour pénétrer dans ce deuxième album de La Théorie Des Cordes (après un « Première vibrations » initial sorti en 2011). « Singes électriques » se présente comme un concept-album entièrement financé grâce à la contribution des fans du groupe. Lesdits fans ont dû donner un sacré paquet de pognon car La Théorie Des Cordes s’est payé le luxe d’un double album avec une pléthore de morceaux aux durées aussi longues que celles d’un accouplement d’escargots anémiques un jour de grande chaleur. Au total, huit titres affichant ensemble une durée de cent minutes, soit une heure quarante de prog canal historique caracolant dans des labyrinthes mélodiques complexes et capricieux.

Les progueux (je veux dire les vrais : le genre prof de maths et tout et tout) vont suinter de bonheur en entendant cette vaste fresque entièrement instrumentale, complètement tournée vers la performance et les solos finement sculptés. La guitare de Mathieu Torres dégouline de notes feutrées et subtiles, avant que quelques breaks quasi-métalliques ne viennent semer la tempête. Le saxophone et le piano sont également de la partie, égrenant des parties suaves et habiles.

Pas à dire, c’est du solide. Ces gens-là savent manier l’instrument et ont de la ressource pour confectionner des morceaux à l’architecture alambiquée, jalonnées de portes menant à des couloirs musicaux interminables et fascinants. Les titres des morceaux révèlent également un souci de l’esthétisme : « L’œuf schizo », « Le procès du temps », « Paysages urbains », « Nomad’s land », « Sasha Grey » (mais qui est Sasha Grey ? une ex-actrice porno reconvertie dans la photo ; ces gens de la Théorie Des Cordes ont décidément une culture déviante).

Vu ces titres et les paroles écrites à l’intérieur du livret du CD, on s’attendait à des textes délirants chantés au cours des morceaux. Mais il n’en est rien, La Théorie Des Cordes restant muette d’un bout à l’autre de l’album. C’est peut-être le rare reproche que l’on pourrait faire à l’album, à savoir ces promesses textuelles non-tenues, laissant l’auditeur face à une œuvre instrumentale dense et exigeante, à la complexité technocratique. Il y a cependant beaucoup d’âme dans les morceaux du groupe, qui impose un style très technique lancé sur de longues jams et parcouru d’un petit souffle oriental.

On l’aura compris, cette œuvre s’adresse avant tout aux rockers progressistes forgés aux sonorités de Yes ou Soft Machine. Mais pour qui veut entendre de la bonne musique irréprochable du point de vue technique et dépourvue de vulgarité, « Singes électriques » est une belle invitation au voyage.

Pays: FR
Vocation Records VOC3921
Sortie: 2013/04/15

One thought on “THEORIE DES CORDES (La) – Singes électriques

  • Je vais écouter cet album, mais je voulais surtout répondre par rapport à cet extrait:

    « La Théorie des Cordes relève donc un double défi. D’une part, faire du jazz-rock progressif en France, pays encore marqué par la variétoche décérébrée de l’ère Eddy Barclay, sans parler du rock à papa de Johnny Hallyday. D’autre part, jouer du jazz-rock progressif seventies en plein 21e siècle, marqué par les mélodies faciles et vite torchées des petits groupes rock et pop acidulés qui envahissent actuellement la planète, sans parler du rap pour m’as-tu-vu bas du front. »

    ça fait du bien de lire ça, car étant français, cette fameuse ère Eddy Barclay et Johnny nous asphyxient…
    Et pour le reste je suis tout à fait d’accord encore une fois, marre de ces groupes de trois jours qui tournent sur un tube pour publicité de crossover

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