ZONDERLAND – Oeverloos
Ward Dhoore, le musicien, et Lander Cardon, le peintre, se rencontrent il y a une douzaine d’années à la Luca School of Arts, un réseau d’écoles d’art flamandes qui sont présentes dans les villes de Gand, Bruxelles, Genk et Leuven. Une solide amitié et une admiration mutuelle pour les spécialités de chacun s’ensuivent. Les deux jeunes hommes ont alors l’idée originale de combiner peinture et musique, ce qui aboutira à ce projet Zonderland, sans doute le concept musical le plus original de ces dernières années.
C’est en effet à une sorte de découverte de l’art total que nous invitent Ward Dhoore et Lander Cardon puisque les morceaux qui vont composer le premier album ʺOeverloosʺ sont tous doublés d’une peinture. Évidemment, l’idéal est de profiter de cet ensemble sonore et visuel dans une authentique exposition, ce que n’ont pas manqué de faire les deux artistes au cours d’une période ayant précédé la crise sanitaire.
Lors de l’arrivée du Covid, les activités ont été suspendues mais Ward Dhoore et Lander Cardon en ont profité pour approfondir leurs idées, donnant naissance à une série complète de tableaux à combiner avec des morceaux de musique, principalement réalisés au piano. Pinceaux et piano constituent donc le menu de cet album, où le critique musical va devoir se doubler du rôle de critique de peinture.
Je ne garantis pas un résultat probant sur les jugements que je vais émettre au sujet de la peinture de Lander Cardon, la peinture n’étant pas ma spécialité. Mais comme mes goûts en la matière vont de la grotte de Lascaux jusqu’à Kandinsky (allez, on va pousser jusqu’à Jackson Pollock et Basquiat pour se forcer à conserver l’esprit ouvert), je suis assez bon public pour apprécier les images abstraites de Lander Cardon, dont on peut se faire une idée sur la pochette de l’album accompagnant cette chronique. On remarque sur les huit tableaux accompagnant l’album (visibles sur le livret lié au CD, d’où l’intérêt de posséder l’objet physique sur ce coup-là) que la thématique visuelle récurrente est liée à l’eau, à la fois dans l’image que l’on perçoit de certaines œuvres mais également dans la fluidité de certaines formes, les couleurs étant surtout axées sur le rouge et le gris bleuté, comme la couleur d’une mer surplombée de nuage gris, comme notre mer du Nord. De plus, le nom de Zonderland (sans terre) suggère une absence de solidité sur laquelle poser nos pieds, les choses étant résolument dans le liquide.
La musique se fond parfaitement dans les impressions générées par l’œil, l’oreille suivant paisiblement les parties de piano habitant ce disque. Ward Dhoore maîtrise magnifiquement l’instrument, insistant sur les côtés les plus romantiques du piano (ʺKaapʺ, ʺSkarnʺ). Il joue aussi de l’harmonium, de la guitare, des synthés et de la flûte, tandis que son camarade Lander Cardon intervient de temps à autre sur un saxophone (ʺBohanʺ) et que l’invité Jeroen Geerinck émet quelques parties de bugle sur ʺKadeʺ et ʺOeverloosʺ.
La douceur des morceaux, leur côté cotonneux, dégage immanquablement une impression de paix et de tranquillité, invitant l’auditeur à s’échapper de la condition terrestre et du mouvement incessant de la vie moderne pour venir se loger dans un temps et un espace à part. On peut écouter cet album pour méditer, pour séduire l’être aimé ou tout simplement pour se sentir libre et tranquille. L’album ʺOeverloosʺ, sorti en février, arrive un peu tard sur notre table mais son intemporalité en fait une œuvre à consommer totalement en dehors des modes.
Le groupe :
Ward Dhoore (piano, harmonium, guitare, synthés)
Lander Cardon (saxophone)
Jeroen Geerinck (bugle)
L’album :
ʺBohanʺ
ʺZeelandʺ
ʺPegasusʺ
ʺKaapʺ
ʺSkarnʺ
ʺKustlichtʺ
ʺOeverloosʺ
https://www.facebook.com/zonderlandart/
Pays: BE
Trad Records
Sortie: 2022/02/04