The Murder Capital, love is Blindness
Après deux Orangeries en autant d’albums, les Irlandais de The Murder Capital ont défendu leur petit dernier à l’AB Box. Une prestation qu’ils ont assurée, contrairement aux deux dates précédentes (Cologne et Berlin) annulées unilatéralement par conviction politique. Les salles ne les autorisaient en effet pas à coiffer un de leur amplis d’un drapeau palestinien…
Rien de tout cela ce soir, le drapeau se trouvait d’ailleurs déjà bien en place lorsque les deux sauvages de Hex Girlfriend ont pris possession de la scène. Tout aussi vindicatifs, les deux Londoniens (parmi lesquels on retrouve Noah Yorke, le fils de Thom) ont publié à l’automne dernier « No Golf Cart Parking », un EP labelisé antifasciste. Si sur disque, le groove et les mélodies occupent une place centrale, la version live montre un réel penchant pour les rave-parties et la drum ‘n’ bass du début des années 90. Beats affolants, lignes de basse ronflantes, voix saccadée et nappes synthétiques omniprésentes renvoient vers un mix improbable entre The Prodigy, Primal Scream et Big Special. Tantôt désuet tantôt futuriste, on reste cependant perplexes devant le résultat somme toute assez brouillon.
« Blindness », le troisième album de The Murder Capital, n’a pas reçu les faveurs de la critique à sa sortie début d’année. Il est vrai qu’autant la première partie du disque répond aux standards auto-imposés, autant la seconde manque de consistance. La faute peut-être aux frictions qui opposaient les membres du groupe avant leur entrée en studio à Los Angeles aux côtés du célèbre producteur John Congleton. Cela dit, c’est sur scène que la bande à James McGovern donne la pleine mesure de ses capacités, raison sans doute pour laquelle l’AB Box affiche quasi sold out.
On ne va d’ailleurs pas leur donner tort car, sans le moindre round d’observation, « The Fall », un premier nouveau titre particulièrement boosté, affolera d’emblée les premiers rangs qui passeront au stade supérieur de bousculades sur un « More Is Less » tendu balancé sans respiration dans la foulée. Contrairement au Cactus Festival (où ils avaient remplacé Beak> au pied levé) et aux Lokerse Feesten pour l’after des Pixies l’été dernier, le leader ne porte pas de lunettes de soleil, laissant apparaître un regard vénère. Son attitude de rock star à l’égo surdimensionné ne l’a en revanche pas quitté, le gaillard multipliant les poses aux quatre coins de la scène.
Sans surprise, ses camarades de jeu passent relativement inaperçus à ses côtés mais assurent un environnement sonore particulièrement pertinent, comme sur ce « Death Of A Giant » certes plus retenu mais toujours plus punchy que sur l’album. Seul bémol, les sons injectés qui renvoient vers du Placebo en mode plus ou moins gothique. Une errance bien vite rattrapée par le toujours aussi sinistre « The Stars Will Leave Their Stage ». Entre-temps, le leader en mode sportif avait ôté sa veste de training pour arborer une vareuse alors que le batteur n’allait quant à lui pas tarder à se retrouver torse nu.
La suite immédiate allait malheureusement se révéler moins consistante, entre un « Heart In The Hole » plutôt confus, un « That Feeling » peu passionnant et un « A Distant Life » dans une pâle veine Oasis. Lien de cause à effet ou pas, l’ami James, à l’instar d’un certain Liam, ne s’encombre de temps en temps que d’un tambourin en plus de son micro. En revanche, la tension dégagée par « Moonshot » reboostera le public comme par enchantement.
Peu prolixe, James McGovern réservera la plupart de ses rares interventions à la cause palestinienne. S’il est toujours délicat de mixer musique et politique, le public ne semblait pas trop réfractaire à ses propos. Pour l’anecdote, les deux dates allemandes annulées ont tout de même été remplacées par des sets acoustiques en extérieur. Peu ou pas de moments suspendus ce soir à l’AB même si, au terme de la flippante doublette « Slowdance », les surprenants « Swallow » et « Love Of Country » titilleront l’univers southern rock de Neil Young en faux crescendo, nous égarant quelque peu.
Heureusement, les choses reprendront bien vite une tournure sombre et explosive via une fin de set dantesque. Ils commenceront par peaufiner une version de « Green & Blue » glaciale et pleine d’urgence avant de se lancer dans un « Feeling Fades » complètement dingue illustré par un… wall of death. Soit dit en passant, il s’agira de la seule injonction du leader parfaitement suivie par des spectateurs qui pogoteront généreusement à partir de ce moment-là. En effet, le puissant traitement réservé à « Don’t Cling To Life » et l’intensité du futur classique « Can’t Pretend To Know » boucleront avec brio le set principal.
Les rappels reprendront dans la même veine, ne laissant aucunement retomber l’électricité ambiante. « Ethel » fera sans surprise le boulot alors que « Words Lost Meaning », un des efficaces singles de « Blindness », clôturera une prestation en dents de scie. Mais comme cela avait déjà été le cas lors de la sortie de « Gigi’s Recovery » en 2023, laissons patiemment mûrir ces nouveaux titres pour les retrouver d’ici quelques mois, métamorphosés par une pratique rigoureuse et régulière. Si toutefois un drapeau ne contrecarre pas leurs plans…
SET-LIST
THE FALL
MORE IS LESS
DEATH OF A GIANT
THE STARS WILL LEAVE THEIR STAGE
A THOUSAND LIVES
HEART IN THE HOLE
A DISTANT LIFE
THAT FEELING
MOONSHOT
SLOWDANCE I
SLOWDANCE II
SWALLOW
LOVE OF COUNTRY
GREEN & BLUE
FEELING FADES
DON’T CLING TO LIFE
CAN’T PRETEND TO KNOW
ETHEL
WORDS LOST MEANING
Organisation : AB