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Nuits du Bota 2021: Yôkaï, à douze pour dix bougies

Quelques jours après la Nuit anniversaire de Humpty Humpty, c’est un de ses plus solides représentants qui passaient un cap. Yôkaï a en effet célébré en grandes pompes sa première décennie à l’Orangerie lors d’une soirée exclusive au concept pour le moins original.

Mais avant, place à la prestation de The Brums qui, pour manque de place sur scène (vous comprendrez plus tard…) s’est tenue quelques dizaines de mètres plus loin, à la Rotonde. Le quatuor Liégeois (à ne pas confondre avec The Drums qui avait joué ici-même lors des Nuits 2010) est venu présenter “No Encore”, un premier album publié au printemps dernier.

Alliant essentiellement cuivres et sons électroniques, leurs compositions taperont instantanément dans le mille et dérouilleront les jambes d’un public qui avait pourtant débuté le concert assis sur les marches de la salle. Difficile, il est vrai, de rester de marbre sur ces rythmes confondant jazz, swing et groove sur fonds de nappes synthétiques et de montées de beats à enflammer le dancefloor (“Robertdarc”). Une vision moderne et rafraîchissante qu’ils partagent notamment avec Echt!.

Si la trompette d’Antoine Dawans et le saxophone de Clément Delchambre forment les contours de la plupart des titres, le trombone y occupe une place centrale, actionné par Adrien Lambinet, un type au souffle impressionnant et continuellement en action. À leurs côtés, le batteur Alain Deval, sans y avoir l’air, participe grandement à l’équation via notamment une utilisation pertinente de son hi-hat (pas pour rien qu’il soit derrière le projet électro Bothlane).

Toutes ces influences se retrouveront parfaitement synthétisées dans “Bunch”, le titre qui clôturera le set au milieu de spectateurs littéralement en transe. Autant ils nous avaient donné l’impression de tourner en rond au récent Micro Festival, autant ils ont prouvé ce soir que leurs compositions recèlent bien plus de profondeur qu’une écoute distraite ne dégage.

Pour le dixième anniversaire de Yôkaï, Clément Nourry et ses comparses ont voulu marquer le coup. Ils ont ainsi concocté une prestation unique à laquelle étaient conviés les musiciens passés par le groupe depuis les débuts. Etant donné qu’ils se produisent déjà à huit en temps normal, on vous laisse imaginer les embouteillage sur la scène de l’Orangerie et le casse-tête technique pour l’ingénieur du son.

Ceci dit, ils ne s’appellent ni The Fall ni Dexys Midnight Runners, ce ne sont donc “que” quatre personnes supplémentaires qui ont intégré le big band : le claviériste Léo Dupleix à l’extrême gauche de la scène, le batteur Jakob Warmenbol en doublure de rythmique, la violoniste/trompettiste Ananta Roosens et Lynn Cassiers derrière sa machine à effets. Des pointures qui en rejoignent d’autres, cela signifie un paradis pour les mélomanes. Il tiendra toutes ses promesses.

Yôkaï, c’est un univers singulier à la croisée des chemins entre le jazz sous ses formes les plus improbables, les musiques de films millésimées golden sixties et, depuis peu, un aspect électro léché. L’excellent EP “Sentinelle”, sorti le même jour que l’album de The Brums, s’éloigne ainsi des structures classiques qui ornaient “Yôkaï” en 2019. Un aspect qu’ils comptent bien continuer à explorer sur leur prochaine plaque. En tout cas, s’ils se lâchent autant que ce soir sur la version intense et bidouillée de “Désir Chimique” au final démentiel qui verra l’ami Clément jeter ses lunettes par terre pour mieux se concentrer sur ses parties de guitare, cela devrait faire des étincelles.

Très visuelles, leurs compositions vous emportent dans des contrées inexplorées que l’on atteint plus facilement les yeux clos. Mélancoliques, planantes, envoûtantes ou dansantes lorsqu’elles ne cochent pas toutes les cases à la fois, elles se vivent en temps réel. Une expérience qui doit énormément à la dextérité de musiciens expérimentés en immersion dans leur monde idéal.

Pour la petite histoire, les première paroles chantées de la soirée arriveront avec le délicat “Petit Indien N°3”, entonné par Lynn Cassiers de sa voix claire et non trafiquée avant d’être repris en chœur par le reste du groupe. Un morceau atypique qui fait mouche et reste un des titres de bravoure de Yôkaï.

L’aventure d’un soir se prolongera toutefois le temps d’un dernier morceau, “Le Chameau”, un extrait du tout premier EP dans une version hypnotique et bourrée d’effets qui pourrait renvoyer à Archive si l’on fait abstraction des cuivres. Des soirées d’anniversaire comme celles-là, on en veut bien chaque année…

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