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Nexer exhale, always Ditz

Blinder la Rotonde alors qu’ils devaient jouer au Witloof Bar, telle est la performance réalisée par les Anglais de Ditz. Suffocante comme jamais, la salle centrale du Botanique a succombé aux coups de boutoirs des natifs de Brighton dont le deuxième album, « Never Exhale », prend toute son ampleur sur scène.

Voici une quinzaine de jours, au terme de la release de Fabiola, Guy Tournay nous avait confié être particulièrement inspiré par son plus récent projet, The Bernadette Maries. Une fructueuse résidence avait en effet permis au groupe d’étoffer un univers dont on avait déjà eu un avant-goût au Museum juste avant Bodega en septembre dernier. Six mois plus tard, on sent effectivement le quatuor plus déterminé que jamais et les influences résolument british affichées à l’époque ont pris de l’ampleur.

Elles s’accompagnent désormais d’une puissante conviction qui voit le leader y aller de toute sa hargne et le batteur David Temprano se déchaîner sur un kit pourtant composé d’à peine cinq éléments. Les fantômes d’Oasis, des Stone Roses, des Charlatans et de Ride planent sur leurs compositions mais des samples et des détours post-rock laissent entrevoir des développements plus aventureux. Ils auront l’occasion de les peaufiner d’ici leur passage aux Nuits le 18 mai aux côtés notamment de The Jesus Lizard et de Mclusky.

À coup de prestations intenses, Ditz s’est peu à peu imposé au sein du milieu alternatif post-punk-hardcore made in UK emmené notamment par Idles. Même si les natifs de Brighton ont généreusement écumé les clubs dans l’immédiat post-Covid (festival Badlands, KulturA…), c’est en première partie de la bande à Joe Talbot qu’ils se sont révélés au plus grand nombre. Cela dit, le Lotto Arena ne vaut pas une salle intime comme cette Rotonde empaquetée où la sueur était palpable dès la diffusion du sinistre « I Felt A Funeral » de Big Brave cinq minutes avant l’arrivée des musiciens sur scène.

Le tout aussi glauque instrumental « V70 » installera alors une pernicieuse ambiance qui volera en éclat dès les premières notes de « Taxi Man », la première bombe extraite de l’excellent deuxième album du groupe, « Never Exhale ». Avant même la fin de ce titre, la Rotonde se retrouvera sens dessus dessous au milieu de gobelets virevoltant dans les airs. La raison ? Un premier wall of death imposé le plus naturellement du monde par le charismatique Callum Francis, debout sur un des retours en indiquant la marche à suivre d’un index explicite.

Regard inquiétant, nattes égayant sa coiffure laissant apparaître d’imposantes boucles d’oreilles créoles dorées, nuisette et escarpins en peau de léopard, il ne masque pas son naturel. Sa voix virile ajoutant de la puissance au carré « Four » et à l’urgent « God On A Speed Dial » dans la foulée. Dans le public, des pogos d’une violence rare sont légion, encouragés par l’attitude désinvolte d’un leader à l’humour pince-sans-rire et la diction posée (qui laissera rarement son pied de micro tranquille) et la rage d’un batteur bien vite libéré de son t-shirt trempé. Ce dernier, aux côtés des deux guitaristes et du bassiste au son crasseux (le bref mais intense « Space/Smile ») emmène les titres dans des directions extrêmes en adéquation avec leur face malaisante.

En parfaite symbiose, ils gèrent l’espace en toutes circonstances, même lorsque l’ami Callum tente une percée dans le public ou lorsqu’il s’improvise escaladeur. Une expérience récurrente qui l’a notamment vu partir à l’assaut de la structure des scènes du Micro Festival et des Leffingeleuren. Mais ici, le défi était de taille et il l’a relevé en n’ayant pas froid aux yeux. Car grimper quasi jusqu’au plafond de la Rotonde tout en continuant à assurer son rôle de chanteur n’est en effet pas donné à tout le monde. Heureusement, le fil de son micro était assez long et il est parvenu à redescendre sans anicroche. Une perspective que n’offrait clairement pas le Witloof Bar…

De retour sur scène au terme d’un « Hehe » balancé depuis les nuages, c’est au son d’un vénère « Teeth » que les choses repartiront de plus belle. Avec l’urgent « Clocks », il s’agira des deux salves essentielles de « The Great Regression », leur premier album publié en 2022, dont l’interprétation penche davantage du côté noisy que post-punk. Même si les atmosphères oppressantes à la Gilla Band ne sont jamais très loin (« Smells Like Something Has Died Here ») et qu’ils brouillent les pistes par moments, à l’instar de l’intro faussement lumineuse d’un claustrophobique « I Am Kate Moss » assorti d’une basse glaciale.

L’entêtant et intelligemment construit en crescendo « The Body As A Structure » suivi de « Britney » et de ses flippantes nappes synthétiques boucleront la découverte de « Never Exhale » dont ils ne laisseront finalement de côté que « 18 Wheeler ». La fin du set sera quant à elle dantesque entre dinguerie (« The Warden »), explosion sonore (« Ded Würst ») et destruction (« Summer Of The Shark »). Quant à l’extensible final « No Thanks, I’m Full », il verra notamment le chanteur orchestrer un circle pit pourtant peu compatible avec la Rotonde. Le tout en jouant à l’équilibriste sur une pyramide instable de retours scéniques en lorgnant vers la boule à facette suspendue au plafond de la salle. De quoi alimenter ses délires les plus fous…

SET-LIST
V70
TAXI MAN
FOUR
GOD ON A SPEED DIAL
SPACE/SMILE
CLOCKS
SEÑOR SINIESTRO
HEHE
TEETH
INSTINCT
I AM KATE MOSS
SMELLS LIKE SOMETHING HAS DIED HERE
THE BODY AS A STRUCTURE
BRITNEY
THE WARDEN
DED WÜRST
SUMMER OF THE SHARK
SEEKING ARRANGEMENT
NO THANKS, I’M FULL

Organisation : Botanique

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