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Interpol, all the rage back home

Une fois n’est pas coutume, les New Yorkais d’Interpol ont décidé de se produire dans des salles de capacité réduite. Quelque deux mille privilégiés les ont donc applaudis à l’AB, un endroit intimiste lorsque l’on sait qu’ils sont davantage habitués à des arènes comme Forest National ou le Lotto Arena. Ils venaient y donner un avant-goût de leur nouvel album à paraître le mois prochain.

En guise d’ouverture de la soirée, place à une vieille connaissance. Si le nom d’Orlando Weeks ne vous dit pas grand-chose, sa voix grave renvoie directement aux Maccabees dont il a été le leader jusqu’à leur séparation en 2017. Pour l’anecdote, l’année précédente, ils avaient défendu “Marks To Prove It”, leur chant du cygne, dans cette même salle. Après “A Quickening”, premier effort introspectif publié en pleine pandémie, le gaillard revient avec “Hop Up”, une deuxième livraison nettement plus sautillante dans laquelle il puisera la majeure partie de son set.

Une quarantaine de minutes entamée sur un rythme soutenu qui verra le chanteur au faciès sérieux et aux cheveux gominés entretenir une complicité avec un trompettiste complètement dans son trip à sa droite. Essentiel au son à l’instar d’un claviériste en arrière-plan, il aiguillera le groupe vers des atmosphères hésitant entre pop colorée (“Deep Down Way Out”), jazz sophistiqué (“Bigger”) et folk animée (“High Kicking”). S’il l’exprime désormais différemment, l’esprit aventureux qui caractérisait son ancien groupe prédomine toujours et on ne va pas s’en plaindre.

Il y a presque vingt ans (c’était le 20 octobre 2002), Interpol avait rempli sans peine le Club situé à l’étage. À l’époque, “Turn On The Bright Lights”, l’excellent premier album des New Yorkais, venait de sortir et l’insupportable Carlos Dengler, désormais ex-bassiste, prenait tellement de place que Paul Banks en était presque réduit à chanter dans son coin. Quelques mois plus tard, ils jouaient à l’AB Box dans le cadre du Domino Festival avant de revenir une dernière fois du côté du boulevard Anspach (en décembre 2004) puis de remplir des salles bien plus spacieuses. Mais ça, c’est une autre histoire.

“The Other Side Of Make-Believe”, leur septième plaque, arrive le 15 juillet prochain et cette tournée est l’occasion de reprendre du service après de nombreux mois d’inactivité scénique forcée. Le début du set ressemblera toutefois à un mini galop d’entraînement, enchaînant le lancinant “Untitled”, plage d’intro du précité “Turn On The Bright Lights”, et “Evil”, générant les premiers déchaînements au sein du public.

Deux jours auparavant, la première des deux dates au Roundhouse de Londres avait été annulée pour cause de maladie, sans beaucoup plus de précisions. Le batteur Sam Fogarino a sans doute laissé quelques plumes dans l’aventure puisqu’il est remplacé ce soir par un roadie qui a joué… masqué durant l’entièreté du set. Sans doute une des raisons pour lesquelles la connivence entre les musiciens n’a pas toujours été optimale. Si on est habitués à la justesse parfois hasardeuse de la voix de Paul Banks, on l’est moins du jeu de guitare de Daniel Kessler à sa droite qui a connu quelques ratés.

On l’a dit, la suite des aventures discographiques d’Interpol est imminente et ils vont en dévoiler trois pistes, même si le terme ne traduit pas tout à fait à la réalité. En effet, les trois titres en question correspondent aux singles avant-coureurs. Parmi ceux-ci, le prenant “Fables” possède toutes les cartes pour devenir un classique du groupe, sombre et flamboyant à la fois. On n’est en revanche pas encore tout à fait convaincu par “Toni” qui renvoie du côté gris d’Editors alors que l’orchestration réservée à “Something Changed” (Daniel Kessler joue du piano) doit encore être apprivoisée.

Des titres joués assez tôt dans le set, aux côtés notamment d’un “If You Really Love Nothing” bardé de percussions, d’un “Narc” au riff d’enfer et d’un “Pioneer To The Falls” particulièrement envoûtant. Pointons ces subtils jeux de lumière travaillés autour de trois boules à facette placées à l’arrière de la scène et tournant sur elles-mêmes. De temps en temps, ce sont des flashes stroboscopiques qui viennent nous éblouir mais, curieusement, la scène se trouve toujours à contre-jour et le visage des musiciens en mode énigmatique.

Cela ne nous empêchera toutefois pas d’apercevoir Paul Banks arborer un large sourire au terme d’un “Obstacle 1” d’une rare intensité. D’autant qu’une version décoiffante d’“All The Rage Back Home” dans la foulée fera encore grimper la température. Une bonne raison pour enfin décider le leader à enlever sa camisole de force et arborer une chemise (noire, bien entendu) à courtes manches. On pensait alors le show définitivement lancé mais il continuera à alterner le chaud et le froid.

Du côté positif, on retiendra le sinistre “Leif Erikson” et le délicieusement menaçant “The New”, affublé d’un break que n’auraient pas renié les Pixies et d’un final speedé. Tout comme l’enthousiasme des premiers rangs, visiblement du goût d’un Paul Banks tout d’un coup déridé et enfin dans la lumière. En revanche, un son anormalement brouillon pour l’AB nous empêchera de profiter pleinement de “C’Mere” et d’un “PDA” du coup moins percutant qu’à l’accoutumée en guise de final du set principal.

Le groupe remontera sur scène pour un rappel de deux titres qui aurait été divin si le troisième mentionné sur la set-list (“NYC”) avait été joué. Mais ne faisons pas la fine bouche, ce “Not Even Jail” en tout point parfait (jusqu’aux jeux de lumières faisant mine de traquer un gangster) et cette tuerie que reste “Slow Hands” ont largement rempli leur mission. Malgré les imperfections, ils reviennent à la maison quand ils veulent.

SET-LIST
UNTITLED
EVIL
FABLES
IF YOU REALLY LOVE NOTHING
TAKE YOU ON A CRUISE
PIONEER TO THE FALLS
NARC
TONI
SOMETHING CHANGED
OBSTACLE 1
ALL THE RAGE BACK HOME
REST MY CHEMISTRY
LEIF ERIKSON
C’MERE
THE ROVER
THE NEW
PDA

NOT EVEN JAIL
SLOW HANDS

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