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L’IDLES des jeunes

Après avoir éclipsé d’époustouflante manière la prestation de Metz lors des dernières Nuits, les sauvages de IDLES (en lettres capitales pour accentuer leur rage) sont revenus démonter l’Orangerie du Botanique en support de « Joy As An Act Of Resistance », leur deuxième album sorti entre-temps.

« He’s John, I’m John, we’re John ». C’est en ces termes basiques mais efficaces que le batteur a présenté son groupe en désignant son complice guitariste. Basiques et efficaces, deux adjectifs qui pourraient caractériser les compositions du duo amené à allumer les premières mèches de la soirée. Mais on y ajouterait également brutes et hargneuses (cette voix énervée de derrière les fûts) tout en coulant nettement plus à l’oreille que celles de Death From Above auxquelles on serait tentés de les comparer.

En ce jour de Toussaint, on n’en aurait pas voulu à Joe Talbot, le leader de IDLES, s’il avait préféré arpenter les allées du cimetière plutôt que celles du Botanique. En effet, sa maman s’est éteinte à la suite d’une longue maladie pendant qu’il travaillait sur le premier album du groupe et sa petite fille est décédée lors de l’accouchement alors qu’il était occupé sur le second (le titre « June » lui rend un vibrant hommage). « Joy As An Act Of Resistance », publié sur le bien nommé label Partisan, colporte dès lors un message d’espoir mais il sert aussi et surtout de vecteur contestataire.

Et les sujets sont nombreux : Brexit, Trump, immigration, nationalisme ou encore homophobie auxquels ils réservent un traitement virulent bien trop rare parmi la nouvelle génération de groupes à guitares. À ce propos, ne les classez pas dans la catégorie punk, il s’agit d’une étiquette qu’ils réfutent catégoriquement. Ceci dit, l’énergie et l’engagement sont deux constantes dans leurs compositions qui explosent littéralement sur scène. Un exemple parmi d’autres ? Le pied de micro du chanteur ne tiendra en place que l’espace de quatre minutes, soit même avant la fin du titre d’intro, « Colossus »

Dans la foulée, le riff de « Never Fight A Man With A Perm » engendrera les premiers pogos au beau milieu de gobelets virevoltant dans les airs. Difficile en effet de rester de marbre lorsqu’un tel vent de rébellion vous prend de volée. Les essentiels « Mother » et « Faith In The City », déjà devenus des classiques, feront ensuite grimper l’intensité de quelques crans.

Affirmer que l’expressif Joe Talbot, sosie barbu de Passe-Partout ou de James Mercer (The Shins), chante juste s’apparente à un mensonge. À vrai dire, il ne chante pas vraiment non plus, privilégiant une déclamation brute (« I’m Scum », « Heel/Heal ») à l’instar de Charlie Steen (Shame) ou de Lias Saoudi (Fat White Family) qui cultivent le même esprit vindicatif tout en assumant complètement leur rôle de leader.

Loin de se prendre au sérieux, ses camarades de jeu ne se contentent pas de rester dans l’ombre. Les deux guitaristes prendront ainsi quelques bains de foule alors que le batteur enfilera le temps d’un titre un imper imitation léopard arrivé sur scène, l’imprégnant de sa transpiration. De son côté, le bassiste généreusement barbu, le plus sage de la bande, fera notamment claquer son instrument sur « Television » et « Great », deux nouveaux titres particulièrement bruts.

Parmi ceux-ci, pointons encore « Samaritans » (« I’m a feminist », déclarera le leader), l’efficace « Danny Nedelko » et l’angoissant « Love Song » qui ne dépareilleront pas aux côtés de « Divide & Conquer » (dédié au NHS, le système de santé publique british, financièrement mal en point), l’impeccable « 1049 Gotho » et « Exeter » pendant lequel la moitié du public se retrouvera sur scène, à l’invitation du groupe. Tout le monde reprendra toutefois sa position rapidement pour le rageur « Cry To Me » et le furieux « Well Done » qui amèneront la prestation vers un point de non-retour. Une prestation ponctuée par le désormais traditionnel « Rottweiler » bardé de hurlements bien sentis. Rock‘n’roll is definitely not dead.

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