Autumn Falls 2016 : la (human) performance de Parquet Courts au Bota
Contrairement à la plupart des gens qui l’accueillent avec morosité, l’automne devient petit à petit la saison préférée des amateurs de rock alternatif. La raison tient en deux mots : Autumn Falls. Le festival créé en 2010 propose cette année encore une affiche alléchante, dont la visite de Parquet Courts au Botanique ce vendredi 14 octobre était sans conteste l’un des points d’orgue.
Une soirée qui s’annonçait 100% New Yorkaise puisque le groupe choisi pour assurer la première partie, Pill, est originaire de Brooklyn et entretient des liens privilégiés avec les stars de la soirée. En effet, Andrew Savage les avait repérés à l’époque avant de sortir leur premier EP sur son label Dull Tools en 2015. Depuis, ils volent de leurs propres ailes et sont passés au format album depuis la fin de l’été avec la publication de « Convenience ».
Et le moins que l’on puisse écrire, c’est qu’ils empruntent un style singulier tournant autour d’un saxophone un peu (trop) mis en avant. À tel point que la chanteuse bassiste Veronica Torres, très garçonne au demeurant, passe au second plan malgré une voix criarde qui convient à leur univers. Un univers arty crasseux qui pourrait nous faire penser, toutes proportions gardées, à Talking Heads en visite au CBGB. Si l’on y ajoute un batteur épileptique complètement déjanté et un guitariste avide d’expériences sonores, on obtient un résultat tonitruant qui se construit au fur et à mesure du set.
Au fil du temps, les enregistrements de Parquet Courts sont devenus quant à eux plus lisse, mieux produits. Ils ont d’ailleurs pris le temps de peaufiner dans un studio digne de ce nom « Human Performance », leur excellent troisième album, qui est sorti chez Rough Trade au printemps dernier. Ceci dit, lors de leur visite au This Is Not A Love Song Festival à Nîmes début juin, on a eu la fâcheuse impression que leur énergie était restée coincée quelque part entre le bus de tournée et la scène. L’occasion leur était donnée de se racheter ce soir dans une Orangerie presque sold out.
En tout cas, ils n’allaient pas tergiverser en balançant d’entrée de jeu un furieux « Duckin And Dodgin », dont le break appliqué allait nous prendre aux tripes et entrevoir une soirée intense. D’intensité, il en sera question dans le futur immédiat puisque le groupe allait jouer dans l’ordre les sept premières plages de « Human Performance » parmi lesquelles un « Dust » bourré de distorsion et une impeccable plage titulaire agrémentée de claviers à la Doors feront office d’hymnes, au même titre qu’un « Outside » à trois voix.
Car aux côtés des deux guitaristes qui se partagent les vocaux chacun dans leur style (Andrew Savage rageur du côté gauche de la scène et Austin Brown plus tempéré à droite), on retrouve le bassiste Sean Yeaton (le sosie de Dave Grohl) qui passera la soirée à se tortiller et en poussant la chansonnette de temps à autre. Derrière, le batteur Max Savage (le frère d’Andrew) tient toute la structure en place malgré un style faussement délicat qui le voit heurter ses fûts transparents avec des baguettes que l’on dirait empruntées à Harry Potter.
Ceci dit, quand il décide d’accélérer le tempo, on se retrouve dans des parties énergiques qui les verront notamment enchaîner « Master Of My Craft », « Borrowed Time » et « Yr No Stoner » pour un triptyque rock garage sixties particulièrement réussi. Un peu plus tard, ils réserveront un traitement similaire à « Bodies », « Black & White » et un bref « Vienna II ». Ce sont les parties du set qui dégageront le plus de sueur et qui nous renverront aux débuts du groupe dont la prestation à l’AB en octobre 2013 (le jour de la mort de Lou Reed) nous avait décoiffés.
Malheureusement, ce soir, tout ne sera pas parfait. Certaines parties vocales approximatives ne rendront pas justice à certains titres alors que des intermèdes un peu trop longs feront redescendre l’intensité. Sans parler de leur humour New Yorkais qui n’amusera qu’eux, surtout qu’ils ne sont jamais à court d’idées lorsqu’il s’agit de s’envoyer des vannes.
Ceci dit, si l’on excepte un saccadé « Sunbathing Animal » au break superflu, la fin du set sera à la hauteur de nos attentes. L’excellent et atypique « Berlin Got Blurry » (car particulièrement mélodieux) ouvrira la voie à un hypnotique « One Man No City » très Velvet Underground dans les atmosphères. La dernière flèche de la soirée sera décochée via un rageur « Light Up Gold », rendant tout rappel superflu. Vive l’automne !