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DAAN au Depot, en français dans le texte

Même s’il n’a jamais vraiment disparu du paysage au travers notamment de sa tournée semi acoustique en trio, Daan n’avait plus rien sorti depuis 2009. « Le Franc Belge », son nouvel album, le replace sur l’échiquier avec une certaine prise de risques puisque la majorité des titres sont chantés en français. Il était au Depot de Louvain ce vendredi 3 mai pour les tester en grandeur nature.

Dès l’entrée dans la salle, le ton est donné avec la projection permanente sur grand écran, de ce qui ressemble furieusement à la pièce de monnaie commémorative de 500 BEF émise à l’occasion du 150e anniversaire du Royaume, en 1980. L’occasion de se replonger dans un passé pas si éloigné que cela, où le profil du Roi Baudouin apparaissait sur les pièces de monnaie locales.

Ceci dit, la nostalgie n’aura que très peu de place ce soir car l’ami Daan Stuyven va consacrer la quasi majorité du temps qui lui est imparti à la présentation de son nouvel opus. Il va toutefois y aller tout en douceur en débutant avec le très calme « Parfaits Mensonges » et l’atypique « Ma Vendeuse ». Sans surprise, il dégage une classe naturelle que ses lunettes de soleil et son costume ne font qu’amplifier. Quant à sa voix caverneuse et son look grisonnant, ils le font de plus en plus ressembler à Arno ou à Gainsbourg.

Le fantôme musical du second nommé viendra d’ailleurs rôder plus d’une fois sur la scène du Depot, certaines atmosphères rendant presqu’un hommage au maître. A propos, contrairement aux apparences et à ce qui aurait pu ressembler à une évidence, les textes en français n’ont pas été écrits par Jacques Duvall mais par Thierry Dory, l’homme qui a mis en boîte le DVD live enregistré à Flagey « Concert« ) et qui s’est trouvé une vocation de parolier. Le talent mélodieux et la voix de Daan ont fait le reste pour un résultat étonnant, comme sur « Mes Etats Unis », le premier titre à réellement emballer l’assemblée ce soir.

Autour de lui, on retrouve la fidèle batteuse Isolde Lasoen, anormalement stricte aujourd’hui (on dirait une écolière appliquée) et le (contre)bassiste Jean-François Assy, qui s’est également occupé des arrangements de cordes sur la plaque. Mais le claviériste Jeroen Swinnen et le trompettiste Jo Hermans ont clairement leur mot à dire dans le son minutieusement mis au point. Sans oublier le guitariste Geoffrey Burton, un peu à l’écart il est vrai, mais qui va véritablement prendre son pied en décochant des riffs dont il a le secret (notamment sur l’efficace « Everglades » et le presque disco « The Gates »).

Alors qu’il ne les enlevait que pour s’éponger le visage, il va définitivement mettre de côté ses lunettes de soleil au moment d’entamer « Exes », un des deux seuls titres plus anciens interprétés lors du set principal (le second étant le toujours aussi populaire « Icon », également extrait de « Manhay »). L’ambiance sur scène est au beau fixe et on se délecte des regards complices entre Daan et ses musiciens. Une complicité qui prend une dimension presqu’insolente avec Isolde. Pour preuve, cette interprétation langoureuse de « Conducteurs Fantômes », presqu’au corps à corps. Soit dit en passant, la voix de la batteuse, dans un français hésitant, renvoie au génie de Gainsbourg (encore!) lorsqu’il faisait chanter Jane Birkin dans les années 60. Un grand moment à l’orchestration tout simplement prenante.

Une des forces de Daan est qu’il parvient à s’immiscer dans n’importe quel style musical tout en conservant sa crédibilité. Prenez par exemple « Mélodies Paroles » dont la version big band jazzy laisse tout le loisir à Jo Hermans de s’exprimer via ses cuivres. C’est alors qu’il va laisser tomber la veste, laissant apparaître une chemise à frou-frou que lui seul peut arborer sans avoir peur du ridicule, avant d’entamer le langoureux « Lust Or Love ».

D’une manière générale, on peut dire que les versions proposées sur scène présentent une puissance inédite par rapport au disque qui n’est pourtant sorti que depuis une quinzaine de jours. On le remarquera encore sur « La Crise » tout à fait réorchestré alors que « La Vraie Décadence » est peut-être bien le véritable tube de cet album. En tout cas, les parties de guitare enlevées et le final chaotique à la Ghinzu montrent à quel point le groupe est au point. « The Kid » va clôturer le set principal dans un habillage très Dylanesque.

Les rappels seront entamés tout en douceur avec « Belle », un autre titre inspiré de la grande chanson française des années 60 que le public exclusivement néerlandophone ne saisira pas ce soir. En revanche, « Swedish Designer Drugs » en duo frénétique avec Isolde et « Housewife » (qui incorpore judicieusement des cuivres) vont mettre le feu au Depot, en partie grâce à un Jeroen Swinnen bien en verve. Derrière son clavier, il se prendra pour un membre de Goose, en sautant sur place le poing en l’air. On ne s’ennuie jamais à un concert de Daan… Vérification ce lundi soir aux Nuits Botanique…

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