DEAMON’S CHILD – Scherben müssen sein
Le titre allemand du deuxième album de Deamon’s Child signifie qu’il doit y avoir des tessons de bouteille, des éclats de verre. Un appel à la casse, en quelque sorte, ce qui n’est pas étonnant quand on connaît ce turbulent trio teuton composé d’Ana Muhi (basse et chant), Missu (guitare) et Tim Mohr (batterie), qui secoue la scène punk underground allemande depuis maintenant trois ans.
Nous avions eu maille à partir avec Deamon’s Child lors de la sortie de son premier album « Deamon’s Child« qui venait mettre quelques savoureux coups de pied au derrière et semait une perturbation sonore fondée sur un rock d’obédience hardcore et stoner. La bande d’Ana Muhi continue ici ses méfaits avec ce deuxième album qui pénètre un peu plus dans les territoires maudits du punk et qui maintient ce style agressif et malsain qui caractérise Deamon’s Child.
Avec un démarrage tempétueux faisant virevolter une guitare folle (« Das Vogellied »), Deamon’s Child place immédiatement le contexte : rythmique hachée, mur de guitares, chant en allemand. L’atmosphère interpelle l’auditeur qui a connu les années 80 et particulièrement la fameuse Nena et ses « 99 Luftballons ». On sent ici une remise au goût du jour de la new wave allemande à coups de flingues. L’énergie feutrée des Eighties est ici transformée en assaut blindé, razzia punk ou cataclysme électrifié. L’hémorragie sonore continue avec « Zucker », également très haché et nerveux, prélude à l’ultra-rapide « Keine Zeit », capable de faire passer les louloutes des Savages pour une gentille troupe de vahinés.
Et la suite de l’album se poursuit selon le même schéma. Ça claque, ça démantèle, ça pilonne, ça agresse et ça enthousiasme (« Geld », « Schweinehund, kom tanz mit mir », le bien nommé « Monster »). Mais il y a un faux pas : l’inutile « In Kinderschuhen », exercice de spoken word en allemand avec une voix passée au vocodeur pour en faire une récitation très aigüe, comme si Alvin et les Chipmunks s’étaient invités dans le studio. Alors que l’album battait son plein dans la splendeur, ce passage vient balancer une douche froide. C’est la faute de goût, la balle dans le pied, le truc idiot et vain. Aurait-on pu imaginer Slayer placer en plein milieu de son « Reign in blood » de 1986 une petite aubade à base de chant tyrolien, ou Metallica terminer son « Ride the lightning » avec une reprise de Chostakovitch à l’accordéon? Eh bien, ce genre de bourde, les gens de Deamon’s Child ont osé le faire. Je ne vous cache pas que cela leur coûte une demi-étoile de note finale.
Heureusement, le groupe se rattrape avec le dernier titre, un long périple de dix minutes en territoire doom et sludge, où la guitare s’enlise dans des circonvolutions poisseuses et menaçantes, s’éclaircit soudain dans une barcarole livide puis se fait rejoindre par une rythmique ronflante et chahutée d’où surgit le chant de crécelle épileptique d’Ana Muhi qui finit le boulot dans une cadence martiale et révoltée.
Au final, on a ici un nouvel album de Deamon’s Child qui confirme tout le bien qu’on pouvait penser de ce groupe toujours prêt à ruer dans les brancards. A part la litanie de petite souris de « In Kinderschuhen », il n’y a rien à jeter dans cette galette plombée et explosive.
Pays: DE
Zygmatron Music
Sortie: 2016/02/26