KRIEF, Norbert – NoNo
Norbert Krief a été le guitariste de Johnny Halliday de 1987 à 1994. Véritable requin de studio, il apparaît aussi sur quelques albums de Jean-Jacques Goldman, Florent Pagny et Patrick Fiori. Mais tout cela, nous n’en avons franchement pas grand-chose à cirer. Car pour nous, les fans de hard rock, Norbert Krief sera toujours Nono, le guitariste de Trust. Le mec qui, associé à Bernie Bonvoisin, a écrit tous les hymnes de notre adolescence : « Antisocial », « Marche Ou Crève », « L’élite », « Saumur », « Le Mitard », « Préfabriqués », « Monsieur Comédie », « Certitude… Solitude », « La Junte », « Ton Dernier Acte », et tant d’autres.
Trente-quatre ans après ses débuts, Nono a écoulé (au sein de Trust) plus de sept millions d’albums. Il a apposé sa patte de musicien sur près d’une centaine de disques. Il est aussi le seul Français à pouvoir se targuer d’avoir donné son nom à deux guitares de grande marque : la Nonocaster 2, une Fender Stratocaster sortie en 2002 et la Nono Corvette G5135N, une Gretsch créée en 2009 pour fêter les 125 ans de la marque New-Yorkaise. Cependant, le guitariste n’avait, jusqu’ici, signé aucun album de son patronyme. Il était donc grand temps que le héros de notre adolescence se penche sur ce disque solo que beaucoup espéraient depuis des lustres. Grâce à la sortie de « NoNo », c’est aujourd’hui chose faite.
En glissant « NoNo » dans le tiroir de notre platine laser, nous ne pouvons nous empêcher d’avoir un pincement au cœur. Et si notre héros, influencé par ses collaborations ‘éclectiques’ avec les plus grandes stars de la chanson française s’était fendu d’un album pop mou du genou ?
La courte introduction de « Blink of An Eye », la plage d’ouverture de la galette, n’est pas franchement rassurante. Nono aurait-il décidé de nous la jouer symphonique ? Pas de panique ! Tel un tsunami, un riff énorme balaie cette ‘farce classique’ en quinze secondes à peine. Pas de doute, « NoNo » sera un disque rock’n’roll du meilleur cru. Et ce premier titre fleure d’ailleurs bon le patchouli et le hard rock des seventies. Surprise de taille : c’est Nono lui-même qui assure les vocaux et le bougre chante rudement bien. Le titre qui suit, fait un peu office d’exception puisqu’il est le seul de l’album à être interprété dans la langue de Molière. Avec son refrain accrocheur, son petit côté ‘mi-blues/mi-pop’ et ses superbes parties lead, « A Dieux » dispose d’atouts séduisants pour les programmateurs des radios généralistes, tout en restant plus que ‘politiquement correct’ pour les aficionados les plus ‘rock’n’roll’ de l’ami Norbert.
De rock’n’roll, il en est encore question avec ce « Do It Right » Rolling Stoneien sur lequel Nono Krief est à la fois Mick Jagger et Keith Richards. Alors qu’un harmonica et une pédale wah-wah font osciller « Borderline » entre le blues boueux des marais de Louisiane et le classic rock de la Vieille Angleterre, « Here And Now » renvoie carrément l’auditeur au début des sixties, à l’époque où les Beatles régnaient en maîtres. De toute évidence, Norbert s’est fait plaisir en rendant un hommage musical aux héros de sa jeunesse. Cette impression perdure sur « She’s Burning Up My Bed » qui évoque à nouveau le rock’n’roll festif des Stones et dont l’introduction est interprétée par une charmante demoiselle à l’accent français un peu trop prononcé.
Fortement teintés de rock psychédélique des seventies, les envoûtants « You Keep Me Satisfied » et « How Does It Feel » sont taillés pour satisfaire les amateurs de stoner rock. Si « Back To Rock’n’Roll » est le ‘chaînon manquant’ entre le boogie rock de Status Quo et le rock’n’roll des Stones, les instrumentaux « Wavedream » , « Vagabondages », et « Charter 68 », eux, rappellent que s’il est un rocker dans l’âme, Monsieur Krief est aussi un guitar-hero à part entière. Et, côté technique et feeling, le guitariste n’a pas grand-chose à envier à Joe Satriani et consorts.
L’un des moments les plus forts de cet album solo est sans doute cette reprise très personnelle d’« On The Road Again ». Le standard du blues, popularisé en 1968 par Canned Heat, se voit ici agrémenté d’une surprenante intro beatboxée.
Sans se lancer dans d’insipides démonstrations techniques, Norbert Krief signe ici un véritable album de guitares et renvoie, à leurs études musicales, bon nombre de soi-disant guitar-heroes actuels. Foncièrement électrique tout en restant singulièrement éclectique, l’album s’adresse, bien sûr, aux fans de Trust qui suivent le guitariste depuis le début de sa carrière, mais aussi à tous ceux qui savent apprécier le rock’n’roll véritable. Indispensable.
Pays: FR
XIII Bis Records
Sortie: 2011/06/06