EXTINCT DREAMS (The) – Shining Of Beyond
Ah, les hasards de la géographie. S’ils avaient été originaires de Rio, ces cinq musiciens auraient probablement passé leurs journées à siroter des Caipirinha glacés en se trémoussant au son langoureux de la samba. Seulement, Roman (guitare, chant), Semjon (basse), Kirill (guitare, chant), Masha (claviers) et Den (batterie) sont nés à Barnaoul au sud-ouest de la Sibérie. Une région recouverte de neige trois mois par an où la température hivernale atteint les quarante degrés au dessous de zéro. Difficile dans ces conditions de danser, demi-nu, en affichant aux lèvres un sourire béat (NDR : c’est plutôt douloureux quand elles sont gercées en permanence). Il n’est donc pas étonnant que le quintette se soit dirigé vers un style musical un peu moins léger : le funeral doom.
Appelé Ars Moriendi à sa création en 2006, le groupe opte, l’année suivante, pour un patronyme un peu moins couru (NDR : il existe déjà au moins cinq Ars Moriendi) : The Extinct Dreams. Deux démos publiées en 2007 (« Into The Extinct Dreams » et « November Rehearsel ») attirent l’attention du label Backfire Productions qui publie, en 2008, le premier album « Ars Moriendi ». C’est le même label qui, en 2010 s’associe à Stygian Crypt productions pour distribuer à plus grande échelle le nouvel opus « Shining Of Beyond ».
Nous avons eu affaire, ces derniers temps, à plusieurs formations funeral doom originaires de la Fédération de Russie. Citons, par exemple, Ankhagram, Flegethon et Funeral Tears, trois formations qui ont pour point commun d’être des ‘one-man band’. Si cette configuration permet d’éviter les sempiternelles divergences musicales, elle est souvent synonyme de linéarité, de monotonie et de pauvreté stylistique ce qui, à la longue provoque une certaine lassitude.
La force de The Extinct Dreams est donc d’être un véritable groupe. Cinq têtes pensantes qui, comme l’affirme le célèbre adage, en valent mieux qu’une et qui apportent même un souffle relativement nouveau au métal funéraire. Car si ce style est en général répétitif et ennuyeux au bout d’un quart d’heure, il se trouve ici transcendé par l’apport d’idées intéressantes, telles que l’incorporation de passages aérés, d’intermèdes de claviers ambiants, de guitares acoustiques ou de vocaux clairs mélancoliques. Les plages, même les plus longues (NDR : l’une d’entre elles dure dix-sept minutes) restent, de ce fait, agréables à écouter de bout en bout et se réécoutent même avec plaisir malgré l’ambiance tristounette. Les textes, chantés/growlés en russe apportent une touche d’originalité supplémentaire, ce qui n’est pas pour nous déplaire.
Avec « Shining Of Beyond », le funeral doom devient moins hermétique. Une hérésie, probablement pour les ayatollahs du genre ; une réussite pour nous.
Pays: RU
Backfire Productions BP 013 / Stygian Crypt
Sortie: 2010