WIGWAM – Being
Poursuivons si vous le voulez bien la saga Wigwam. Après le superbe double album « Fairyport« sorti en 1971, la formation scandinave pond en 1974 un album concept, traitant de la lutte des classes et de la spiritualité, tout un programme ! Un disque ambitieux, succédant à une œuvre majeure de l’école de Canterbury. Cette galette est la dernière de la première époque de Wigwam. En effet, après la sortie de « Being », Wigwam devra assumer les départs de Jukka Gustavson (claviers) et de Pekka Pohjola (basse, violon, claviers), ce qui s’accompagnera d’un changement majeur de style, d’une évolution vers des chansons plus courtes.
Le reste du groupe est constitué de Ronnie Osterberg (batterie, percussions) et de Jim Pembroke (chant, « sermons », piano). À en croire le commentaire de ce dernier sur le livret accompagnant le CD, « Being » fut considéré par la presse comme le chef-d’œuvre du groupe. Trente-six ans plus tard, qu’en est-il ? Nous allons en discuter dans les lignes qui suivent.
La musique proposée ici est typique de Wigwam, jazz-rock fouillé, rythmique de premier plan, irréprochable, et swing omniprésent. Du grand art ! Maintenant, il y a les textes, ou plutôt leur interprétation. L’essentiel de l’album se présente sous forme de coupures de journaux, de pamphlets. « Proletarian », « Petty-Bourgeois », les titres parlent d’eux-mêmes. Jim les chante, mais en donnant l’impression de placer un maximum de mots sur la musique du groupe. Ceci confère à sa performance un caractère incantatoire (faut aimer !). On a vraiment l’impression que l’ami Pembroke nous lit un discours. Cela dit c’est probablement volontaire. Seul « Maestro Mercy » fait exception, véritable chanson, basée sur une mélodie vocale splendide, le soulagement après le tumulte. Après moult écoutes, je reste d’avis que si les parties instrumentales du disque sont extraordinaires, le caractère pamphlétaire du chant devient rapidement pesant pour l’auditeur.
Jim est pourtant un excellent chanteur, sa voix et ses intonations rappelant par instants Ian Anderson. La musique est rappelons-le magnifique, proche de celle de Gentle Giant. Mais voilà, le style tout en prose journalistique a mal vieilli. L’œuvre concept contemporaine qu’est « The Lamb Lies Down On Broadway » a beaucoup mieux résisté à l’érosion du temps. Alors chef-d’œuvre du groupe ? Personnellement, je me permets d’écrire ici que je trouve que cette place revient plutôt à « Fairyport ». « Being » est un essai amusant, un bon album méritant votre attention, mais pas essentiel comme l’est son prédécesseur, mais cela n’est encore qu’affaire de goût.
Pays: FI
Esoteric Recordings ECLEC 2183
Sortie: 2010/02/22 (réédition, original 1974)