YAMASHTA, Stomu & COME TO THE EDGE – Floating Music
Né en 1947 à Kyoto, au Japon, Yamashita Tsutomu, plus connu sous le nom de Stomu Yamash’ta, est un claviériste percussioniste qui très tôt est parti se former aux Etats-Unis, notamment à la Berklee College of Music de Boston. Son très long parcours est éclectique ; nous nous intéresserons seulement à celui qui a frôlé le rock progressif des années 70. La musique de Stomu Yamash’ta est ultra sophistiquée et réservée à une élite. Elle est née au début des seventies et est tellement complexe qu’elle a suscité un phénomène de rejet par ceux qui sont incapables de la jouer. Pour faire court, indirectement et à son corps défendant, elle fait partie de ces musiques qui par l’absurde sont à la base de la naissance du mouvement punk. Elle mêle musique classique, jazz fusion, prog rock, ambient, world music et est tout cela à la fois, avec un zeste d’avant-garde. Ici, Stomu Yamash’ta joue avec le groupe de jazz rock Come to the Edge.
L’album « Floating Music » comprend quatre longs morceaux, dont deux ont été joués dans le film de science fiction « The Man Who Fell To Earth », de Nicolas Roeg, avec David Bowie dans le rôle de l’alien. Il s’agit de « Poker Dice » et de « One Way ». Le premier est une très longue pièce lazy de plus de 18 minutes conduite par le piano et faite d’improvisations, qui met en scène Morris Pert à la batterie et aux percussions, Phil Plant à la basse, Peter Robinson au piano et Stomu Yamash’ta aux percussions. Ce morceau laisse une grande place à la musique expérimentale et d’avant-garde. La musique laisse peu de latitude à la structure cartésienne et permet à chacun de se lancer dans des improvisations pleines de créativité qui se traduisent par des dialogues inventifs mais néanmoins cohérents. On pense à Soft Machine et Nucleus. On y remarque notamment le très bon travail du bassiste et bien sûr les percussions de grande qualité, dont le vibraphone est souvent la figure de proue, avec des instruments bizarres qui surgissent de partout au moment où on ne les attend pas.
« Keep In Lane » est beaucoup plus exubérant et tonitruant sous l’impulsion des cuivres et comprend Robin Thompson à l’orgue, au piano, au saxophone soprano et au sho, un orgue à bouche japonais, Phil Plant à la basse, Morris Pert à la batterie, et Stomu Yamash’ta aux percussions. Une section cuivres omniprésente complète le tableau sonore. La musique y est beaucoup plus tribale, avec des cris incompréhensibles, et fait penser au groupe d’avant-garde allemand Can, dont on ne dira jamais assez l’influence qu’il a pu avoir grâce à sa musique d’avant-garde. Les percussions sont d’une complexité telle que l’on a peine à suivre quand le rythme s’accélère.
Le long « Xingu », joué live au Queen Elizabeth Hall de Londres, laisse place à la folie de Stomu Yamash’ta. Il se laisse aller complètement et donne libre cours à son tempérament mais avec la technique en prime avec l’aide de Morris Pert, Andy Powell à la basse et Robin Thompson, qui donnent un aperçu de leur valeur en public. Tour à tour, la basse, l’orgue et les percussions étonnantes occupent le haut du pavé mais ce sont surtout les percussions qui surprennent par leur inventivité et la qualité des sons émis.
« One Way », l’autre morceau qui figure dans le film « The Man Who Fell To Earth », est le dernier très long morceau de l’album. On y retrouve Stomu Yamash’ta, Morris Pert, Andy Powell et Robin Thompson lors de ce même concert en direct. Ils y donnent aussi le meilleur d’eux-mêmes en recréant une atmosphère de mystère qui crée la tension par des sons à la limite du supportable, parfois. L’accélération du rythme donne le coup de grâce dans cette ambiance de fin du monde.
Cet album qui comporte des longueurs plaira surtout à ceux qui ont connu l’époque des soli interminables et des improvisations kilométriques jouées par des musiciens de grande valeur. Il risque d’être indigeste pour les plus jeunes.
Pays: JP
Esoteric Recordings ECLEC 2084
Sortie: 2008/09/29 (réédition, original 1972)