WOLFMOTHER – Wolfmother
Non, il ne va pas révolutionner le rock. Il va tout au plus le secouer comme un prunier. Non, ce n’est pas non plus « encore un autre groupe anglais ». Ce groupe qui a fait grosse impression à Werchter nous vient d’Australie et marche sur les traces des White Stripes et de leurs compatriotes de Jet. Leur producteur est d’ailleurs le même que celui de « Get Born » : Dave Sardy, qui a aussi produit « Nevermind » de Nirvana, « Thirteen Tales from Urban Bohemia » des Dandy Warhols, « Let’s Bottle Bohemia » des Thrills, « Aftertaste » de Helmet, « No Push Collide » de Serafin, « Hot Hot Heat » de Hot Hot Heat et « Don’t Believe The Truth » de Oasis, parmi d’autres.
Ce groupe de Sidney est une véritable secousse tellurique : inattendu et imprévisible, il va faire des dégâts et détruire tout sur son passage. Sur « Dimension », un titre saccadé très incisif qui rappelle Led Zeppelin, le texte n’est pollué que par la rythmique mais chaque phrase est soulignée par un riff de guitare. Changement de technique sur « White Unicorn », la guitare ne se privant pas d’intervenir sans distinction entre paroles et intervalles entre les couplets. On n’est pas prisonnier d’un procédé, ici. Ce qui compte, c’est la créativité et l’impact sur le public par l’énergie que l’on dégage ; cela n’exclut pas une mélodie agréable. Le morceau se termine en apothéose sonore.
« Woman » est sans doute le morceau le plus connu mais ça cartonne à chaque fois. Quelle claque ! Andrew Stockdale, le chanteur et guitariste, est à la fois charismatique et performant sur scène. Chris Ross, le bassiste claviériste, prend un malin plaisir à torturer son synthé, le tenant tantôt en oblique, tantôt à la verticale. Derrière les tambours, Myles Heskett se débat comme un beau diable. Ces trois-là ensemble font un fameux boulot !
Comment choisir un plus bel exemple de mélodie que « Where Eagles Have Been », même si cela se déchaîne après une minute ? C’est une autre preuve de la versatilité de cette promesse réelle, révélation des festivals de l’été. Wolfmother va déferler sur les ondes dans les mois à venir, c’est sûr, et c’est tant mieux. Il a de la gueule et du talent à revendre.
« Apple Tree » est un autre titre versatile et surprenant. Par moments, on jurerait entendre Ozzy Osbourne à ses débuts. Enfin, à peu près. Par contre, il y a du White Stripes sur ce « Joker & The Thief », un des meilleurs titres de l’album. Avec une filiation pareille … Que ce soit sur le plan instrumental ou vocal, c’est assez flagrant mais pas choquant : chacun garde sa personnalité propre. C’est une simple allusion à l’histoire du rock. Si Andrew Stockdale se donne parfois des airs de Jack White, Myles Heskett n’est pas Meg White …
« Colossal » appartient à la filière du groupe, celle qui déménage. Ici aussi, l’énergie est privilégiée mais la mélodie est présente au moins pendant une partie de ce morceau très bien construit autour de percussions qui remuent les tripes vite fait. « Mind’s Eye » est un futur grand morceau à la fois varié et nuancé qui donne du relief à l’album par son rythme en trompe l’oreille et sa versatilité, par sa douceur offerte en alternance avec sa vigueur, selon la technique appliquée par Thin Lizzy au temps de sa splendeur.
« Pyramid » est un autre morceau phare de ce futur grand groupe en puissance. Energique à souhait, il décoiffe et est avec « Witchcraft », un autre titre saccadé et syncopé, dans la lignée des morceaux rythmés et vitaminés du groupe. « Tales from the Forest of Gnomes » introduit le rêve dans cet album bourré d’énergie et contribue à sa diversité. On dirait du Jethro Tull à son meilleur, la flûte en moins.
Tout aussi déroutant, « Love Train » évoque Led Zeppelin, juste le temps d’un clin d’œil. On ressent l’impression que toutes ces références au passé sont là comme des balises en hommage à des grands du rock, sans la moindre idée de copier qui que ce soit : il ne fait aucun doute que le groupe a suffisamment de personnalité pour s’en passer mais il tient à s’inscrire dans le courant de l’histoire du rock. « Vagabond » débute aussi comme l’auteur de « Cripple Crown », Devendra Banhart, le ferait : tout en douceur, pour virer vers une musique plus énergique et terminer en douceur. Etourdissant !
S’ils confirment, si rien ne vient troubler leur bonne entente, si leur ego résiste aux pressions, on tient là de futurs grands. Ils viendront se joindre, aux mêmes conditions de survie, à des groupes comme Art Brut, The White Stripes, The Kills, Kaiser Chiefs, Interpol, Editors, The Subways, Arctic Monkeys, Black Rebel Motorcycle Club, Jet, Razorlight et consorts au sommet du rock de demain, quand les vieilles gloires cesseront de s’accrocher à leurs chimères, parfois au point d’en devenir pathétiques, pour alimenter le tiroir caisse. « There’s a cash register ringing », dit Morrissey dans « You Know I Couldn’t Last », sur l’album « You Are The Quarry », où il fustige quelques stars du rock sensibles uniquement à l’appât du gain. Mais comme à chaque génération, un vent de renouveau souffle sur le rock pour le régénérer et repartir vers d’autres horizons lointains.
Pays: AU
Universal 0602498776841
Sortie: 2006/05