McCARTNEY, Paul – Chaos And Creation In The Backyard (special edition)
Sir Paul McCartney a tout fait tout seul sur son nouvel album, le vingtième, l’un des meilleurs de sa longue carrière solo. Seul le producteur Nigel Godrich (Radiohead, Beck, Travis, Neil Finn, Pavement, The Divine Comedy, R.E.M., Paul Oakenfold, Dave Clarke, Air) l’a aidé dans sa tâche. C’est Sir George Martin, l’ancien producteur des Beatles, qui le lui a recommandé pour l’aider à produire son premier album en quatre ans. Godrich a un peu bousculé la star dans ses habitudes et l’a poussé vers plus de dépouillement.
McCartney a composé toutes les chansons et joué de la guitare, de la basse, du piano, de la flûte, de l’harmonium, du bugle et de la batterie. Le résultat de ce retour aux sources est plein de fraîcheur et de simplicité apparente car l’album comporte une sorte de gravité qu’on ne lui connaissait pas. Quand on lui reproche de s’inspirer des Beatles, il répond avec une fausse candeur : « Pourquoi serais-je le seul à ne pas pouvoir le faire ? ».
« Fire Line » est un titre primesautier où il exhibe son sens inné de la belle mélodie. Il n’a pas son pareil pour trouver un air qui accroche à la première écoute. Les cordes du Millennia Ensemble parachèvent le travail. Sans être du même acabit, « How Kind of You » est une ballade sirupeuse assez mièvre telle qu’il en a produit des tonnes au cours de sa carrière. Pourtant, une fois que ces chansons-là pénètrent dans le subconscient, il devient difficile de s’en débarrasser.
« Jenny Wren » est une magnifique chanson qui rappelle les meilleures mélodies des Fab Four. On ne peut nier l’apport de Sir Paul dans ces morceaux imparables qui ont fait leur succès dans le passé. Il retrouve ici toute sa verve d’antan. A noter l’utilsation du duduk, un instrument à vent d’origine arménienne. Un défaut m’empêche de vous en dire plus sur ce qui est un des meilleurs morceaux de l’album. Pas de chance.
Sublimé par l’utilisation du violoncelle, « At the Mercy » est un autre titre phare de l’album. Très doux, il s’écoule comme un long fleuve tranquille et berce nos oreilles jusqu’à ce break bizarre qui change complètement la donne. A vous de découvrir la fin.
« Friends to Go » renoue avec les chansons plus rythmées, sans bousculer le moins du monde l’auditeur : ce n’est pas le genre de la maison. Le « gentil Paul » est trop policé pour déplaire. Il n’empêche que ce titre mérite les plus vifs éloges. Grâce au Millennia Ensemble, « English Tea » vous a des airs classiques au début mais bifurque vers le guilleret et le superficiel. Surprenant et excellent !
Caractérisé par la présence de l’autoharp et des maracas, « Too Much Rain » est aussi une très belle ballade, bien jouée et chantée avec talent. C’est un autre point fort de l’album. L’accompagnement au piano, tout en nuance, est vraiment remarquable. Le sirupeux et mièvre « A Certain Softness » est un peu plus faible car il souffre de la comparaison avec ce qui précède. On peut pourtant y admirer la partie jouée à l’harmonium et être séduit par les paroles. L’amour rend aveugle, c’est bien connu.
A l’inverse, « Riding to Vanity Fair » est un très bon titre. Atypique, il apporte de la variété par ses arrangements impeccables, les parties vocales et la gravité de l’atmosphère qui fait penser à un bilan avant de repartir vers d’autres aventures. De nouveau, du point de vue mélodique, il tape dans le mille. Ce sont The Los Angeles Music Players qui jouent des instruments à cordes, cette fois. Par contraste, « Follow Me » apporte tout en douceur son lot de fraîcheur subtile.
Beaucoup plus rythmé, « Promise to You Girl » est aussi un titre atypique où les fans joueront à reconnaître le titre auquel ce morceau fait penser. Le très classique « This Never Happened Before » est aussi sublimé par les cordes du Millennia Ensemble.
« Anyway » constitue la conclusion idéale de cet album presque parfait mais qui comporte quelques longueurs. Il montre une sorte de fragilité peu apparente jusqu’ici chez cet artiste d’exception un peu trop clean pour être vrai. Il parle d’amour et du besoin d’être apprécié. Qui l’eût cru ? De nouveau, les fans tenteront de reconnaître le titre dont il s’inspire sans remords. La fin du titre caché relève du génie. Bouleversant !
Le DVD, qui est d’une qualité technique irréprochable et complète parfaitement l’album, comporte un documentaire de 30 minutes, « Between Chaos and Creation », où l’on voit Sir Paul donner ses impressions, de même que le producteur Nigel Godrich. C’est une sorte de Making of parsemé d’interviews et de travail en studio. Il y a aussi des extraits du Festival de Glastonbury 2004 où il a eu un succès considérable. On voit aussi une vidéo de quatre minutes où, par le miracle du montage, on voit Paul jouer simultanément de tous les instruments sur « Fire Line », un film d’animation de 12 minutes intitulé « Line Art » et signé Momoco sur des dessins de Brian Clarke, où l’on entend les versions instrumentales sophistiquées de « Riding to Vanity Fair », « At the Mercy » et « Anyway », sans oublier le menu de 5 minutes pendant lequel on assiste à une intrusion de la caméra dans le studio parmi les instruments et les objets hétéroclites disposés çà et là, dont les feuilles manuscrites ou tapées à la machine, avec les notes ou les paroles de Paul McCartney, avec en fond sonore le deuxième morceau du CD, « How Kind of You ».
Pays: GB
Capitol 00946 338325 2 7
Sortie: 2005/09/12