Les Nuits 2024: la sélection de Music in Belgium (part 1)
À quelques encablures de la trente-et-unième édition des Nuits du Botanique, place à notre traditionnelle analyse d’une affiche particulièrement riche. Plus de 150 groupes et artistes vont en effet défiler sur les quatre scènes d’un complexe en pleine ébullition entre le 24 avril et le 5 mai. Même si, on le verra, les dates déborderont quelque peu et certains événements seront délocalisés.
Ce sera d’ailleurs le cas de la soirée d’ouverture qui se tiendra aux Halles de Schaerbeek le samedi 20 avril. À mi-chemin entre concert et performance, le show d’Alto Fuero lancera les festivités via une première création à vivre intensément. Entre la présence captivante de Victoria Palacios et les sonorités envoûtantes de Loto Retina dictées notamment par une flûte et une basse ténébreuse, l’expérience prendra une dimension supplémentaire sous une forme collaborative. Une scénographe et des musiciens invités prendront en effet part à un spectacle unique en son genre.
Les choses sérieuses débuteront donc le mercredi 24 avril, lors d’une nuit de pleine lune qui illuminera le talent singulier de Strawberry Guy à la Rotonde. Le singer-songwriter gallois actuellement basé à Liverpool n’a pas son pareil pour installer des atmosphère mélancoliques désarmantes. Des arrangements somptueux et un visuel intemporel complètent un tableau devant lequel il sera difficile de ne pas s’émerveiller. Autre salle, autre ambiance pour la venue de Clipping. from Los Angeles à l’Orangerie. Du hip hop expérimental, certes, mais à la puissance décuplée dont certains groupes feraient bien de s’inspirer. Leur visite à la Source Beer Co en août dernier a bien failli être fatale aux cuves de la brasserie…
Les jours suivants, les sonorités orientales et exotiques auront notre préférence, dignement représentées par un artiste comme Jawhar lors des dernières éditions. Cette année, Le Cri du Caire se profile comme un must absolu tant pour les amateurs de jazz que ceux de world music. Emmené par le saxophone de Peter Corser et la trompette d’Erik Truffaz, le quartet se voit sublimé par la voix captivante du poète égyptien Abdullah Miniawy. À découvrir dans l’intimité du Museum le 25 avril avec les Slovènes de Širom en première partie, curiosité instrumentale en provenance des Balkans.
La Turquie sera quant à elle représentée par Gaye Su Akyol à l’Orangerie le 26 avril. Les compositions multiculturelles de la native d’Istanbul se veulent délibérément globales. On y retrouve des influences occidentales habilement couplées à l’héritage de son pays d’origine. Un genre de folk psychédélique du Bosphore subtilement mâtinées d’électronique. Pas étonnant lorsque l’on sait qu’Ali Güçlü Şimşek de Lalalar coproduit son dernier album en date.
Un peu plus loin, au Museum, les Bruxellois de Ão emprunteront une voie similaire, si ce n’est que la chanteuse du groupe, Brenda Corijn, s’appuie sur ses racines portugaises et chante d’ailleurs partiellement dans sa langue natale. Ici aussi, les courants se mixent même si la production solaire davantage soutenue par des beats rend peut-être l’ensemble un rien moins authentique mais tout autant addictif. Ils viennent de remplir deux fois l’AB Club et seront à l’affiche du Cactus Festival, du Boomtown et du M-idzomer cet été. Autant dire qu’il s’agit d’une des dernières fois que l’on pourra les voir dans un endroit aussi confidentiel que la Rotonde.
Mais cette Nuit-là sera également l’occasion de vibrer en toute inclusivité aux Halles de Schaerbeek lors de la soirée événement RainboWarriors x Radio Vacarme. On ne présente plus Rebeka Warrior, voix de Sexy Sushi, Kompromat et Mansfield TYA mais également fondatrice du label WARRIORECORDS dont la première compilation (« RainboWarriors Vol. 1 ») sortira précisément ce jour-là. Au programme et aux côtés de l’incomparable Rebeka, deux des artistes figurant sur ce disque aux accents électro dark wave, Cate Horti et Baby Volcano. Sans oublier les DJs de Radio Vacarme, webradio bruxelloise féministe et engagée.
Dans le même ordre d’idées, les fanatiques du dancefloor ne manqueront sous aucun prétexte la troisième Bota By Night le samedi 27 avril, la Nuit (au sens propre du terme, les horaires s’étalant de 22h à 5h du matin) où les sons électroniques les plus variés sont rois. La boule à facettes suspendue au plafond de la Rotonde s’affolera et tant l’Orangerie que le Museum s’activeront en mode discothèque aux ambiances et sonorités pouvant se révéler avant-gardistes ou expérimentales. On y appréciera notamment la création signée Shoko Igarashi, cette saxophoniste japonaise bruxelloise d’adoption qui publiera à l’automne son troisième album (« Tiger Sushi »). C’est donc en exclusivité mondiale qu’elle en présentera quelques extraits mis en images par Thomas van der Niet, performeur audiovisuel dont la caractéristique est de capturer l’instant en laissant son imagination prendre le relais. Une expérience immersive au sein de laquelle monde réel et virtuel ne forment plus qu’un.
Discrètes jusqu’ici, les guitares investiront le chapiteau le dimanche 28 pour une soirée plus post-punk que ça tu meurs. Les hilarants mais non moins appliqués Yard Act viendront y présenter « Where’s My Utopia? », leur très attendu deuxième album qui a le mérite de ne pas répéter la recette de l’acclamé « The Overload ». Déconcertant par moments, il part dans plusieurs directions maîtrisées que l’on est curieux de découvrir sur scène. Tout comme la fraîcheur des Londoniens de Folly Group dont les compositions bourrées de tension et de percussions n’omettent pas le groove et les mélodies.
C’est également ce jour-là que le premier dilemme se manifestera car l’Orangerie verra le retour aux affaires courantes de Taylor Kirk aka Timber Timbre. L’excellent « Lovage », publié l’an dernier, constitue en effet son premier fait d’armes depuis 2017 et ce n’est pas sa prestation en demi-teinte au Sonic City dans la foulée qui refroidira nos ardeurs ni notre affection envers le natif de Toronto. D’autant que deux supports de choix l’accompagneront. River Into Lake, le projet de Boris Gronemberger, célèbrera la sortie de « Rise & Shine », son très recommandable deuxième album alors que Scarlett O’Hanna fera de même pour « Precious Nothings », qui n’aura que quarante-huit heures au compteur lorsqu’elle grimpera sur scène.
Ajoutez-y une autre release, celle du premier album solo d’Antoine Flipo, moitié de Glass Museum au… Museum et vous comprendrez combien notre choix sera cornélien. Entre classique et électronique, le pianiste devrait envoûter un endroit qu’il connaît particulièrement bien. Et emmener les Nuits vers un premier break bien mérité car le lundi 29 avril, c’est congé pour tout le monde…
À suivre…
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