À la découverte de Great Men With No Fear
Débarqué voici deux ans en provenance de son Bordelais natal, Frédéric Laval orchestre désormais ses aventures musicales depuis la capitale. Il y a ainsi enregistré « Old Loved Ones », le premier album de Great Men With No Fear et entend bien ne pas s’arrêter en si bon chemin. Rencontre…
Frédéric Laval entame sa formation musicale en prenant des cours de guitare avant de monter un groupe avec des amis du Lycée. Multi-instrumentiste dans l’âme, il y joue de la basse et assure la seconde voix jusqu’à ce que les directions de chacun se séparent au moment d’entamer les études supérieures. Qu’à cela ne tienne, l’expérience accumulée le conforte à poursuivre l’aventure en solitaire. Il reprend alors sérieusement la guitare et commence à composer des morceaux qui lui correspondent mieux.
Il s’agit là des balbutiements de Great Men With No Fear, un pseudo adopté vers 2014. « Je cherchais un nom qui pouvait bien me correspondre, dans lequel je pouvais m’identifier et derrière lequel je pouvais me cacher. Je trouvais que le nom à rallonge s’y prêtait plutôt bien. Il permet à chacun d’interpréter librement ce qu’il voit, ce qu’il entend ». Un pseudo pas nécessairement simple à retenir, certes, mais qui a l’avantage de l’exclusivité au niveau des moteurs de recherche sur internet.
Il y a deux ans, sa compagne trouve du boulot à Bruxelles. Il ne le sait pas encore, mais cet événement va marquer le début de la professionnalisation de son projet. Il s’installe donc dans la capitale de l’Europe et profite de l’occasion pour se consacrer corps et âme la musique. « C’est le point-repère, le moment où cela a changé pour moi. J’en ai vraiment profité pour prendre un peu de recul, de distance, de perspective par rapport à pas mal de choses et, finalement, pour me lancer dans l’écriture de l’album ».
L’année 2019 est ainsi en grande partie consacrée à la conception de A à Z d’« Old Loved Ones ». « De A à Y, on va dire. Le mastering a été réalisé en une journée (par Alexis Berdinet à Bordeaux), ce qui est très court par rapport aux six à huit mois de travail préalable mais qui permet au projet de sonner plus cohérent, de donner le mieux possible sur tous les supports ». En produisant et mixant cet album lui-même seul à la maison, Frédéric développe par la même occasion ses compétences techniques en la matière.
Au rayon des influences, notre premier coup d’oreille nous avait emmené du côté de Beirut sans les cuivres et de Midlake. Mais c’était sans prendre en compte les subtiles pointes électroniques qui jalonnent la plaque. « J’ai beaucoup écouté Sufjan Stevens, Bon Iver, Keaton Henson« , nous confie-t-il. Avant de poursuivre : « Pour « Poems From Beirut », j’avoue m’être inspiré d’une musique du dernier album de Bon Iver. Les arrangements, les petites sonorités un peu surprenantes de ses dernières productions m’ont influencé. Du coup, je dirais entre Bon Iver et Sufjan Stevens ».
Il s’est également offert une collaboration avec une artiste américaine, Heather Hammers, avec qui il partage les vocaux sur « Between The Relief And The Pain ». « Je la suis depuis un petit moment sur YouTube. Je l’avais découverte avec une reprise de MGMT (« Time To Pretend ») et j’avais adoré sa version, sa voix aussi. Pour ce titre, je me suis dit que cela pourrait être pas mal de partager le couplet avec une voix féminine, pour bien contraster. J’ai pensé à elle et elle m’a répondu très rapidement qu’elle était OK et qu’elle attendait que je lui envoie la musique pour poser sa voix ». Les deux artistes ne se sont donc pas rencontrés (elle habite du côté de Chicago) mais l’audace de Frédéric a payé puisqu’il s’agit là d’un des meilleurs moments de l’album.
Un album dont le visuel vaut également le détour, entre silhouettes, ombres et photos floutées. La pochette met en scène un personnage se protégeant le visage, comme s’il voulait passer inaperçu. Une manière de renvoyer vers l’anonymat relié au nom du projet, de laisser parler la musique. Il confirme : « Cet album est inscrit dans une phase où je me mets en retrait. Je n’avais pas du tout ce besoin de me mettre en avant. Je me suis vraiment concentré sur la musique, sur le process plutôt que sur la com’ ». Les photos ont été prises à New York par Louis Laval, son frère, qui a réalisé une série sur des passants dans les rues de Big Apple. Au départ absolument pas prévue pour le projet, elle en devient une pierre angulaire. « Il y a un vrai jeu quand on plie les couvertures, un petit côté ludique lorsque les silhouettes se rencontrent. Cela raconte déjà une histoire qui peut faire écho aux compositions que l’on découvre dans un second temps ».
Après être resté isolé pour la conception du disque dans son ensemble, Frédéric est sorti de chez lui pour le partager. Bad timing. Nous sommes début 2020 et, bientôt, le confinement pointera le bout de son nez, ne lui laissant qu’une poignée de concerts pour défendre son projet sur scène avant d’être contraint le mettre en pause. « Old Loved Ones » n’a donc pas reçu la promotion espérée via le circuit traditionnel. Mais son concepteur n’a pas baissé les bras pour autant.
Le printemps s’annonce en effet sous les meilleurs auspices pour Great Men With No Fear avec la sortie prochaine d’une vidéo illustrant le précité « Between The Relief And The Pain ». Dans les tablettes se trouve aussi un EP rassemblant les nouveaux titres composés durant le second confinement. Des titres sur lesquels il semble se dévoiler davantage, tant dans les textes que sur le chant. Cerise sur le gâteau, il envisage la suite de ses aventures scéniques autrement qu’en solitaire. Il a ainsi pris contact avec des musiciens en vue de former un backing band. Il s’agira d’un pas supplémentaire vers l’émancipation d’un projet qui ne demande qu’à mûrir. Bien vite la réouverture des salles de concert…