ArticlesConcerts

Power to Maruja

Treize mois séparent le passage de Maruja dans un Witloof Bar copieusement garni à celui d’une Orangerie ultra sold out. Une hype s’est en effet emparée des Mancuniens depuis la sortie de « Pain To Power » à la rentrée. La bonne nouvelle, c’est qu’elle est initiée par une jeune génération largement représentée dans les couloirs du Botanique ce mercredi soir.

Dans le même laps de temps, Beasts, le projet d’Antoine Romeo post-run SOFA, est passé d’un statut embryonnaire à celui d’entité active et rôdée. « The Shearing », premier album disponible exclusivement en cassette ultra limitée lors du support de O. un étage plus bas l’an dernier, a désormais été pressé en vinyle. Quant au line-up, il s’est affiné en accueillant un nouveau batteur qui a connu son baptême du feu dans l’antre du Magasin 4 au printemps, juste avant Peter Kernel. En revanche, toujours aucune trace du groupe sur les réseaux sociaux ni les plateformes de streaming, une décision délibérée et mûrement réfléchie.

Boosté par une récente tournée de huit dates en Angleterre, le trio se produit désormais devant une immense banderole mentionnant sobrement et en lettres capitales YOU LISTEN TO BEASTS. Autant avertir les spectateurs qui seront pris à la gorge dès la plage titulaire du disque balancée sans ménagement, portée par une basse claquante omniprésente. Plus posé que par le passé, en tout cas jusqu’à ce qu’il se jette littéralement dans le public lors du deuxième morceau, l’ami Antoine n’en demeure pas moins rageur dans l’âme. Environnement oppressant, effets sonores flippants et rythmique carrée assurant un maximum de tension bestiale. Cela hurle peut-être moins mais avec davantage de conviction.

Malgré une présence sur le circuit depuis une dizaine d’années, la trajectoire exponentielle de Maruja ne s’est amorcée que plus ou moins récemment. Pour être précis, depuis la stabilisation du line-up actuel et la sortie de deux EPs chaleureusement accueillis par la critique, « Knocknarea » en 2023 et « Connla’s Well » l’année suivante. Les choses se précipiteront grâce à un deal avec le label Music For Nations sur lequel est paru le premier album du groupe, « Pain To Power », en septembre dernier.

Un album truffé de titres méticuleusement travaillés mais aussi d’hymnes imparables, à l’instar de « Bloodsports » qui entamera les débats de manière musclée, le public reprenant en chœur sa phrase-clé « I’m an addict addicted to my bad habits ». Et cet engouement constitue peut-être bien l’aspect le plus impressionnant de la soirée. Les compositions du groupe ne comptant pas parmi les plus accessibles mais l’audacieuse approche jazz-punk teintée de hip-hop semble avoir touché dans le mille un public prêt à exploser.

Hoodie bien en place, Harry Wilkinson se démène tant et plus, déblatérant ses textes comme si sa vie en dépendait, l’obscurité ambiante accentuant un sentiment malaisant. Il se retrouvera toutefois bien vite torse nu et attrapera une guitare pour la suite de l’histoire, même s’il en jouera de façon plutôt rudimentaire. À sa gauche, l’hyperactif saxophoniste Joe Carroll, chauffeur de salle à ses heures, se profile comme l’élément essentiel de l’ensemble. De l’autre côté de la scène, l’expérimentée section rythmique composée du batteur Jacob Hayes et du bassiste Matt Buonaccorsi les soutiennent élégamment.

Groovy à l’image de « Trenches », les extraits de « Pain To Power » se révèlent également furieux, comme ce « Break The Tension » bourré d’urgence. Mais aussi complexes et sinueux, à l’instar de « Born To Die » entamé en poème mélancolique pour se terminer dix minutes plus tard en extrême furie atténuée entre-temps par d’envoûtantes nappes de sax. Ou ce « Look Down On Us » en fin de set, partagé entre rébellion sociale et environnement sinistre.

On déplorera toutefois ces interludes interminables, notamment celui en prélude de l’explosif « Thunder », qui cassent la dynamique plutôt que de la booster en mode anticipation. S’ils font partie du trip ou de la mise en scène, ils ont tendance à perdre l’auditeur dans ses pensées. Même s’ils se révèlent par moments essentiels, le final du particulièrement prenant « Saoirse » en étant un exemple parfait. On aurait donc préféré les voir jouer vingt minutes de moins en allant droit à l’essentiel, un avis pas nécessairement partagé par une assemblé envoûtée.

On retiendra encore un hanté « The Invisible Man » en crescendo caractérisé par son slogan « The truth, it hides » et un « Resisting Resistance » plus vindicatif que ça tu meurs, preuve de l’engagement multiple d’un groupe parvenu un peu plus tôt à mobiliser l’assemblée en lui demandant de lever le poing vers le ciel pendant de longs instants.

SET-LIST
BLOODSPORT
TRENCHES
BREAK THE TENSION
ZEITGEIST
THUNDER
BORN TO DIE
SAOIRSE
THE INVISIBLE MAN
LOOK DOWN ON US
RESISTING RESISTANCE

Organisation : Botanique

Laisser un commentaire

Music In Belgium