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Nuits du Bota 2021: It It Anita, the art of noise

Les Nuits du Bota édition 2021 n’ont pas été avares en prestations alliant guitares crasseuses et énergie débordante à l’Orangerie. Le triptyque infernal composé de It It Anita, Milk TV et Brorlab s’apprêtait d’ailleurs à poursuivre dans la même veine que les soirées consacrées aux labels Born Bad et Humpty Dumpty plus tôt dans le mois.

Ceci dit, pour avoir une chance de voir Brorlab, il valait mieux ne pas traîner au bar. En effet, comme le laisse entendre leur bio, « They play short songs and short concerts ». Et avec onze titres en quatorze minutes, le trio Anversois a clairement fait honneur à sa réputation. D’autant que l’intro menaçante en mangera deux d’emblée…

Une intro pendant laquelle la spitante Sam De Clercq restera de glace avant d’instantanément se transformer en pantin désarticulé dès les premières mesures de « Pee Is The Solution ». Un titre déjanté à son image, même si le guitariste et le bassiste qui l’entourent ont plutôt tendance à se la jouer pince-sans-rire. Elle, en revanche, ne tient pas en place. Tant sa voix entre cris stridents et hurlements sentis que son attitude caractérisée notamment par un regard tantôt angélique tantôt maléfique captent l’attention.

On pense évidemment à Cocaïne Piss mais contrairement à ces derniers, tout se passe sur scène et la batterie live est remplacée par des beats industriels glaciaux. Une expérience brève et intense parsemée de flashes stroboscopiques aveuglants qui décuplent le ressenti de compositions fougueuses (« Energy > Allergy », « Football Is For Soccers ») dont les textes ne font pas nécessairement l’objet d’une réunion au sommet (« Any Way The Wind Blows », par exemple, répète simplement ces cinq mots à l’infini). C’est ce qu’on appelle une tornade…

Les Bruxellois de Milk TV arpentent les scènes du circuit indépendant de la capitale depuis quelques années. Notre première expérience en leur compagnie (et quelle expérience…) remonte d’ailleurs à un soir d’avril 2018 en support de Wooden Indian Burial Ground à l’Atelier Rue Verte de Schaerbeek. Mais les premières parties de Keep Razors Sharp à La Machine ou de Sheik Anorak chez Super Fourchette les années suivantes avaient également tenu toutes leurs promesses.

Leur premier album, « Good Food For Mean Kid », est sorti voici quasi un an chez Exag’ Records. Un album, avouons-le, en-deçà de nos attentes, privilégiant une production trop léchée au détriment de l’aspect brut auquel ils nous avaient habitués sur scène. On avait dès lors hâte de vérifier s’il s’agissait d’un simple accident de parcours ou si les confinements répétés leur avaient été fatals.

Il ne faudra pas plus de soixante secondes pour définitivement nous rassurer. « One Leg Performer », à l’instar des autres extraits de la plaque joués ce soir (« Robots » et « Dürüm » en tête), sont clairement calibrés pour le live. En effet, l’intensité, l’aspect noisy saccadé et la construction déstructurée des compositions du trio font mouche. Au passage, précisons qu’au sein de celui-ci, on retrouve désormais Casper De Geus, le guitariste de Brorlab, qui entamait donc son second set de la soirée.

Positionné à l’extrême droite de la scène, le leader bassiste Matthieu Peyraud (aperçu également chez Phoenician Drive) maîtrise son sujet, casquette vissée sur le crâne et cool attitude en plein. N’empêche, sa voix sait se montrer rugueuse et énervée lorsque les circonstances le réclament (« Stupid Ulcer » et surtout l’extrême « Get Out »). Mention également au batteur dont les effets cowbell du meilleur effet participent grandement à l’explosion sonore d’un set qui se clôturera sur un sinueux et flippant « Paris » bourré de larsens. Réconciliation actée.

En publiant « Sauvé » au printemps dernier, les Liégeois de It It Anita ont repris la quête du graal noise là où ils l’avaient laissée sur le très réussi « Laurent ». Mais avec trois ans d’expérience en plus, une détermination intacte et un nouveau producteur en la personne d’Amaury Sauvé (d’où le titre de la plaque). Résultat, un album impeccable qui tourne en boucle depuis sa sortie et qui n’est pas loin d’être le meilleur de la discographie du groupe à ce jour.

Il va dès lors constituer la majeure partie de la set-list même si c’est un puissant « User Guide » qui mettra d’emblée le feu aux poudres avant un démentiel « Cucaracha » et un « See Through » bourré de tension. Ou comment prendre le public à la gorge d’entrée de jeu. Paradoxalement, celui-ci restera anormalement calme, ne se lançant dans des pogos qu’à de (trop) rares occasions. Pourtant, le groupe ne ménage pas ses efforts, le batteur Bryan Hayart en tête (oui, c’est lui aussi qui jouait la semaine dernière derrière les fûts de Girls In Hawaii, de manière nettement plus retenue…). Un groupe qui joue dans un mouchoir de poche, amplifiant davantage la sensation de puissance.

Damien Aresta (le boss barbu de Luik Records) et Michaël Goffard (le boss barbu tout court) se partagent les vocaux. Encore que l’on parle plutôt ici de rugissements impressionnants. Ajoutez-y des guitares saturées et des titres comme 25 (From Floor To Ceiling), « Ghost » ou « Sermonizer » deviennent tout bonnement des tueries sans nom sur scène. De temps à autre, une fausse accalmie survient (« Authority », « 53 ») mais ce n’est que pour repartir de plus belle par la suite.

Sans surprise, la star de la soirée sera de nouveau l’ami Bryan qui, dégoulinant de sueur après avoir cogné comme un dingue pendant tout le set, trouvera encore la force de démonter son kit et de terminer le boulot au milieu du public. Rageur comme jamais, il schématisera à lui seul l’aura d’un groupe clairement au sommet de son art. Luik is noise.

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