Nom de dEUS !
Un nouvel album de dEUS s’apparente toujours à un événement, surtout s’il arrive près de onze ans après le précédent. La preuve, les deux dates annoncées à l’AB pour la présentation de « How To Replace It » se sont instantanément retrouvées sold out, encourageant le groupe à doubler la mise. C’est à la quatrième et dernière que l’on était conviés.
Lors de l’impressionnante séries de huit concerts à guichets fermés dans cette même salle en marge du vingtième anniversaire de The Ideal Crash en 2019, Tom Barman and co avaient choisi une première partie différente chaque soir. Cette fois, ils ont fait confiance à un seul et même groupe, les Anversois de Meltheads. Les auditeurs de Studio Brussel connaissent désormais par coeur « Naïef », imparable single punk-pop chanté en néerlandais qui s’est retrouvé tout en haut du Afrekening à l’automne dernier et qui fait déjà office de morceau signature.
Première surprise, ils montent sur scène sur l’instrumental du « Daar Gaat Ze » de Clouseau, sorte de calme avant la tempête vu l’énergie débordante qui se dégagera lors de la demi-heure suivante. Emmené par l’hyperactif Sietse Willems qui arpente la scène sans cesse lorsqu’il ne s’encombre pas d’une guitare, le groupe va droit au but grâce à des uppercuts bref, francs et directs à l’image des Chats par exemple. On regrettera peut-être les longs moments de silence entre certains titres qui, à l’exception de leur précité hit introduit par une partie a capella, sont tous chantés dans la langue de Shakespeare.
Onze années auront donc été nécessaires aux membres de dEUS pour donner un successeur à « Following Sea ». Onze années pendant lesquelles ils ne sont toutefois pas restés inactifs. Tom Barman a ainsi lancé l’aventure TaxiWars avant de boucler celle de Magnus alors que Mauro Pawlowski a notamment entamé une carrière solo. Mauro qui avait d’ailleurs quitté dEUS en 2016, remplacé par Bruno De Groote. Ce dernier n’a toutefois jamais vraiment trouvé sa place au sein du groupe et a surtout affronté de sérieux soucis de santé. Résultat, Mauro, dans un premier temps rappelé à la rescousse, a finalement réintégré dEUS full time, pour le plus grand bonheur de bon nombre de fans.
20h30 tapantes et les percussions tribales de « How To Replace It » signées Stephane Misseghers entament les festivités. Marquée par une structure en crescendo et des voix collégiales, la plage titulaire de ce nouvel album se révèle d’une intensité insoupçonnée sur scène. Détail cocasse, c’est le bassiste Alan Gevaert qui se trouve derrière les fûts avant de reprendre son instrument fétiche et sa place habituelle à l’extrême droite de la scène au moment d’entamer « Man Of The House », autre nouveau titre à l’environnement subtilement brouillon.
Tom Barman, fit and well comme jamais, arbore un t-shirt du Mark Lanegan Band et il est vrai que sa voix caverneuse renvoie de temps à autre vers celle du regretté Dark Mark. Dommage qu’il prenne un malin plaisir à la trafiquer car certains effets se révèlent superflus, d’autant qu’il ne les désactive pas lorsqu’il s’adresse au public, souvent de manière très enthousiaste. « Constant Now », dans la foulée, lui permet de présenter ses musiciens et, à l’applaudimètre, c’est sans surprise Mauro qui se taille la part du lion, avant un « Girls Keep Drinking » délicieusement bordélique.
Le groupe joue devant une immense rampe de spots disposée de façon diagonale, ce qui permet à l’ingé lumière d’envoyer des effets particulièrement efficaces à la figure de spectateurs bien en verve. Ceux-ci exploseront une première fois lors d’un puissant « The Architect » qui nous avait manqué lors de leur récente visite à l’Eden de Charleroi. Il s’agira du seul extrait de « Vantage Point » joué ce soir. Plus surprenant, « W.C.S. (First Draft) », expérimental et sinueux à souhait, sera quant à lui le seul de « Worst Case Scenario ». Exit donc « Suds & Solda » qui avait pourtant l’habitude de clôturer les sets de dEUS.
Avec huit albums au compteur, il faut effectivement faire des choix. Après avoir revisité son passé pendant presqu’une décennie, le groupe regarde désormais vers l’avenir. Pas moins de neuf nouvelles compositions émailleront ainsi la set-list, soit les trois-quarts de « How To Replace It ». Parmi celles-ci, on retiendra tout particulièrement le piano mélancolique de « Dream Is A Giver », les nappes synthétiques de « Faux Bamboo » et la richesse groovante de « Simple Pleasures ». Sans oublier ce magnifique « Love Breaks Down » au piano à donner des frissons.
S’agissant pourtant d’une pierre angulaire dans le son de dEUS, le violon n’est quasiment pas utilisé sur les nouveaux titres. En effet, seul un « Pirates » bien enlevé en bénéficie sur scène et Klaas Janzoons se concentre dès lors davantage sur ses claviers. En revanche, vêtu de son pantalon vert flashy (un clin d’œil au St Patrick’s Day ?), il s’en donne à cœur joie sur des titres comme la tuerie que reste « Instant Street » ou l’hyper prenant « Sun Ra » en clôture du set principal. Entre-temps, le toujours aussi dingue « Fell Off The Floor, Man » et ses lumineux détours noisy augmenteront la température d’un cran alors que cette excellente version aussi hypnotique que flippante de « Quatre Mains » mettra tout le monde d’accord.
Le groupe reviendra pour un généreux rappel entamé par un autre de ses classiques, « Roses », dans la pénombre avant d’exploser littéralement. Un statut que ne devrait pas tarder à atteindre l’impeccable « 1989 », actuel single et pur bonheur auditif. Langoureux à souhait, il bénéficiera de la présence de Lies Lorquet qui viendra déclamer ses parties aux côtés de l’ami Tom. Le tout se clôturera sur un parfait « Nothing Really Ends » judicieusement enchaîné à un « Bad Timing » plus essentiel que jamais. Revoici la machine dEUS boostée pour de nouvelles aventures…
SET-LIST
HOW TO REPLACE IT
MAN OF THE HOUSE
CONSTANT NOW
GIRLS KEEP DRINKING
MUST HAVE BEEN NEW
THE ARCHITECT
W.C.S. (FIRST DRAFT)
DREAM IS A GIVER
LOVE BREAKS DOWN
PIRATES
FAUX BAMBOO
INSTANT STREET
FELL OFF THE FLOOR, MAN
SIMPLE PLEASURES
QUATRE MAINS
SUN RA
ROSES
1989
NOTHING REALLY ENDS
BAD TIMING