Les Nuits Weekender 2024 (Jour 1)
Ce week-end a eu lieu la première édition des Nuits Weekender, le versant indoor et automnal des Nuits du Botanique. Trois jours durant, cinquante-quatre groupes et artistes ont défilé sur les scènes de l’Orangerie, du Museum et de la Rotonde en prônant l’ADN du Bota, quelque part entre éclectisme, curiosité et diversité. Mais pas que…
Le complexe avait en effet mis les petits plats dans les grands en aménageant sa terrasse (oui, oui, elle a servi plus qu’on ne le pense), un bar à cocktails extérieur (un petit peu moins) et mis en valeur son exposition permanente “De Fil et de Nature” dans les serres. Sans oublier un catering simple mais de qualité et un bar achalandé. Lorsque les festivités débutent à 12h50 pour se clôturer sur le coup de minuit, mieux vaut être paré.
D’un point de vue musical, la première surprise du festival est venue (sans jeu de mot) d’échec, duo bruxellois porté vers le grunge et adepte de compositions déstructurées aux arrangements limpides mais bruts (on pense de temps à autre aux Lemonheads). La voix du guitariste Vic Outters alterne ainsi rugosité et délicatesse qu’épouse intelligemment la rythmique du batteur Chris Gennen. Ajoutez-y une pointe d’humour (leur premier EP s’appelle “épée”), des textes multilingues et on tient là un groupe au potentiel certain.
Au récent festival Left Of The Dial de Rotterdam, le guitariste du duo canadien New Age Doom a vivement encouragé les spectateurs à porter des protections auditives avant de balancer la sauce. Aucun avertissement cet après-midi mais cela n’a bien évidemment pas empêché la puissance sonore d’abasourdir la Rotonde. Une demi-surprise après avoir vu le batteur violemment tester une à une ses baguettes contre le sol avant le début du concert. Un batteur démonstratif qui cogne à tout-va et passe pas mal de temps autour de son kit. Entre drone, stoner et metal instrumental, les deux gaillards s’octroient même une parenthèse dub via un sample de Lee “Scratch” Perry, issu d’une collaboration enregistrée peu avant sa disparition. Aussi assourdissant qu’ahurissant…
Peu pressés de quitter la scène, ils auront l’occasion d’y revenir à la fin du set de Diana Burkot de Pussy Riot. Rappelez-vous, il s’agit du collectif féministe russe qui avait défrayé la chronique à l’époque en occupant la cathédrale du Christ-Sauveur à Moscou pour une “Punk Prayer” en opposition à Vladimir Poutine. Si douze ans plus tard rien n’a fondamentalement changé au Kremlin, l’esprit rebelle de Diana est quant à lui devenu plus subtil. Au travers de son projet Sweat And Blood (en cours de développement), elle rend hommage à des héros anonymes restés au pays et répondant aux noms de Andrey, Egor ou Milla. Le tout devant des projections plutôt sinistres en total contraste avec son déguisement mi-infirmière mi-Ronald McDonald. Quant à ses compositions, elles s’inspirent autant de Fever Ray que de Björk et, seule sur scène, opte pour la théâtralité… jusqu’à ce que New Age Doom entre dans l’équation. Et là, son esprit punk revient comme par enchantement…
Ceux qui ne connaissaient pas Geordie Greep au moment de rentrer dans l’Orangerie ont bien vite reconnu un timbre de voix familier. Le bonhomme était en effet le chanteur de Black Midi qui avait donné un fantastique concert dédoublé ici-même au moment du Covid. Le groupe désormais en hiatus, son élégant leader a publié début octobre “The New Sound”, un premier album solo partiellement enregistré au Brésil avec des musiciens locaux qui, de prime abord, ne révolutionne pas son approche. Des passages jazzy complexes couplés à une fibre math-rock alambiquée et des parties expérimentales affluent toujours abondamment. Mais sur scène, l’esprit big band prend le dessus (on retrouve même un contrebassiste à ses côtés) et des arrangements sophistiqués à la Steely Dan ou des rythmes de bossa nova enrichissent un univers nécessitant une certaine ouverture d’esprit. Une exigence à laquelle les amateurs de Black Midi étaient déjà habitués.
L’ultime étape de cette première journée nous conduira au Museum pour le set de Wu-Lu, le projet emmené par Miles Romans-Hopcraft. Pour l’anecdote, il s’agit du frère jumeau de Ben (Childhood, Warmduscher, Insecure Man et plus récemment Miss Tiny aux côtés de Dan Carey). Un talent familial certain qui l’a notamment vu enregistrer “Loggerhead” pour le label Warp, un des albums remarqués de l’année 2022. Son actualité récente réside dans la publication d’un EP, “Learning To Swim On Empty”, caractérisé par des ambiances plombées qui hanteront à merveille l’ancien musée. Le flow du chanteur, très hip-hop au demeurant, se voit magistralement soutenu par une batterie sinistre et une basse oppressante. L’ami Miles se charge également des parties de guitare incendiaires, complétant ainsi un univers prenant à souhait mais aussi terriblement vindicatif.
À suivre…
Organisation : Botanique