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Les Nuits 2023: The Haunted Youth dans le brouillard

L’une des affiches les plus attendues de ces Nuits réunissait sous le chapiteau The Haunted Youth, Ada Oda et Soror. Trois groupes que l’on suit depuis leurs balbutiements et dont l’évolution tonitruante ne nous surprend guère.

Un début de concert à 19h, même en période de vacances scolaires francophones, reste un timing compliqué à combiner avec une activité professionnelle. Mais l’endroit s’est malgré tout progressivement rempli plus que dignement tout au long du set de Soror. Les Bruxellois emmenés par la voix gravelo-suave d’Alice Ably et la basse métrono-groovante de Sophie Chiaramonte sont sur le point de donner une suite à leur excellent EP de 2020 dont ils balanceront trois titres envoûtants d’entrée de jeu. Parmi ceux-ci, “Humdrum Route” et “Sister” n’ont clairement rien perdu de leur intensité.

La curiosité de ce soir résidait toutefois dans la découverte de nouveaux titres qui figureront sur le premier album du groupe, prévu à la rentrée. Sa plage titulaire, l’hypnotique et langoureux “New Born”, verra la chanteuse complètement emportée par la composition. Elle contribuera ensuite activement aux percussions caractérisant le travaillé “Bleeding”, aux côtés de parties de guitare bien senties. Si le grungy et déjà familier “Copy Of You” hausse le ton, “Bohemian Paradise” tempère les ardeurs via un son plus retenu et menaçant aux influences à puiser chez Portishead, dans la lignée de “Wash Your Hands”. Quant à “Shadow Of A Doubt”, le titre le plus ancien du lot, ses écarts orientaux sur fond noisy se profilent comme la conclusion parfaite d’un set plein. Rendez-vous à la Rotonde le 21 septembre pour la release-party d’un disque très attendu.

Notre premier rendez-vous avec Ada Oda date de novembre 2021, chez Super Fourchette, en première partie de Frankie. Le lendemain, ils se produisaient au KulturA en support de The Cool Greenhouse, devant le paternel de la chanteuse Victoria Barracato himself. À ce propos, on ne s’attardera pas sur sa généalogie ni sur la rencontre improbable à l’origine du projet vu que les magazines people font ça beaucoup mieux que nous. Concentrons-nous plutôt sur ce mélange détonnant alliant post-punk et variété italienne qui ont élevé “Un Amore Debole” au rang d’un des meilleurs albums belges publiés l’an dernier.

La multiplication des dates leur a permis de peaufiner leurs compositions, devenues entre-temps de véritables bombes sur scène. Impossible en effet de rester de marbre sur “Niente Da Offrire” ou “Non So Che Cosa Ne Sará Di Me” et sa basse disco. Ceci dit, ce soir, tout au long de “Scanta Di Te”, titre d’intro du set, la chanteuse restera inexplicablement en retrait. Ce n’était que pour mieux se défouler par la suite car elle se retrouvera dans le public pendant la moitié de “Mi Guarda” avant d’inlassablement virevolter sur scène. Elle a pris une assurance de dingue et assume son rôle de leader à la perfection aux côtés du guitariste aux lunettes orange et du bassiste, intenables eux aussi.

Finalement, les plus sages dans l’histoire sont le batteur Alexandre De Bueger (aperçu derrière les fûts chez Gros Cœur au Grand Salon la semaine dernière) et le guitariste César Laloux qui, lui, a participé au Goodbye Tour de BRNS trois jours auparavant. Ce dernier décoche des riffs imparables qui font clairement la différence. Le speedé “Si Fermerà” et l’imparable “Mai Mai Mai” aux influences eighties, enchaînés pour l’occasion, constituant un des sommets du set. Ce sera loin d’être le seul, tant le bordel maîtrisé sur scène transcende un groupe qui prend clairement son pied sans se prendre au sérieux. Dans le même ordre d’idées, pointons le sautillant “Niente Da Offrire” et le très DIIV au demeurant “Domani”, à deux doigts de provoquer un mouvement de foule. Quant à “Avevo Torto”, il alterne subtilement couplets hésitant entre concours Eurovision et festival de San Remo et refrains synonymes de déglingue. Le moment fun de la soirée.

En à peine deux ans, Joachim Liebens et son projet The Haunted Youth ont grimpé les échelons direction les sommets de l’indie-pop noire jaune rouge. Depuis leur victoire à De Nieuwe Lichting en 2021, ils ont enchaîné les hits et les premières parties prestigieuses (dEUS à Leuven cet été-là, notre premier contact avec eux) avant de remplir des salles de plus en plus grandes. C’est d’ailleurs dans une AB pleine à craquer qu’ils ont présenté “Dawn Of The Freak”, leur impeccable premier album, en novembre dernier.

Inutile de dire qu’ils étaient attendus de pied ferme par une cohorte de fans se pressant devant la scène au terme du set d’Ada Oda. C’est donc plus en retrait que l’on a assisté au show et, pas sûr qu’ils aient nettement mieux vu que nous. Fumigènes abondants et lights particulièrement sombres ne laissaient en effet que peu d’occasions d’apercevoir les musiciens en plein travail. Joachim arborait-il sa fameuse casquette visée sur son abondante chevelure peroxydée ? Quelle était la couleur de l’ensemble porté par la claviériste Hanne Smets ? Impossible à dire. En revanche, ils n’y sont pas allés par quatre chemins pour emballer d’emblée le chapiteau, alignant deux hits, le puissant “Broken” suivi du plus atmosphérique “I Feel Like Shit And I Wanna Die”.

La bonne nouvelle, c’est que l’on n’a pas assisté à un copié-collé du set de l’AB. Plusieurs nouveaux titres ont été dévoilés dont un “Into You” proche de l’univers glacial de The Cure. Un peu plus tard, un intense et mélancolique “Riptide” délibérément joué dans la pénombre précédera “Song Hanne”, un instrumental particulièrement prenant. Autre contre-pied, bienvenu celui-ci, ils ont troqué leurs covers d’Oasis par une nettement plus en adéquation avec leur environnement euphorique. Big up à l’excellent “Walking On A Dream” d’Empire Of The Sun dans une version n’ayant rien à envier à l’originale.

Pour le reste, le toujours aussi jouissif “Teen Rebel” et le planant “Gone” renvoient vers la période psyché-pop de Tame Impala, les guitares sinistres en plus. L’hyper efficace “Coming Home” mettra quant à lui un terme à la soirée, sans rappels et avec la ferme conviction d’avoir assisté à un show en roue libre auquel il a sans doute manqué un rien de passion.

SET-LIST
BROKEN
I FEEL LIKE SHIT AND I WANNA DIE
HOUSE ARREST
INTO YOU
TEEN REBEL
GONE
RIPTIDE
SONG HANNE
WALKING ON A DREAM
COMING HOME

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