Cloud Nothings, noise sinon rien
Pour leur cinquième album, Dylan Baldi et ses camarades de Cloud Nothings ont décidé de revenir à leurs racines rugueuses. La Rotonde du Botanique, parfaitement consentante, en a donc ramassé les effets de plein fouet.
Chez Music in Belgium, nous mettons un point d’honneur à jeter une oreille attentive aux premières parties. Si l’expérience s’avère quelquefois pénible, celle de ce soir s’est muée en véritable coup de cœur avec En Attendant Ana. Faisons abstraction du pseudo et concentrons-nous sur les compositions rafraîchissantes du quintette Parisien emmené par une spitante chanteuse à l’entêtante voix sucrée.
Entourée notamment d’un guitariste aux riffs précis et d’une trompettiste aux parties hypnotiques, elle apporte une touche indie (power) pop à tomber lorsqu’elle troque sa guitare contre un mini Korg. On pense ainsi à Belly, Elastica ou autres Sleeper qui nous faisaient tourner la tête au milieu des nineties, la spontanéité en plus. Il n’est pas trop tard pour se plonger dans « Lost And Found », leur impeccable premier album, avec une suite annoncée avant la fin de l’année sur le label Trouble In Mind.
Les Yankees de Cloud Nothings n’ont pas traîné pour donner une suite à « Life Without Sound » dont la production léchée signée John Goodmanson avait de quoi surprendre dans leur chef. Pour « Last Building Burning », ils ont confié les manettes à Randall Dunn, connu notamment pour ses expérimentations sonores extrêmes avec Sunn O))). En plaçant les guitares à la base d’un mur du son particulièrement armé, il a permis au groupe de renouer avec les gifles cinglantes grâce auxquelles ils ont gagné leurs galons sur l’échiquier noisy.
Particulièrement fiers de leur nouvelle livraison, ils vont commencer par en interpréter l’intégralité, dans l’ordre des plages et avec une énergie décuplée. « On An Edge » va ainsi indiquer la marche à suivre, pied au plancher, à peine adoucie par « Leave Him Now » (le titre le plus « accessible » du lot avec « Offer An End ») boosté par un déluge stroboscopique. Mais « In Shame » et « The Echo Of The World » dans des versions brutes à outrance assourdiront encore davantage l’endroit.
On l’a compris, les natifs de Cleveland n’avaient pas prévu de jouer dans la demi-mesure. Positionné à l’extrême droite de la scène, le leader Dylan Baldi, casquette vissée sur le crâne, hurle à tout-va. Avec le batteur Jayson Gerycz (qui cogne littéralement sur un kit constitué d’à peine quatre éléments), il forme le noyau central d’un atome sur charbons ardents que complémentent un bassiste et un second guitariste également bien en verve.
Ce petit monde aura le loisir de partir dans ses délires tout au long (une dizaine de minutes tout de même) du bien-nommé « Dissolution », pièce centrale de l’album qui pose plus de questions qu’il ne donne de réponses. Ceci dit, l’à peine retenu « So Right So Clean » et le speedé « Another Way Of Life » achèveront de nous convaincre que ce retour aux sources était une judicieuse décision.
La suite de la prestation fera la part belle à leur riche back catalogue, de la rugosité sans concession de « Psychic Trauma » à la face grungy adoucie de « Modern Act » en passant par la noirceur de « Darkened Rings » et l’évidence du tubesque « Stay Useless ». Sans oublier les pogos d’un époustouflant « I’m Not Part Of Me ». Mais le sommet sera atteint lors du rappel avec le kilométrique « Wasted Ways » dont l’intro sinistre fera bientôt place à un break délicieusement sombre et un final aussi lourd qu’assourdissant. Dommage cette balance anormalement brouillonne…