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Anna B Savage and us

Pas loin de deux ans après y avoir joué lors des Nuits, Anna B Savage est repassée par le Botanique. La Dublinoise d’adoption s’est produite dans un Museum à la chaleur suffocante en support de « You & I Are Earth », son troisième album publié début d’année chez City Slang.

Quelques minutes avant le début des festivités, on a croisé Daudi Matsiko arborant fièrement un t-shirt de Ditz et procédant à quelques réglages dans l’optique de filmer sa prestation en mode DIY. On avait découvert le gaillard ici même à l’occasion de la première édition des Nuits Weekender voici six mois où il avait tiré son épingle du jeu. Contrairement à ce que son nom pourrait laisser paraître, nous ne sommes pas ici en présence d’un artiste conceptuel asiatique mais d’un singer-songwriter à la santé mentale fragile. Ce n’est pas pour rien qu’il a baptisé son premier album « King Of Misery ».

C’est toutefois au moyen de deux nouvelles compositions qu’il entamera son set assis sur une chaise au milieu de la scène, guitare acoustique entre les mains. Une désarmante cover du « Love Theme From Spartacus » de Terry Callier suivi d’un titre modérément plus enlevé mais tout aussi délicat. Entre les coups, il se confiera abondamment sur la dépression qui l’a longtemps miné avant de trouver les mots pour en parler sur le disque susmentionné. Fragile et introspectif, certes, mais avec une touche d’espoir et un enthousiasme intacts. Sauf peut-être sur « Hymn » pendant lequel il troque sa guitare contre une sorte de boîtier aux sons électroniques sinistres et lancinants.

Lorsqu’Anna B Savage a joué aux Nuits 2023 aux côtés de Kathryn Joseph et de Deathcrash, le Museum s’appelait encore le Grand Salon et son deuxième album, « inFLUX », était encore tout chaud. Depuis, elle a enregistré la suite en compagnie de John ‘Spud’ Murphy (Lankum, Black Midi, Caroline) qui donne à « You & I Are Earth » le moyen de ses ambitions. Une ode à son nouvel environnement même si, comme elle le mentionnera très justement au moment d’entamer « Mo Cheol Thù », sa délocalisation en Irlande date déjà d’il y a quatre ans.

Pour l’anecdote, seul le titre de ce morceau se lit dans un dialecte au moins aussi compliqué pour elle que le néerlandais (clin d’œil à l’expression qu’elle tente de retenir depuis son dernier passage ici-même… avec plus ou moins de réussite). Avant cela, et observant une certaine suite dans les idées, elle balaiera son début de carrière de manière chronologique via un « Corncrakes » de plus en plus speedé suivi d’un très Aldous Harding « Hungry » à la puissance retenue. Le point commun entre ces deux titres ? Une entame à la guitare signée la Londonienne d’origine avant que ses musiciens ne lui emboîtent le pas et contribuent à l’épanouissement de la composition.

Parmi ceux-ci, le plus impressionnant à observer sera la batteur. Non pas par sa puissance ou sa dextérité mais par la manière dont il fusionne avec un kit dont il connaît les moindres recoins, les moindres subtilités percussives. Tout ceci en utilisant sa collection de baguettes et d’ustensiles parfois inattendus, comme ce chapelet de bouchons en plastique coincé entre deux éléments ou même son portefeuille déposé sur un tom. Mais la manière dont il appréhende les morceaux avant même qu’ils ne débutent et la complicité réciproque avec la chanteuse en font un élément essentiel à la réussite du quatuor complété par un bassiste assez friand d’archets et d’une claviériste qui brillera souvent par son absence. À sa décharge, elle était visiblement malade et a tout de même tenu à entamer le concert avant de jeter les armes.

Au terme d’un solaire « I Reach You In My Sleep », Anna se retrouvera pieds nus, une manière de lutter contre la chaleur ambiante du Museum. Cela ne lui fera pas perdre son sens de l’humour, elle qui nous apprendra que lors de sa récente tournée anglaise, plusieurs spectateurs sont tombés dans les pommes. Hyper à l’aise lorsqu’il s’agit de communiquer sur scène, elle n’est d’ailleurs jamais avare d’une petite blagounette et ira même jusqu’à fièrement présenter sur scène les pièces vestimentaires disponibles au stand merchandising spécialement désignées par ses soins.

Musicalement parlant, ce sont de véritables gourmandises qu’elle délivre le plus naturellement du monde. Parmi celles-ci, pointons le groovant « Lighthouse », l’ensorcelant « Pavlov’s Dog » et « A Common Tern » aux sinueux détours jazzy. Cela dit, la plus prenante du lot sera sans conteste « Say My Name ». Entamée de manière tristounette, elle se développe ensuite dans un univers expérimental orageux avant de finalement gronder. Ou encore « InFLUX » qui la verra officier tel un électron libre sans guitare et tenter des postures de gymnaste sur le tapis au centre d’une scène à peine illuminée par une série d’abat-jours dépareillés. Après un « Donegal » qui verra le batteur s’exprimer magistralement une nouvelle fois, « The Orange » bouclera le set en mode fin de soirée, un peu comme si la tension devait impérativement retomber avant de rentrer chez soi.

SET-LIST
CORNCRAKES
HUNGRY
MO CHEOL THÚ
INCERTUS
I REACH FOR YOU IN MY SLEEP
LIGHTHOUSE
TALK TO ME
SAY MY NAME
PAVLOV’S DOG
INFLUX
A COMMON TERN
YOU AND I ARE EARTH
DONEGAL
THE ORANGE

Organisation : Botanique

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