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Anika, back from the Abyss

Au lendemain de la furia Viagra Boys, retour à l’AB mais au Club cette fois pour la date belge d’Anika. La Berlinoise d’adoption est venue y présenter « Abyss », un nouvel album plutôt vénère récemment publié chez Sacred Bones.

Comme on n’est jamais aussi bien servi que par son entourage, elle a demandé à son bassiste d’ouvrir sa tournée européenne. Tomás Nochteff aka Nochteff a donc pris la scène d’assaut, armé de son instrument fétiche (qui a l’air d’avoir bien vécu) et d’une boîte à rythmes. Artiste international par excellence, cet Argentin d’un âge mûr officie désormais depuis la capitale allemande après un séjour à Londres dans les années 2000. S’il chante majoritairement en espagnol, des influences orientales semblent s’immiscer dans les compositions lancinantes et franchement électroniques qui se retrouveront sur son prochain album. Des titres euphoriques au son eighties assumé, emballés par une basse dont il claque les cordes comme s’il s’agissait d’une guitare. Mais il sait également se montrer glacial et flippant sans perdre la moindre once de crédibilité…

L’histoire d’Anika (connue sous le nom d’Annika Henderson pour l’officier de l’état-civil) ne ressemble à aucune autre. Originaire du Surrey dans le sud-est de l’Angleterre, elle bourlingue d’abord du côté de Cardiff avant de débarquer à Berlin en tant que journaliste politique et correspondante de presse. Elle sort un premier album chez Invada en 2010, passe notamment par le Dour Festival et le Magasin 4 pour ensuite former Exploded View à Mexico City. La pandémie et d’autres circonstances l’encouragent à enregistrer « Change », un deuxième album qu’elle aurait dû venir présenter à la Rotonde du Botanique en février 2022, date qui tombera finalement à l’eau.

Douze ans après son dernier passage dans la capitale, la voici donc sur les planches de l’AB Club, prête à défendre « Abyss », troisième plaque que l’on n’attendait sans doute pas de sitôt. Mais la manière dont le monde évolue lui a donné suffisamment d’inspiration pour alimenter les dix titres sur lesquels elle évacue frustration, colère et exaspération. Cela dit, avant d’attaquer le plat principal, c’est « Lost Illusions », un titre d’Exploded View dans une version particulièrement austère, qui fera office d’amuse-bouche. Un apéro que le guitariste à la généreuse crinière aurait déjà pu accompagner des deux canettes de bière avec lesquelles il est monté sur scène s’il n’était pas déjà dans son monde.

Cheveux blonds courts, la chanteuse au caractéristique accent germanique se lancera ensuite dans la lecture chronologique d’« Abyss », débutant par un « Hearsay » caractérisé par une basse assourdissante, une guitare crissante et des flashes stroboscopiques nourris. Derrière elle, la chemise blanche de l’imposant batteur Martin Thulin (qui co-signe et co-produit la plaque), tranche avec les atmosphères sombres que l’entêtante plage titulaire et le grungy « Honey » mettent en avant. Du côté droit de la scène, l’ami Nochteff triture sa basse aussi vigoureusement qu’en début de soirée.

Cela dit, l’intensité des arrangements en live tranche avec l’attitude rigide d’une chanteuse dont le regard vise davantage le plafond que le public. Entre les morceaux, ses interventions, aussi engagées soient elles (liberté d’expression, droits des femmes…), se heurtent à une timidité qui en ôte quasi tous les effets. D’autant qu’elle se sent obligée de systématiquement placer quelques mots alors que parfois, laisser la musique s’exprimer apparaît comme une alternative efficace.

Ainsi, « Into The Fire » et sa basse sinistre n’ont besoin d’aucun artifice, pas plus que l’excellent « Oxygen », brumeux au départ et explosif à l’arrivée ni du vindicatif « Out Of The Shadows ». Notre préférence ira toutefois vers ce « One Way Ticket » (non, pas celui-là…), quelque part entre le Velvet Underground et les Stooges. Un crasseux « Last Song » et un sixties « Buttercups » boucleront ensuite le set principal sans doute un peu trop rapidement à notre goût.

D’autant que les rappels se limiteront quasi à leur plus simple expression via deux covers extraites du premier album. Le « Yang Yang » de Yoko Ono bourré de tension en full band suivi d’une bouleversante version du « I Go To Sleep » signé Ray Davies et popularisé par les Pretenders, Anika seule à la guitare lors d’un moment suspendu. Moins d’une heure et tout est déjà terminé. Ou comment laisser la frustration quasi changer de camp…

SET-LIST
LOST ILLUSIONS
HEARSAY
ABYSS
HONEY
WALK AWAY
INTO THE FIRE
OXYGEN
OUT OF THE SHADOWS
ONE WAY TICKET
LAST SONG
BUTTERCUPS

YANG YANG
I GO TO SLEEP

Organisation : AB

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