MANN, Aimee – The Forgotten Arm
D’abord membre de ’Til Tuesday, Aimee Mann a mis fin au groupe après trois albums pour manque de succès, après s’être servie de lui pour se faire connaître. Elvis Costello notamment a été séduit par sa voix. Elle a alors chanté en solo mais a eu des problèmes avec la firme Epic pendant cinq ans, de 1988 à 1993. Sa musique ressemble à celle de Lucinda Williams et elle est aussi indépendante de caractère qu’elle. Elle fait les choses à sa manière, point final.
Aimee Mann chante, joue de la guitare acoustique ou électrique et est accompagnée par Paul Bryan, guitare basse, choeurs, et par Jebin Bruni, claviers, sur tous les morceaux. Jay Bellerose joue de la batterie et s’occupe des percussions sur les morceaux 2, 4, 5 et 6, Victor Indrizzo fait la même chose sur les autres titres. Jeff Trott joue de la guitare électrique sur tous les morceaux sauf sur 4, où il est remplacé par Chris Bruce et Julian Coryell. L’album est produit par le chanteur / compositeur Joe Henry.
Cet album se présente comme un album concept divisé en douze chapitres et conte les heurts et malheurs de John et Caroline, un couple un peu paumé dont le type est un boxeur.
« Dear John » est une complainte qui présente le boxeur battu, bien que l’un des plus grands. Symbole d’une réussite possible pour la jeunesse défavorisée, il est leur héros et reste malgré tout populaire car les gamins s’identifient à lui. Sur le plan instrumental, c’est l’orgue qui mène le débat.
Julian Coryell joue de la guitare et Jeff Trott de la mandoline sur « King Of The Jailhouse », qui traite du partage des nuisances entre le roi de la prison et la reine de la rue pour mieux s’en sortir, puis de leur départ pour le Mexique, un endroit meilleur où, ils l’espèrent, la vie leur sourira. Elle ressent un malaise mais ne peut l’analyser suffisamment pour en prendre conscience et encore moins pour en connaître les causes. Vers la fin du morceau, on entend aussi le West End Horns, composé de Mark Visher, saxophone ténor, Jason Thor, trombone, et Willie Murillo, trompette et arrangements.
« Goodbye Caroline » parle de la séparation. Il s’en va vers un monde meilleur, bien qu’il la considère comme son meilleur « médecin » et la laisse seule avec ses propres problèmes. Sur le plan musical, il faut signaler un point de détail : Victor Indrizzo nous gratifie, en plus de la batterie et des percussions, du son des clochettes.
Chris Bruce et Julian Coryell jouent de la guitare sur « Going Through The Motions », où John trouve que Caroline agit machinalement et doit avoir quelque chose. Mais quoi ?
« I Can’t Get My Head Around It » parle du boxeur qui trouve le combat dur mais il est inquiet pour elle, car elle ne se conduit pas normalement, sans qu’il puisse en déceler les causes ni cesser d’y penser. Elle s’y entend pour lui cacher la cause de sa descente aux enfers.
Julian Coryell chante sur « She Really Wants You » où la guitare électrique donne le ton. A son tour, il est malheureux sans elle mais espère toujours qu’elle va revenir et courir vers lui et mettre ainsi fin à son tourment.
Jeff Trott joue de la mandoline sur « Video », une ballade qui parle de la vie en solitaire, de la dureté des combats et de la courte durée d’une carrière qui, certes, rapporte de l’argent mais laisse des séquelles irréversibles. Il est sans force et sans volonté, comme un zombie, et doit se battre dans ces conditions. Pour tenter de se motiver, il repasse en boucle les moments heureux, comme dans une vidéo.
Jeff Trott joue de la guitare baryton sur « Little Bombs », une histoire qui parle de la vie moderne qui vide les gens de leur substance et les laisse livrés à eux-mêmes, comme des épaves. Les percussions créent la tension qui permet de simuler l’état de délabrement de certaines personnes.
Le magnifique « That’s How I Knew This Story Would Break My Heart », chanté avec un feeling incroyable, voit Caroline prête à partir le rejoindre, une nouvelle fuite en avant qui ne mène à rien et ajoute d’autres problèmes. Elle est consciente que cette histoire lui brisera le cœur mais elle le fait par amour pour lui.
Je n’étais pas là pour t’aider quand tu en avais besoin et je ne peux plus t’aider. Je pourrais faire une liste de ce qui ne va pas mais je ne trouve pas de happy end. Tel est le thème de « I Can’t Help You Anymore », une très belle ballade. Julian Coryell joue de la slide, chante les chœurs et joue du piano à la fin.
Julian Coryell chante sur « I Was Thinking I Could Clean Up For Christmas ». Elle espère être débarrassée de son vice pour Noël mais, malgré ses efforts, les rechutes sont fréquentes. « Beautiful » sonne peut-être la fin des ennuis. Elle le voit très beau et ne pense qu’à une chose : le rendre heureux. C’est sur une très belle mélodie qu’elle nous transmet ce message d’espoir.
Cet album tout imprégné de mélancolie est en fait une métaphore mettant en lumière les problèmes d’alcoolisme ou de drogue et la difficulté pour une frange de la population de reconnaître leur « addiction ».
Cette impossibilité de mettre un nom sur les problèmes empêche aussi de se soigner. C’est seulement en en prenant conscience que l’on peut entamer une thérapie. Aimee Mann sait de quoi elle parle. Elle a elle-même connu des problèmes de drogue mais ne voulait pas reconnaître son état.
Mais cet album parle aussi de dépression et de désespoir. Elle n’a pas voulu limiter cette histoire à son cas mais l’a étendu à d’autres dérives. Bref, ce n’est pas joyeux, joyeux mais c’est dans l’air du temps. Sur le plan musical, c’est un folk rock assez soft, où la guitare tient une place importante.
Pays: US
SuperEgo Records / V2 VVR 1032352
Sortie: 2005/05/03