SMITH, Steve / LIEBMAN, Dave / ESEN, Aydin / JACKSON, Anthony – Flashpoint
Cet album permet de découvrir une nouvelle association, probablement éphémère, de musiciens réputés depuis belle lurette dans le monde du « Jazz » et du « Jazz-Rock », sous la houlette d’un spécialiste de ce genre de réunion, le batteur Steve Smith, qui s’avère également un efficace producteur.
Dans ce type d’entreprise, il faut bien avouer que Steve Smith a souvent eu le nez fin et sa prise de risque n’est jamais apparue trop grande de par son propre gabarit et celui de ses différents collègues invités. De plus, il a la sagesse de rarement s’acharner dans un rôle de compositeur et de laisser faire ses comparses, quand ils sont plus adroits que lui. Ce rôle est ici dévolu à Dave Liebman et Aydin Esen, l’ami Steve se contentant modestement d’un titre particulièrement court et anecdotique, … à l’exact opposé de sa prestation à la batterie tout au long de cet ouvrage.
Voici les participants avec une partie de leur impressionnant pedigree :
- Dave Liebman : Saxophones Soprano et Ténor & Flûte Indienne. Né en 1946 à New York, Dave Liebman est un vétéran de la scène « Jazz ». Il débute par le piano classique et, à douze ans, il passe au saxophone. Influencé par John Coltrane, il travaille de 1971 à 1973 avec son ancien batteur Elvin Jones, avant de suivre Miles Davis en 1973 et 1974. En 1970, il avait participé à l’album « My Goals Beyond » de Mahavishnu John McLaughlin. Après cela, on le retrouve régulièrement avec le gratin du « Jazz » en général, dont Chick Corea, John Scofield, Kip Hanrahan, Richard Beirach, Joe Lovano, … Il a enregistré également une collection impressionnante d’albums à son nom.
- Steve Smith : Batterie, Ghatam & Udu. Né en 1954, Steve Smith est passé par le « Berklee College of Boston ». Lorsqu’il intègre Journey en remplacement de Aynsley Dunbar, en 1978, il y imprime directement son empreinte par un toucher plus chaud, plus subtil, plus « Jazz ». Avant Journey, il avait déjà collaboré avec le violoniste Jean-Luc Ponty, le Focus de Thijs van Leer avec Philip Catherine, et le guitariste Ronnie Montrose. En 1985, il quitte provisoirement Journey et s’oriente alors vers une kyrielle d’autres projets plus proche du « Jazz » et de la Fusion avec, principalement, Vital Information (avec généralement, Tom Coster, Frank Gambale et Jeff Andrews) et de nombreuses prestigieuses associations (Larry Coryell/Tom Coster/Steve Smith, Frank Gambale/Stu Hamm/Steve Smith, Scott Henderson/Steve Smith/Victor Wooten, Howard Levy/Jerry Goodman/Steve Smith/Oteil Burbridge, Larry Coryell/Steve Smith/Steve Marcus/Kai Eckhardt, …). On peut l’entendre également avec Steps Ahead, Jeff Berlin, Neil Schon & Jan Hammer, quasiment tous les membres de Journey dans leurs projets en solo, … En 2001, un magazine spécialisé le classe dans les vingt-cinq meilleurs batteurs de tous les temps.
- Aydin Esen : Claviers. Né en 1962 à Istanboul (Turquie), il débute précocement le piano et suit une formation musicale au Conservatoire d’Istanboul où il obtient un Premier Prix de Piano et de Composition en 1980. Ensuite, il poursuit des études à Oslo, puis au « Berklee College of Boston », et enfin au « New England Conservatory of Music ». Avec un tel potentiel, il n’est pas vraiment étonnant de le voir avec des artistes de haut vol, tel que Miroslav Vitous, Woody Shaw, Pat Metheny, Gary Burton, Peter Erskine, Trilok Gurtu, …
- Anthony Jackson : Guitare contrebasse. Né en 1952 à New York, il a débuté par le piano, est passé à la guitare avant de faire carrière à la basse, influencé par le bassiste de la « Motown », James Jamerson. A dix-huit ans, il devient un musicien de session demandé et, rapidement, suit le chanteur Billy Paul. C’est également l’époque de ses prestations avec Buddy Rich, The O’Jays et Roberta Flack. Personnellement, c’est par les éblouissants premiers enregistrements en solo du guitariste Al Di Meola que je le découvre à partir de 1976. En outre, il travaille avec Steely Dan, David Sanborn, Chick Corea, Paul Simon, Chaka Khan et bien d’autres.
Avec un tel assemblage de talents, dans l’absolu, on pouvait espérer se retrouver avec quelque chose d’exceptionnel, …si la « sauce » prenait bien.
A l’écoute, chaque titre se révèle agréable et, en général, très mélodique. Le plus aventureux reste Dave Liebman, se rappelant peut-être parfois John Coltrane. Ses envolées sont toujours plaisantes, flamboyantes à l’occasion, et bourrées d’à-propos. Le sommet me semble quand même atteint par Aydin Esen, qui étale quelques interventions magistrales avec une aisance déconcertante et un goût stupéfiant. A la rythmique, Anthony Jackson assure bien son rôle, mais un peu trop discrètement à mon goût et Steve Smith, décidément toujours très varié, n’usurpe jamais la place qui lui a été attribuée par le magazine américain. Aucun égo ne transparaît jamais chez ses quatre musiciens qui n’ont plus grand-chose à prouver et l’équilibre respire à travers ses dix pièces impeccablement interprétées et mises en place. La coloration « Rock » de l’ensemble est très réduite et peu significative. On a affaire ici à un album de « Jazz », ce qui semble à priori assez normal en lisant le nom des deux compositeurs principaux, qui n’ont jamais été d’ardents « Rockers » ou même de notables « Fusionneurs ».
Voici les titres, tous d’une saveur égale (61’02) :
- « Flashpoint » (Dave Liebman) (5’30)
- « Like John » (Dave Liebman) (6’32)
- « Particles » (Aydin Esen) (7’14)
- « Speak without Words » (Aydin Esen) (7’27)
- « The Gentle Warrior » (Dave Liebman) (6’56)
- « Fabric of Reality » (Aydin Esen) (5’53)
- « Yildiz » (Phil Markowitz) (7’07)
- « Maid in the Mist » (Dave Liebman) (6’21)
- « Khanda West » (Steve Smith) (1’05)
- « Edge of Tomorrow » (Aydin Esen) (6’45)
En définitive, un ouvrage qui n’innove ou ne réinvente strictement plus rien, mais représente un indiscutable moment de plaisir. Bref, à déguster sans modération, bien calé dans son fauteuil, avec, par exemple, un bon whisky !
Pays: US
Mascot Records M 7175 2
Sortie: 2005/08