URIAH HEEP – Living the dream
« Si ce groupe réussit, j’entre dans les ordres », avait dit un critique rock lors de la parution du premier album d’Uriah Heep en juin 1970. On ne sait pas dans quel monastère ce brave journaliste vit tranquillement le reste de son âge mais toujours est-il que, oui, avec près d’un demi-siècle de carrière, Uriah Heep a réussi. Matez un peu les scores : 25 albums studio, 18 live, 39 compilations (dont la dernière, « Totally driven« , avait été chroniquée sur ce site) et un paquet de disques d’or, principalement glanés au cours de la première moitié des années 1970, l’âge d’or du groupe.
Depuis cette époque glorieuse, le groupe mené depuis toujours par le guitariste Mick Box, est un peu revenu vers les couches basses du vedettariat. Il sera toujours le petit challenger qui avait essayé de rejoindre les sommets du hard rock anglais tenus par la sainte trilogie Led Zeppelin – Black Sabbath – Deep Purple sans jamais vraiment pouvoir menacer cette hiérarchie. Il faut dire qu’Uriah Heep en a pris aussi plein le pif en matière de changements incessants de personnel, de décès, de zigzags entre des maisons de disques pas toujours concernées par une promotion soignée, sans parler de quelques albums médiocres, ça arrive.
Mais pourtant, après toutes ces années, Mick Box, 71 ans, tient toujours sa boutique, a réussi à maintenir son groupe autour d’une équipe soudée depuis 2013 et a même regagné les hauteurs des charts anglais avec une neuvième place pour le dernier album « Outsider » en 2014. Eh bien, avec le tout dernier « Living the dream » qui vient de sortir, il serait bien dommage qu’Uriah Heep ne vienne pas à nouveau poser ses bottes quelque part dans le classement anglais car le groupe vient de se fendre d’un excellent disque.
Le proverbe se confirme en effet que c’est dans les vieilles amphores qu’on fait le meilleur vin, quand on entend le niveau de forme sonore et instrumentale d’Uriah Heep, qui a imaginé des compositions dynamiques de bout en bout, avec un Mick Box qui semble invincible derrière la six-cordes et un Bernie Shaw fort en voix. Et n’oublions pas Phil Lanzon, 32 ans de maison chez Uriah Heep, qui taraude ses claviers avec une énergie qui nous renvoie directement aux grands moments du groupe, quand les grandes orgues étaient tenues par le légendaire Ken Hensley.
On se retrouve avec dix morceaux impeccables, dont une première moitié qui construit de formidables moments dans le courant de l’album (« Grazed by Heaven », « Living the dream », un « Take away my soul » affublé d’un solo héroïque de Mick Box, le solide « Knocking at my door » et un « Rocks in the road » de plus de huit minutes qui a tout pour lui : rythmique d’airain, changements de tempos et final orgue-guitare à tomber). La jolie ballade « Waters flowin' » vient un peu calmer le jeu, le temps de faire boire les montures et c’est reparti pour la cavalcade avec « It’s all been said », « Goodbye to innocence » ou « Falling under your spell » qui retrouvent le plus pur son Uriah Heep des années 70. On finit en tempo ralenti mais toujours princier sur « Dreams of yesteryear », un titre idéal pour finir dans la grandeur et reprendre un peu son souffle. A titre de bonus, une version alternative de « Take away my soul » termine de combler l’auditeur.
Et pour ceux qui en veulent toujours plus, la version de luxe de cet album propose un DVD documentaire sur la production du nouvel album. Tout ce qu’il faut pour rendre heureux l’homme du 21e siècle.
Pays: GB
Frontiers Music
Sortie: 2018/09/14