GERDA – Black queer
Avec Gerda, nous n’allons pas traîner en Allemagne ou en Autriche, comme son nom semblerait l’indiquer, mais en Italie, pour nous offrir un petit voyage dans la scène post-punk et post-hardcore transalpine. Gerda est un quatuor qui vient de Jesi, petite ville située à une vingtaine de kilomètres d’Ancône, sur la côte est italienne. La particularité de cette commune est d’avoir été la ville natale de l’empereur germanique Frédéric II Hohenstaufen et d’avoir fourni au sport italien un nombre impressionnant d’escrimeurs. Eh oui, il n’y a pas que l’Inter de Milan dans la vie.
Jesi est donc une ville où on aime se percer les côtes à coups de fleuret mais c’est aussi un endroit où on apprécie apparemment de se torturer l’esprit avec une musique chaotique, si l’on en juge par les œuvres de Gerda, qui a diffusé dans l’atmosphère une demi-dizaine d’albums depuis treize ans. Après « Gerda » (2005), « Cosa dico quand non parlo » (2007), « Untitled » (2009), « Me and Gerda are both dead like you » (2012, un album partagé avec le groupe Dead Like Me) et « Your Sister » (2014), Alessandro Turcio (chant), Alessio Compagnucci (basse), Andrea Pasqualini (batterie) et Roberto Vilotta (guitare) reviennent avec « Black queer », un disque qui se positionne dans la lignée des œuvres précédentes.
Que trouve-t-on généralement dans les disques de Gerda? Un post-hardcore rugueux et énervé, capable de faire passer Converge pour un quatuor à cordes slovène. Si le premier album est particulièrement furieux, le deuxième a tendance à ralentir un peu les tempos tout en restant particulièrement agressif et inquiétant, ce qui est pareil pour le troisième. « Your sister » revient à des compositions plus directes, débarrassées de toutes fioritures alors que ce nouveau « Black queer » renoue avec davantage de complexité. On démarre avec la très courte introduction « Jeg kjører inn i tunellen », qui est déjà passée avant qu’on ait eu le temps de prononcer ce titre en norvégien, pour ensuite se faire aplatir le cervelet sous les coups de boutoir de « Lulea TX » et « Mare », des morceaux qui empruntent davantage au post-punk qu’au post-hardcore. On sent effectivement plus de subtilité dans ce nouvel album, qui laisse une place importante aux parties de basse et à une rythmique complexe. L’impression est confirmée sur « Terzo regno » et ses ambiances plus planantes mais toujours angoissantes. A partir de ce moment, Gerda développe une série de titres plus longs (« Notte », « Hafenklang ») qui empruntent souvent des chemins déjà visités par Converge ,Unsane ou 30,000 Monkies, par exemple. L’affaire se termine avec deux reprises, « Figlia » (du groupe Vel, c’est-à-dire tout simplement le premier groupe de Roberto Vilotta et Alessio Compagnucci formé en 1997 et séparé en 2012) et « Theme » (ni plus ni moins que le classique morceau de P.I.L. qui ouvrait son premier album en 1978). On se finit ici avec près de neuf minutes de chaos salvateur, dans une version bien plus furieuse que l’originale, conclusion d’un album éminemment intéressant et écorché vif. A découvrir.
Pays: IT
Bloody Sound Records
Sortie: 2018/03/30