IRON MONKEY – 9-13
Est-ce en hommage à Chopin et à sa Nocturne, Op. 9 No. 2 que Iron Monkey a intitulé son nouvel album, celui de la reformation, 9-13 ? Passer de 2 à 13 indiquerait alors la noirceur supplémentaire de la nuit… Finis les grillons et la Lune, place aux potences, aux errances et aux âmes errantes…
S’agit-il au contraire de rendre hommage aux rappeurs français du 9-3, ceux qui chantent leur triste banlieue, leurs dures années de lutte pour une place assise dans le RER, leur mal de vivre et leur difficulté à manier leur dictionnaire de rimes ? C’est bien possible. Passer de 3 à 13 marquerait alors un supplément de révolte, celle qui, absolue, n’a plus besoin d’une panne de scooter pour prétexte et n’espère plus un contrat chez Universal pour consolation.
Pourquoi 9-13 ? Pourquoi pas, au fond ? Iron Monkey, après 20 ans, revient d’entre les morts, et ça cogne. Ce n’est pas La Momie, mais à l’échelle du rock, c’est quand même un bail. Comme contenue trop longtemps, l’énergie se libère avec une violence réjouissante, tellement que j’ai pesé mon CD après chaque écoute, cherchant dans son allègement une confirmation de E=mc2 et une quantification de la masse convertie en énergie.
Face à ce bloc, toute question devient superfétatoire (comme dirait Maitre Gim’s qui croit que ça veut dire qu’on va faire une super teuf et que ça valait la peine de se saper comme jamais). Le slogan de cet album pourrait être « taper comme jamais » : sur ses fûts, sur sa basse, sur les cordes de sa guitare, sur le tympan des auditeurs…
Tiens, au fait, à quoi voit-on qu’un album de sludge est bon ? Aucune idée, aucune importance. Le sludge est une musique qui fonctionne ou pas, c’est tout. Cette plaque-ci fonctionne, voilà tout.
Du métal, du punk, du hardcore, tout est en place pour faire 9 morceaux bien pourris.
Une batterie qui martèle en toute simplicité, la guitare qui écrase, la basse qui rouleaucompresse… et les feulements de Rushby. Il ne faut pas être plus de trois pour dévaster le monde.
Le reste est à l’avenant avec des textes d’une subtilité extrême comme « No hope / No hope / The rope / The rope » (The Rope, comme on le devine) ou « No control / No control / I’ve no control / When I lose control » (9-13). Qu’est-ce qu’on en a à foutre ? Rien ! Le chanteur pourrait grogner qu’il est sapé comme jamais, ça ne changerait rien à l’affaire.
Cette musique n’est pas une affaire de textes, de virtuosité ou de pose. C’est une question de rage. De désespoir et de rage. On ne hait pas le monde parce qu’on n’a pas reçu assez, parce qu’une nouvelle Porsche Cayenne est sortie (et impayable), ni parce que c’est encore Raymond qui a obtenu la promotion que nous méritions pourtant bien plus que lui…On hait le monde parce que c’est la seule solution, parce que c’est lui ou nous, parce que rien n’est possible ni n’a de sens.
Ensuite, les oreilles sifflantes, son attaché-case à la main, lesté d’un sandouitche à l’omelette et d’un thermos de soupe, on est à nouveau en mesure d’attendre son train, dans le matin pisseux. C’est ça, le sludge. L’indispensable, rien de plus.
Line -up :
Jim Rushby (guitare, chant)
Steve Watson (guitare, basse)
SCott « Brigga » Briggs (batterie)
– Iron Monkey Le Bandcamp de l’album
Pays: GB
Relapse Records
Sortie: 2017/10/20