COOPER, Alice – Paranormal
L’année prochaine, Alice Cooper atteindra l’âge de 70 ans. Si Dieu lui prête vie. Mais normalement, il ne devrait pas y avoir de mauvaises surprises puisque le bon Alice a arrêté de boire depuis maintenant plus de 35 ans et que sa carrière musicale bat toujours son plein. Monsieur Vincent Furnier (c’est son vrai nom) semble en effet avoir trouvé la pente ascendante qui ne s’arrête jamais en termes d’inspiration, d’albums nouveaux, d’énergie et de tournées intensives. A l’heure où nous écrivons ces lignes, Alice Cooper et son groupe sont en pleine tournée américaine après avoir visité l’Europe en juillet et joué aux Lokerse Feesten le 6 août dernier. La Belgique est d’ailleurs désormais visitée régulièrement par Alice Cooper et sa ménagerie, avec quasiment un concert par an depuis 2002 (douze concerts en quinze ans, pour être précis).
Alice Cooper a toujours su épater avec son étonnante capacité à rebondir. Après les glorieuses années 70 et ses chefs-d’œuvre « Love it to death » (1971), « Killer » (1971), « School’s out » (1972) « Billion dollar babies » (1973) ou « Welcome to my nightmare » (1975), on le pensait fini au début des années 80, alcoolisé et dépressif, tentant vainement de suivre une voie un peu plus new wave. Et le revoilà en pleine forme en 1986 avec son mémorable album « Constrictor », confirmé quelques années plus tard avec son fameux « Trash » en 1991. On le pense un peu fatigué vers la fin des années 90 et il revient avec « Brutal planet » (2000) et « Dragontown » (2001), des albums plein d’énergie et de menaces. On le pensait parti en mode croisière tranquille à la fin des années 2000 et il ressuscite et reformule son célèbre album « Welcome to my nightmare » en 2011, retrouve ses vieux copains de l’Alice Cooper Band des années 1968-74 et repart dans des tournées interminables autour du grand monde. Après tout, l’inventeur du shock rock a bien raison de tout donner à la veille du troisième âge car sa contribution au patrimoine mondial du rock est très précieuse.
Cette année, Alice Cooper revient donc avec un nouvel album studio, le 27e de sa carrière. Les fans du Coop attendaient une nouvelle livraison depuis 2011 et les voilà comblés par un disque qui ne va évidemment pas renouveler de fond en comble le style et la vision d’Alice Cooper mais qui se place parmi les bons albums du chanteur. On se prend notre petite dose de frayeur et d’hémoglobine avec une série de chansons énergiques et dégoulinantes d’électricité (« Paranormal », « Dead flies », « Fireball », « Paranoiac personality », « Private public breakdown », « Rats ») et on se rend compte qu’Alice Cooper a toujours le sens de la composition et de l’écriture, servi par une brochette de musiciens aiguisés. Parmi ceux-ci, on trouve Tommy Hendriksen (chœurs et guitare), Larry Mullen (le batteur de U2), Tommy Denander (guitare, musicien de session réputé en suède), Jimmie Lee Sloas (basse) et, à l’orgue, Bob Ezrin qui se charge aussi de la production en bon complice d’Alice Cooper qu’l est depuis près de quarante ans. Quelques invités de prestige viennent faire un petit tour, comme Roger Glover à la basse sur « Paranormal », Billy Gibbons sur « Fallen in love », Steve Hunter à la guitare sur « Holy water » ou Dennis Dunaway, Neil Smith ou Michael Bruce, qui faisaient partie du groupe d’Alice Cooper jusqu’en 1974. A part Tommy Hendriksen, aucun des membres du groupe de tournée d’Alice Cooper ne participe à cet album, enregistré dans divers studios du Tennessee, de Californie, d’Arizona ou de Suède.
En parlant du vieux groupe d’Alice Cooper, celui-ci est remis en valeur sur le second CD de « Paranormal », où Alice, Dennis Dunaway, Neil Smith et Michael Bruce jouent deux nouvelles chansons composées rien qu’entre eux, « Genuine American girl » et « You and all of your friends ». Ces petits titres adolescents et pétillants donnent à penser qu’Alice et ses sbires ne seront jamais décidés à se laisser gagner par l’âge. Sur la paire, on préférera le second morceau, un peu plus viril et costaud. L’autre partie du second CD est occupée par un extrait d’un concert donné à Columbus le 6 mai 2016, avec la fine fleur des classiques « No more Mr nice guy », « Under my wheels », « Billion dollar babies », « Feed my Frankenstein », « Only women bleed » et bien sûr en final l’inévitable et immortel « School’s out ».
Bref, la cuvée 2017 d’Alice Cooper est gouleyante et reste en bouche, encore capable de faire quelques trous dans l’estomac. Distrayant et tapageur, cet album au packaging soigné continue de maintenir Alice Cooper à un haut niveau de crédibilité artistique. Personnellement, j’ai du mal à être sévère avec Alice Cooper puisque j’ai prénommé ma fille Alice uniquement en son honneur et non pas en référence à la petite écervelée du pays des merveilles. Et avec une 32e place au Billboard américain, ce nouveau disque réalise ici une performance tout à fait honorable. Continue, Alice, on t’aime!
Pays: US
E.a.r Music
Sortie: 2017/07/28