RIGHTEOUS VENDETTA – Cursed
Il y a parfois des artistes qui ont du mérite. Arriver à se faire un nom quand on vient de Cody dans le Wyoming, bled perdu au milieu de nulle part, entièrement dédié à la mémoire de son fondateur William Cody (Buffalo Bill pour les intimes) n’est pas à la portée de tout le monde. Ça a été le cas du peintre abstrait Jackson Pollock et c’est aussi le cas de Righteous Vendetta. Ce petit combo metalcore voit le jour en 2008 et a lutté ferme pour diffuser sa musique au-delà des frontières étriquées de son bourg de 10 000 habitants. La grosse ville la plus proche étant Denver, à neuf heures de bagnole de là, les gens de Righteous Vendetta ont vite appris à tourner intensivement et à se faire les dents sur les planches des scènes du Colorado. Parce que du côté de l’Utah, du Dakota du Nord ou du Sud, de l’Idaho, du Montana et du Nebraska, c’est quand même la grosse zone, un vulgaire empire fermier.
Bon, ce mérite dans la lutte contre une géographie hostile ne saurait faire oublier que Righteous Vendetta se réclame du metalcore et que dans ce domaine, il choisit intentionnellement un chemin pavé d’opprobre et de méfiance de la part des amateurs de rock authentique. Le groupe a beau revendiquer sur son site Facebook qu’il défend une musique authentique et pure, on se permettra néanmoins d’émettre de gros doutes sur la pureté et l’authenticité du metalcore, genre connu pour sa capacité peu commune à se standardiser au mépris de toute originalité.
Alors qu’en est-il de ce « Cursed », que Ryan Hayes (chant), Justin Olmstead (guitare), Justin Smith (guitare), Zack Goggins (batterie) et Riley Haynie (basse) nous ont concocté? D’abord, c’est le quatrième album du groupe, après « The dawning » (2010), « Lawless (2011) et « The fire inside » (2013) et le premier à paraître sur le label de Century Media. Ce sera sans doute une occasion pour Righteous Vendetta de se faire connaître un peu mieux en Europe, du moins chez les populations qui aiment le metalcore.
Car pour ceux qui n’aiment pas (et ceux qui me lisent savent bien que j’appartiens à cette catégorie), Righteous Vendetta n’aura pas grand intérêt. Son style se base sur des précédents bien connus dans le domaine du metalcore, comme As I Lay Dying ou The Devil Wears Prada, auxquels il faut ajouter quelques influences issues de la scène death mélodique suédoise (In Flames, Killswitch Engage). La touche suédoise, c’est pour les bons aspects de la musique de Righteous Vendetta. Car pour les aspects plus indigestes, le groupe se laisse volontiers aller à tous les poncifs du metalcore, avec une surabondance de refrains mélodiques niais qui viennent casser la dynamique métallique et l’enfoncement progressif dans la redite.
C’est ainsi que « Cursed » démarre avec du prometteur (le premier morceau « War is killing us all », encore aussi le deuxième morceau « Cursed »). Mais dès le troisième titre « Weight of the world », le taux de mélodie niaise et de refrains adolescents commence à grimper de manière inquiétante. Quelques solos de guitare et des riffs brutaux font mine de résister mais la guimauve ne va pas tarder à coloniser méthodiquement les morceaux qui vont suivre. Le premier signal d’alarme est donné sur « Daemons », qui mélange sans discernement de solides influences Marilyn Manson et des refrains d’une mièvrerie déconcertante. Et, au cours de l’album, les choses ne vont faire qu’empirer, avec d’improbables daubes du genre « A way out », « Never say never » (un des plus magnifiques exemples de guimauve metalcore avec refrains boursouflés et absence du moindre pouvoir perforant) ou « Become ». Quant aux morceaux les moins pires, ils souffrent d’une absence de personnalité et sonnent tous plus ou moins de la même façon, avec des structures copiées-collées les unes sur les autres (« Defiance », « Psycho », « Doomed »). Et lorsqu’on a, comme c’est le cas ici, treize morceaux à se farcir, les choses prennent finalement l’aspect d’un marathon avec des chaussures remplies de verre pilé. Notre souffrance devient un véritable martyre quand il s’agit d’aborder le dernier morceau « Strangers », ballade faussement musclée d’une banalité abyssale. Tout y est : refrains mielleux stéréotypés, semblant de violence qui ne ferait pas de mal à une limace.
Rassurez-moi, dites-moi que ce n’est pas toute la jeunesse moderne qui écoute ce genre de misère et qu’il y en a encore qui ont assez de discernement pour trouver du bon punk hardcore, du bon thrash metal ou du bon néo-psychédélique afin de perpétuer l’esprit originel du rock ‘n’ roll ! Finalement, les Righteous Vendetta, ça ne vous dirait pas de retourner dans votre bled du Wyoming pour y animer les fêtes de cow-boys?
Pays: US
Century Media
Sortie: 2017/03/17