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METALLICA – Hardwired… to self-destruct

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Ça y est, les Four Horsemen de Metallica sont enfin sortis de leur silence discographique, qui remontait déjà à huit années et le dernier album « Death magnetic« . Ça y est, les fans de tous les pays vont pouvoir se précipiter et acheter massivement les différentes éditions de ce « Hardwired… to self-destruct » et faire monter le disque au sommet des charts. A l’heure où nous écrivons, le nouveau Metallica est ou a été numéro un dans près de 57 pays dans le monde. Je dis « a été » car sa performance à la première place du Billboard américain, par exemple, n’a été que d’une semaine, les ventes étant retombées à la troisième place dès la deuxième semaine. Et enfin, ça y est, les critiques et évaluateurs de tous bords vont pouvoir se pencher sur l’animal, passer des heures à écouter les douze titres répartis sur deux disques et affichant une durée totale de 77 minutes, et donner un avis plus ou moins favorable.

Et c’est vrai qu’il y a de la matière avec cet album fleuve qui transgresse allègrement le principe, démontré par l’histoire, qu’un album de rock garde toute sa verve et sa puissance sur une durée limite de 37 minutes. Après, ça devient ennuyeux. Aïe! Certains pensent déjà que je prépare le terrain à une critique qui va impitoyablement descendre le dernier né du plus grand groupe de métal du monde. Qu’ils se rassurent, ce n’est pas aussi simple que ça. Avec Metallica, ce n’est jamais simple.

L’histoire du groupe a montré que la bande montée par James Hetfield et Lars Ulrich en 1981 a atteint les sommets du génie puis s’est aussi complu dans une certaine facilité, rendue tentante par les énormes succès engendrés à partir des années 1990 et le fameux album éponyme noir. Ceux qui étaient à Poperinge en février 1984 pour assister aux débuts belges de Metallica (en association avec Venom) savent bien de quoi je parle. Pour eux, Metallica a été le symbole de la révolution thrash metal qui a balayé l’univers des hardeux en ces glorieuses années 1983-86, qui vit naître les Quatre Grands du thrash metal (Metallica, Slayer, Megadeth, Anthrax) et paraître sur le marché les Saintes Ecritures du thrash, avec « Kill ’em all », « Ride the lightning », « Reign in blood », « Peace sells, but who’s buying? » ou « Among the living ». Et bien sûr « Master of puppets », le troisième album de Metallica en 1986, et à mon avis son chef-d’œuvre inégalé.

Car c’est à partir de 1986 que Metallica forge son style, avec la puissance implacable des guitares, le chant caractéristique de James Hetfield, la rythmique de bourrin de Lars Ulrich, et des morceaux qui auront tendance à devenir de plus en plus travaillés et longs. Depuis cette époque, Metallica s’est installé dans ce style, avec des résultats plus ou moins convaincants. On ne peut pas toucher au Black album (1991) qui reste le disque qui a mis Metallica sur la route du grand public. En effet, à partir de ce moment, un nombre croissant de métalleux occasionnels va se reconnaître dans les chansons de Metallica qui insuffle suffisamment de mélodie pour charmer un public ne rechignant pas non plus à écouter du rock FM, mais qui garde aussi une ligne rageuse pour garder ses aficionados issus du métal pur.

Certes, cette formule n’a pas toujours été fédératrice et a pu aboutir à quelques albums en porte-à-faux qui ne trouvaient pas bien leurs bases entre ces deux directions (« Load »,1996 ; « Reload », 1997; « St. Anger« , 2003). Ces petites errances m’ont mis à l’épreuve, moi qui rêvais dans ma jeunesse que j’étais pote avec les musiciens de Metallica et que je les suivais partout. Avec le temps, j’en suis venu à respecter bien plus les trois autres grands du thrash, plus constants dans leur approche métallique, plus fréquents dans la production d’albums et plus fidèles à une conception underground des choses. Bref, Slayer, Megadeth ou Anthrax avaient l’ego moins surdimensionné que les sbires de Metallica.

Alors, que dire de ce dixième album studio des Four Horsemen, à la fois attendu et redouté par les fans plus ou moins encore chauds? Première impression : les 77 minutes de « Hardwired… » passent plus facilement que prévu. Les quatre bouchers de Metallica réussissent à prouver qu’ils ont encore quelques obus lourds dans la besace, ainsi qu’une envie de jouer ensemble dans le but de composer de la musique qui tient encore en haleine. Mais si ces compositions conservent un pouvoir explosif certain, on n’en voit pas une sortir du lot de prime abord. Certes, avec les écoutes, on commence à remarquer un bon riff par-ci, une bonne cavalcade de batterie par-là, et on termine avec une bonne impression d’ensemble.

Mais c’est peut-être là qu’on pourrait soulever un petit bémol. Cet album est bon, mais il n’est que bon. Et venant d’un groupe dont beaucoup attendent toujours beaucoup, c’est une légère source de déception. En gros, Metallica fait du Metallica. James Hetfield chante comme d’habitude, avec ses intonations qui finissent par devenir caricaturales, à la limite du cabotinage. Kirk Hammett dézingue du solo sidérurgique comme il sait le faire et là, je dirais qu’il y a quand même un petit mieux par rapport au dernier album « Death magnetic », où le bon Kirk me faisait l’impression de ressortir ses solos de 1983, comme qu’il n’avait pas évolué musicalement depuis les débuts de Metallica. Ici, Kirk Hammett retrouve un style qui avait fait les beaux jours de « … And justice for all » (1988) et le Black album. Quant à Lars Ulrich, il cogne dur et sans grande subtilité, comme d’hab. Metallica serait-il en train de devenir le Status Quo du thrash metal? Affaire à suivre.

Le groupe sauve par contre son disque par l’absence de ballades sirupeuses ou de titres instrumentaux à rallonges, qui avaient parfois un peu tendance à plomber les opus précédents. Avec sept minutes de moyenne, les titres du nouvel album conservent une bonne cohérence et ne lassent pas l’auditeur. Il y a aussi un autre bon point du côté de la pochette. C’est peut-être une question de goût mais le concept visuel qui a été trouvé avec cette superposition de visages rageurs dans une seule tête est assez réussi. Quand on y réfléchit bien, c’est peut-être (mais « Master of puppets » est hors-concours) la pochette la plus inventive d’un album de Metallica.

Bon, on a un peu secoué les puces de nos vétérans du thrash mais on n’a pas trouvé grand-chose de grave à leur reprocher. Les types ont quand même désormais la cinquantaine bien sonnée et comme dit le proverbe, on ne peut pas apprendre de nouveaux tours à un vieux chien. Mais quand ces vieux chiens aboient, ça fait encore beaucoup de bruit. C’est tout ce qu’on leur demande.

Pays: US
Blackened Recordings
Sortie: 2016/11/18

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