RIVAL SONS – Hollow bones
A l’époque de leurs débuts, les Rival Sons avaient pu profiter d’un énorme buzz qui courait à leur sujet entre les quelques initiés qui avaient eu la chance de tomber par hasard sur leur premier EP et leur premier album, en ces déjà nostalgiques années 2009 et 2010. Ces mecs-là étaient allés sortir le cercueil de Led Zeppelin à mains nues et en avaient ressuscité les os moisis à grands renforts d’électricité sauvage. C’est peut-être ce que l’on pouvait leur reprocher à l’époque d’ailleurs, les Rivals Sons étaient à Led Zep ce qu’Airbourne était à AC/DC : un peu trop collants au maillot de leur modèle. Mais avec le temps, Jay Buchanan (chant), Scott Holiday (guitare), Mike Miley (batterie) et Robin Everhart (basse) étaient parvenus à prendre une relative autonomie par rapport à leur idole et avaient troussé d’intéressants albums, comme « Pressure and time » (2011), « Head down« (2012) et le magnifique et très mûr « Great western Valkyrie » (2014).
Les années récentes avaient en effet révélé des Rival Sons en pleine mutation, avec un chanteur qui changeait de look comme de chemise, passant d’un sosie de Jim Morrison souffreteux à une sorte de post-punk finlandais coiffé au bâton de dynamite. Le guitariste Scott Holiday était quant à lui passé du hippie en costume tergal au chicano raffiné, genre Don Diego de la Vega sortant d’un lupanar de luxe à Tijuana. Ces mues vestimentaires mettaient aussi en exergue une mutation musicale, de la fascination béate pour Led Zeppelin vers la construction d’un style plus personnel, toujours basé sur un rock lourd et bluesy aux résurgences seventies, mais avec davantage de marque de fabrique en provenance des Rival Sons.
On a pu goûter à cette évolution sur « Great western Valkyrie », qui se voit suivi cette année par ce nouveau « Hollow bones », qui se place dans l’ombre de son prédécesseur sans parvenir à l’envoyer aux oubliettes. Car si Jay Buchanan, Scott Holiday, Mike Miley et le nouveau bassiste Dave Beste livrent ici un très bon boulot, respectueux du passé du groupe et contribuant à l’évolution de leur œuvre, ce nouvel album « Hollow bones » marche dans les sentiers balisés par les disques précédents sans ouvrir un nouveau chapitre révolutionnaire dans la carrière de Rival Sons.
Mais il y a quand même de quoi s’esbaudir à l’écoute de quelques solides passages de ce nouvel opus. Il y a toujours pour cela la voix d’airain de Jay Buchanan, les riffs charpentés de Scott Holiday et la frappe bonhamienne de Mike Miley qui constituent les ingrédients indispensables. Côté ambiance, l’oreille interne est nettoyée d’entrée de jeu par l’impérial « Hollow bones, pt 1 » qui fait une arrivée impériale dans nos oreilles. Le feu initial est entretenu par « Tied up » qui est pour ainsi dire du Rival Sons pur jus, avec ses refrains hymniques, ses vocaux feutrés et le groove typique de la rythmique. Rien de nouveau sous le soleil des Fils Rivaux avec ce titre, tout comme chez « Thundering voices » qui s’ébroue sur un territoire zeppelinien à peine caché. Ce qui constitue le point d’orgue de cet album est à découvrir en milieu d’album, avec l’impressionnant slow blues « Fade out ». Ici, c’est du grand Rival Sons, qui délivre ses chatoiements de chant et de guitare avec un feeling puissant. Pour se remettre d’un tel moment d’émotion électrique, rien de tel qu’une petite reprise d’Ike et Tina Turner, histoire de rappeler que les Rival Sons sont aussi des soulmen (« Black coffee »). La fin d’album est plus classique mais sait encore impressionner avec le long « Hollow bones, pt 2 » (n’ayant cependant pas grand-chose à voir avec la première partie) et une tendre et larmoyante ballade acoustique (« All that I want »).
Si les Rival Sons avaient fait leurs débuts en 1971, ils auraient leur niche garantie au sommet de l’Olympe des grands groupes de rock. Mais arrivés dans notre époque moderne où la concurrence entre les revivalistes seventies est acharnée, les Rival Sons doivent se surpasser s’ils veulent rester au-dessus des flots grouillant de petits groupes aux nombreux points communs. Leur nouvel album montre qu’ils peuvent encore dépasser la mêlée d’une tête (le groupe enregistre à ce jour ses meilleures performances commerciales aux USA et en Europe), mais gare à la routine qui pourrait les faire disparaître dans le peloton. Ceci est moins une menace qu’un conseil de fan dédié à la cause des Rival Sons, qui voudrait voir ce groupe perdurer dans les hautes sphères de la qualité.
Pays: US
Earache Records
Sortie: 2016/06/10