WÖR – Back to the 1780’s
Et si on retournait un moment dans la musique des années 80? Je sais, c’est assez banal mais ce le sera certainement moins lorsqu’on aborde, non pas les années 1980 mais les années 1780. Comment? Il y avait du rock à cette époque? On nous aurait caché quelque chose? Non, il n’y avait pas de rock, bien sûr, mais le lointain ancêtre du folk, à savoir la musique populaire des carillonneurs flamands, par exemple.
C’est précisément dans ce monde étonnant que nous emmène Wör, un quintet gantois qui s’est intéressé à d’obscurs petits maîtres musiciens qui ont laissé à la postérité des œuvres méconnues, souvent retrouvées au fond des églises, sous des couches de poussière. Peterjan van Kerkhoven (cornemuse et saxophone), Bert Ruymbeek (accordéon), Naomi Vercauteren (violon), Jeroen Knapen (guitare) et Fabio Di Meo (saxophone baryton et soprano) ont extrait des décombres du temps des pièces musicales remontant aux années 1743 à 1781 pour leur donner un nouveau souffle modernisé.
C’est cette approche moderne qui nous permet de parler de cet album dans nos colonnes car il faut bien admettre que l’album « Back to the 1780’s », s’il avait été joué de manière traditionnelle, aurait davantage intéressé les critiques de musique classique que ceux qui écoutent du rock et, particulièrement ici, du folk.
Donc, pas de viole de gambe ou de clavecin ici, mais des instruments contemporains qui nous font découvrir des compositeurs tels que Petrus Josephus van Belle, originaire de Viane, l’anversois Johannes De Gruijtters, la famille Di Martinelli de Diest, le gantois Robert d’Aubat de Saint-Flour, le bruxellois Pierre Trappeniers ou Frans De Prins, de Leuven. Ces gens composaient essentiellement des pièces de danses pour les fêtes populaires, ce que l’on sent bien à l’écoute de ces morceaux enthousiastes et vivifiants qui sont interprétés tambour battant par les musiciens de Wör, au passage des techniciens accomplis.
Là où les choses sont intéressantes, c’est d’abord la démarche foncièrement originale de Wör qui arrange avec brio de la musique du 18e siècle pour la faire sonner comme si elle avait été composée la semaine dernière. C’est ensuite le ton de ces morceaux, qui ne dépareilleraient pas un album de folk celtique contemporain.
Ainsi, au long de « Contre danse », « Maclotte Zerezo et le marchand de Smyrne », « La railleuse », « La lavandière & la capricieuse » ou « Contredanse angloise & contredanse van Paillas », l’esprit remonte le temps, virevolte dans des farandoles au pied des moulins des villages flamands, à l’époque où la Flandre faisait partie des Pays-Bas autrichiens et où on célébrait le règne de l’impératrice Marie-Thérèse d’Autriche. C’était le bon temps et l’album de Wör retranscrit cette joie de vivre et cette insouciance dans les mélodies enlevées de ces petites perles revenues des abîmes du temps. Ce disque est particulièrement conseillé à ceux qui s’intéressent à l’histoire de la musique, qui cherchent à établir des ponts entre les musiques populaires européennes ou qui ont simplement envie d’écouter et d’apprécier une démarche originale et particulièrement bien menée.
Pays: BE
Appel Rekords
Sortie: 2015/07/01