HOOKS, Ellis – Needle in a haystack
Avec sa voix de baryton gouleyante et son timbre solide, Ellis Hooks est un des petits princes de la scène blues et soul américaine contemporaine, souvent comparé à Sam Cooke, Little Milton ou Otis Redding, excusez du peu. Né en Alabama en 1974, il est le treizième enfant d’une fratrie de seize, produite avec entrain et dévotion par une mère cherokee et un père afro-américain, agriculteur baptiste ayant élevé ses enfants dans la plus stricte rigueur religieuse. A huit ans, Ellis Hooks est touché par la grâce de la musique et découvre à la radio les grands noms du blues et de la soul. Son chemin est tracé, il sera chanteur.
Débarqué à New York avec un petit baluchon, Hooks chante dans les sentiers de Central Park. Il se fait remarquer par ni plus ni moins que Diana Ross en personne, qui lui offre la possibilité d’enregistrer quelques titres au studio Power Station. Mais peu sûr de sa maturité musicale, Hooks préfère se défiler. Il part tenter sa chance en Europe où il chante dans les rues de Paris, Amsterdam ou Milan. A son retour à New York en 1995, il fait la connaissance du producteur Jon Tiven qui lui permet d’enregistrer son premier album « Undeniable » en 2002.
Tiven est une pointure dans la profession. Critique pour le Melody Maker et Rolling Stone, il s’est aussi fait les dents en tant que musicien dans le Jim Carroll Band comme guitariste, organiste et compositeur. Producteur, il voit passer devant sa console des gens comme Robert Plant, Nick Lowe, Wilson Pickett, Frank Black, Felix Cavaliere, Alex Chilton ou Little Milton, n’en jetez plus. Et pour finir, il a aussi composé des chansons pour Robert Cray, Johnny Winter, Leslie West, Jeff Healey ou Rick Derringer, pour n’en citer que quelques-uns.
Le premier album d’Ellis Hooks, remarqué par les critiques des deux côtés de l’Atlantique, lui met le pied à l’étrier. Tournant sans cesse, il ouvrira un jour pour Terence Trent d’Arby, ainsi que pour les Allman Brothers ou Lynyrd Skynyrd. Suivent alors une série d’albums : « Up your mind » (2003), « Uncomplicated » (2004), « Godson of soul » (2005), « Another Saturday morning » (2007). Mais fatigué de tourner comme une brute, Ellis Hooks marque le pas et se réfugie à Manhattan, jouant occasionnellement dans les petits clubs new-yorkais. Il ne retourne en studio que cette année, toujours soutenu par son ami Jon Tiven. Celui-ci convoque du beau monde en studio, à commencer par le poète et musicien Stephen Kalinich, qui a écrit des textes pour les Beach Boys, Brian Wilson, P.F. Sloan, Randy Crawford, Mary Wilson ou Diana Ross.
Pour ce nouvel album « Needle in a haystack », Jon Tiven officie aux guitares, saxophone, claviers et chœurs. Sa femme Sally Tiven tient la basse et Todd Snare écrase les fûts. Plusieurs invités viennent mettre leur patte, dont Mark T. Jordan au piano sur « Follow the seasons » et Steve Cropper à la guitare sur « To you who have wronged me ». Une poignée de batteurs d’appoint se succèdent également, dont le grand Simon Kirke de Free et Bad Co. Stephen Kalinich a écrit les textes, tenu les chœurs et a également contribué aux illustrations de la pochette intérieure du CD, étant donné qu’il est aussi peintre.
Cet album est une petite merveille de soul rock dynamique et enthousiaste. Ceux qui ne se sont pas remis de la mort de Sam Cooke et de Wilson Pickett peuvent retrouver en Ellis Hooks un nouveau sujet d’adoration. L’homme est puissant et émouvant et les treize chansons qu’il interprète bénéficient d’une impeccable variété. Aucun temps mort ici et on est secoué par les ondes électriques de « Needle in a haystack », balancé par les oscillations de « Train to train », excité par la transe funk de « To you who have wronged me » ou « I stand I scream » (dans une veine proche du Rod Stewart de « Da ya think I’m sexy »). Les moments plus calmes sont emplis de grandeur nostalgique (« Los Angeles ») ou philosophique (« Time is a mofo », « Live the day »). La deuxième partie d’album ne perd rien en énergie avec « Shortcuts to infinity » ou l’intensité lascive de « Put down your needles ».
Ici encore, Ellis Hooks glisse avec aisance sur un répertoire de chansons à la structure classique mais formidablement bien ficelées. La classe, l’énergie, l’émotion, tout y est pour un grand album de soul blues comme on faisait à la glorieuse époque des années 60 et 70.
Pays: US
Blues Boulevard 250375
Sortie: 2015/10/22