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MORTON, Ken Will – All’s fair in love & war

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Il y a de nombreuses motivations à l’entrée dans une carrière musicale. Certains le font pour l’argent, d’autres pour les filles, d’autres pour la drogue et des petits malins le font pour l’argent, les filles et la drogue. Il y en a qui se voient placés à la postérité, entre Gengis Khan et Simon Bolivar. Et enfin, il y en a qui entreprennent une carrière musicale… pour faire de la musique, en se foutant bien de l’argent, des filles, de la drogue et de la postérité.

C’est le cas de Ken Will Morton, dont l’indigence de la page Facebook révèle bien que le souci de se faire connaître à tout crin lui est complétement étranger. L’individu vient d’Athens, en Géorgie, où il réside dans un mobile home équipé d’un petit studio. C’est dans cet univers reclus que Ken Will Morton abat des albums de blues et d’americana à une cadence stakhanoviste.

Morton a quand même fréquenté des humains dans sa jeunesse, puisqu’il a débuté dans la musique avec le groupe Wonderlust, où on trouvait le batteur Kevin Watford et le bassiste Dave Siff. Ce petit combo power pop dure le temps des années 1998 et 1999, commettant un EP et un album. Morton rejoint alors le collectif The Indicators en 2001, jouant sur le second album de cette formation, « Kill the messenger » (2003). L’année suivante, Ken Will Morton quitte The Indicators et entreprend sa carrière solo, soldée par son premier album « In rock ‘n’ roll’s hands », sorti la même année.

Dès lors, Morton déploie son œuvre dans la discrétion et sur une base locale, enchaînant les albums « King of coming around » (2006), « Kickin’ out the rungs » (2008), « The devil in me » (2008), « True grit » (2010), « Contenders » (2011) et « Slow burn » (2013). Son nouvel album « All’s fair in love & war » sort cette année et ne propose pas moins de vingt titres pour 77 minutes d’écoute.

Cette œuvre pour le moins roborative s’expose au danger de lasser car 77 minutes, c’est long. Il aurait été judicieux de proposer deux albums de 38 minutes (la durée étalon qui était celle de l’album « Sgt Pepper » des Beatles) afin d’aérer la densité des chansons. Il devient effectivement difficile d’écouter cet album d’une seule traite car au bout du compte, on ne sait plus ce que l’on a écouté précisément, d’autant plus que le style americana de Morton a tendance à remettre les mêmes structures sur la table.

Pourtant, il serait mensonger de dire que cet album est ennuyeux. On se fait happer par la voix bien caractérisée de Morton, entre JJ Cale et Ronnie Van Zant, typique du sud profond. Les mélodies sont vivifiantes et l’individu est inspiré, revisitant le patrimoine country et americana en y mettant sa patte personnelle. Des titres comme « Long gone daddy » ou « Blinsided » font suinter du country blues modernisé. « Straight from your lips » ou « Riding for a fall » rappellent le Bryan Adams de la bonne époque (il y a très, très longtemps) et la ballade « Contact » a un petit côté Ten CC. Le milieu d’album consiste en une succession de titres plus lents et tranquilles, avant un certain retour à l’électricité sur la fin du disque (« A wave », « Hard feelings »).

Morton a réalisé l’album seul, jouant de tous les instruments, sauf la batterie qui a été pré-composée sur un logiciel. Il signe ici un album soigné mais dont la longueur occasionne parfois des passages un peu arides où on ne voit pas facilement la sortie. Mais dans l’ensemble, c’est un bel album de rock américain à la Bob Dylan, Big Star ou Ryan Adams. A écouter par petits bouts, si on a peur de l’indigestion.

Pays: US
Rara Avis Records
Sortie: 2015/06/05

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