VATTNET VISKAR – Settler
C’est une photo de l’astronaute Christa McAuliffe flottant dans une cabine dépourvue de gravité qui a inspiré l’album « Settler » de Vattnet Viskar, un groupe post black metal de Plaistow dans le New Hampshire. Dès cette pochette, les faux semblants paraissent s’installer un peu partout. L’image pourrait faire penser à l’œuvre d’un gentil groupe indie ou americana et pourtant, il s’agit ici de black metal mâtiné de postcore atmosphérique, le truc idéal pour les promenades sous la pluie, le soir au bord des cimetières. Le nom du groupe est aussi source de piège puisque Vattnet Viskar (le murmure de l’eau, en suédois) cache en fait un quatuor d’Américains dont pas un seul n’est même originaire du pays de Bjorn Borg.
Mais cette image inspirée de la photo de Christa McAuliffe flottant dans les airs est lourde de sens pour ceux qui se souviennent ou ont pris connaissance du drame du 28 janvier 1986, lorsqu’une navette spatiale qui venait de décoller de Cap Canaveral a terminé en fumée au bout de quelques secondes. Christa McAuliffe, une enseignante qui n’était pas une astronaute professionnelle, faisait partie de l’infortuné équipage de sept personnes et elle est devenue depuis une icône. C’est cette mort atroce qu’il faut avoir à l’esprit lorsqu’on écoute les chansons désespérées et dépressives de « Settler », un album que Christopher Alfieri (guitare), Casey Aylward (basse), Seamus Menihane (batterie) et Nicholas Thornbury (chant et guitare) ont mis du temps à confectionner.
Alfieri avoue avoir eu la photo de Christa McAuliffe devant les yeux pendant des mois, lorsqu’il élaborait les plans de guitare de « Settler ». Arrivé en studio avec des titres lourdement chargés en émotion, Vattnet Viskar a eu la chance d’avoir affaire au producteur Sandford Parker, responsable du son de groupes comme Indian ou Yob. Avec une pointure de cet acabit, Vattnet Viskar a reçu tout le soutien et les conseils nécessaires pour élaborer un son de grande ampleur.
Fort d’un premier album déjà convaincant (« Sky swallower« , en 2013), Vattnet Viskar revient avec une œuvre plus dense et plus cohérente, dégoulinante de rage et de puissance. « Dawnlands », qui ouvre la danse macabre, plonge l’auditeur dans un bain de guitares saturées et de chant d’ogre sous antidépresseurs. « Yearn » enterre tout sous une morosité blafarde apte à faire craquer n’importe quelle majorette floridienne décérébrée. « Impact » fait partie des pièces de résistance de l’album, avec une rythmique speed metal lancée à toute berzingue, juste avant que le chant poisseux et les guitares épileptique n’entrent dans la bagarre. On peut aussi compter sur « Cold war », le titre qui termine l’album dans une ambiance himalayenne.
A la croisée des chemins entre Mastodon et Neurosis (pour résumer grossièrement) ou entre Deafheaven et Lantlôs (pour analyser plus finement), Vattnet Viskar a incontestablement une carte à jouer sur la table du post-black metal. Que ce soit un atout gagnant n’est pas garanti d’office car la concurrence est rude et il y aura lieu de faire preuve d’imagination et d’audace pour se distinguer. Mais Vattnet Viskar en a le potentiel.
Pays: US
Century Media
Sortie: 2015/06/29