MONNIK – Vondeling
La pochette de ce premier album de Monnik semble suggérer un rude paysage de toundra, où une peau d’animal pend à une branche, abandonnée par ses propriétaires. La lumière fade qui baigne cette photo en rajoute dans l’impression de lourdeur et de froidure. C’est une pochette idéale pour ce premier opus de Monnik, un musicien flamand qui sort sa musique sur le label Consouling Sounds.
Monnik, en flamand, ça veut dire moine. Et c’est vrai qu’en manière monacale, ledit Monnik se pose un peu là. Solitaire, habité par des sonorités venues d’en haut, il semble mener sa vie au service d’anges gardiens d’une musique céleste, à la répétitivité chamanique, creusant les profondeurs du sol pour en retirer le souffle de l’esprit de la matière.
Son premier album « Vondeling » (enfant trouvé, encore des références lourdes de sens) arrive après plusieurs années passées à défendre une musique drone dans la veine de Sunn O))), thisquietarmy, Swans, Ashtoreth ou Aidan Baker. La structure est simple : deux morceaux de respectivement 21 et 16 minutes, autant dire des odyssées qui vont envoyer l’auditeur dans d’infinies brumes sonores et d’aigrelets accords de guitare diaphane.
Mais hormis cette structure simple, le contenu des morceaux s’avère dense, parfois étouffant, avec le choix d’un rythme résolument lent, presque apathique. Le premier morceau « Vondeling » met l’accent sur des motifs de guitare répétitifs, sur lesquels va se greffer une lourde nappe synthétique. Quant à « Het vlakke land » (le plat pays), il laisse partir une guitare encore plus neurasthénique pour la noyer peu à peu sous d’autres atmosphères brumeuses et oppressantes.
On ne sait pas combien d’épisodes de Derrick Monnik a dû regarder dans sa vie pour en arriver à un tel point d’anémie musicale et de dépression sonore. Mais il est clair que ce garçon fournit ici une vision suscitant un tel désespoir par sa musique qu’on en arriverait à une sorte de transcendance spirituelle. Comme le martyr qui, écrasé sous la souffrance, trouve l’image divine.
A la fois musique d’ambiance (pour les soirées entre employés des pompes funèbres) et quête de l’absolu, cette première œuvre de Monnik, le moine-soldat du drone, est une œuvre forte, enracinée dans la gravité, presque la douleur. C’est encore une fois un disque qui s’adresse en priorité aux expérimentateurs, aux audacieux ou aux égarés, pas aux fans de Pharrell Williams. Mais il faut de tout pour faire un monde, comme on dit.
Pays: BE
Consouling Sounds
Sortie: 2015/03/06