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MARDUK – Frontschwein

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Les black métallurgistes vont pouvoir ressortir les allumettes et se mettre en quête d’une église en bois car voici revenus les maîtres du genre, les Suédois de Marduk qui lancent dans la bataille du black metal leur treizième album. Mais vu la teneur de ce « Frontschwein », ce n’est pas à la religion qu’il va falloir s’attaquer mais plutôt aux hordes bolcheviques venues du front de l’Est et qui hantent encore Morgan Håkansson et sa bande, toujours obsédés par l’imagerie et les souvenirs de la Seconde Guerre mondiale.

Sur leur précédent album « Serpent sermon« , les gens de Marduk musardaient plutôt dans les diableries en solde mais ici, c’est le retour annoncé des blindés, des croix de fer et des canons antichar, faisant place nette et pulvérisant tout sur leur passage. Musicalement, Marduk opère un retour vers le style de ses origines, avec un black metal que l’on pourrait presque qualifier de canal historique. Les rythmiques à 4000 coups/minute, le chant crasseux de gargouille membre du club Lucifer et les guitares possédées par l’âme maudite de la comtesse Bathory viennent infester les oreilles à la manière d’un sabbat de sorcières barbouillées de sang de bouc élevé en plein air.

Cependant, les Suédois infernaux savent aussi diversifier les rythmes et les ambiances en se laissant aller à du mid-tempo aux sonorités oppressantes (« The blond beast », « Wartheland », « Nebelwerfer »). Côté personnel, Marduk repose toujours sur l’inamovible Morgan Håkansson, guitariste fondateur du groupe en 1990, Daniel « Mortuus » Rostén (chant) et Magnus « Devo » Andersson (basse), qui hantent la formation depuis une dizaine d’années. Un changement récent est à noter avec l’arrivée du batteur Fredrik Widigs, qui remplace Lars Brodesson depuis 2013.

Pour en rajouter dans l’horreur, il faut se pencher sur les titres et la signification des paroles des morceaux de « Frontschwein ». Ici, Marduk renoue avec ses thèmes de prédilection et plusieurs morceaux renvoient directement à des références historiques. Une petite leçon d’histoire militaire s’impose, ça ne fera pas de mal. « Afrika » renvoie à l’Afrika Korps et à la guerre du désert opposant le maréchal Rommel à son homologue anglais Montgomery entre 1941 et 1943. « Wartheland » vient du nom d’une région polonaise annexée par les Nazis en 1939, et qui couvrait la région située entre Poznan et Lodz. Le gouverneur SS Arthur Greisen et sa clique de tortionnaires n’ont pas laissé que des bons souvenirs dans le coin… « Nebelwerfer » est le nom d’un lance-roquettes allemand à six tubes, rival malheureux des bien plus efficaces orgues de Staline sur le front de l’Est. « Doomsday elite » parle quant à lui des faits d’armes et des ravages de la Waffen-SS sur divers théâtres d’opérations (Pologne, Balkans, Russie, Normandie, Ardennes…)

Quant à « Falaise : cauldron of blood » et « 503 », ils sont aussi synonymes de batailles et d’armement. Le premier titre parle de la bataille de Falaise, ville française dont la prise par les Américains et les Anglo-Canadiens signe la fin de la bataille de Normandie en août 1944. C’est une défaite allemande comparable en importance à celle de Stalingrad. Deux armées entières, près de 100 000 hommes, sont menacées d’encerclement et n’ont d’autre choix que de filer à toutes vitesses vers la Seine. 15 000 morts et 40 000 prisonniers scellent le terrible bilan d’une des plus grosses boucheries de la guerre à l’Ouest. Il est clair que ce carnage a pu inspirer Marduk, toujours en recherche de références sanguinaires et macabres dans ses chansons. Le groupe signe aussi « 503 », qui fait suite au « 502 » de leur album classique « Panzerdivision Marduk » et qui parle du 503e bataillon de chars lourds, unité allemande s’étant illustrée sur le front russe (à la bataille de Koursk) et en Normandie (lors de la défense de Caen contre les Britanniques).

On le voit, les thèmes des chansons ne sont pas très réjouissants. Mais on est chez Marduk après tout, pas chez Culture Club. Ceux qui sont réfractaires au black metal auront encore une fois une excuse pour éviter l’album « Frontschwein », mais il s’avère qu’une fois accepté le principe monstrueux qui dirige la pensée de Marduk, on adhère mieux au message musical que ce groupe cherche à exprimer. En ce sens, et en fonction de ce qu’on attend d’un groupe du niveau de Marduk, « Frontschwein » se pose comme une réussite, dans le prolongement des récents « Rom 5:12 » (2007) et « Serpent sermon » (2012).

Pays: SE
Century Media
Sortie: 2015/01/19

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