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CAPTAIN BEEFHEART & THE MAGIC BAND – Live from Harpo’s 1980

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Parti rejoindre son complice Frank Zappa au paradis des rockers en décembre 2010, Captain Beefheart a laissé un grand vide dans le monde des avant-gardistes du rock. Mais il faut dire que Don Van Vliet (surnommé Captain Beefheart) avait laissé tomber la musique dès le début des années 1980 pour se consacrer à son autre passion, la peinture. Et bien sûr avec le même sens de l’expérimentation partie très loin dans l’inaccessible.

Captain Beefheart a marqué l’histoire du rock avec l’un des albums les plus aberrants jamais enregistrés sur Terre, « Trout mask replica » (1969). Mais on a tendance à occulter – à tort – ses œuvres un peu plus abordables, comme « Safe as milk » (1967, un premier album de blues psychédélique déjà un peu barré), « Lick my decals off, baby » (1970), « Mirror Man » (1971) ou « The spotlight kid » et « Clear spot » (deux albums de 1972). C’est après les un peu plus décevants « Unconditionally guaranteed » et « Bluejeans and moonbeams » (1974) que Captain Beefheart laisse défiler quelques années sans disque, pour mieux revenir aux affaires à la fin des Seventies. En effet, il retrouve vigueur et imagination sur les intéressants « Shiny beast (Bat chain puller) » (1978), « Doc at the radar station » (1980) et « Ice cream for crow » (1982), ultime album du Captain et de son Magic Band, dont les membres ont beaucoup varié au cours des 17 ans d’existence de la formation.

C’est précisément en 1980 que nous emmène ce concert enregistré à Detroit le 11 décembre, soit trois jours après l’assassinat de John Lennon. L’instant est chargé d’histoire mais ça ne préoccupe pas vraiment le Captain et ses séides qui se livrent à un show bien fou, allant piquer des titres dans à peu près toute la discographie de Beefheart, avec une majorité de titres extraits de « Doc at the radar station », l’album du moment.

Et c’est là que les bonnes nouvelles s’arrêtent car il faut malheureusement admettre que l’enregistrement live qui est proposé par le label Gonzo Multimedia est gravement handicapé par un son indigne du génie de Captain Beefheart. Le show de décembre 1980 capté au Harpo’s, club de Detroit, a sans doute été enregistré par un auditeur du public, équipé d’un appareil bon marché qui devait plus ressembler à un dictaphone qu’à une console 24 pistes. Ce live a longtemps circulé sous le manteau en tant que pirate et il est étonnant de le voir revenir à la surface par le biais d’un label honorable et consciencieux, qui aurait pu découvrir des enregistrements de meilleure qualité parmi la pléthore de concerts pirates connus en ce qui concerne Captain Beefheart. Certes, comparé aux autres concerts de la tournée de l’hiver 1980 aux Etats-Unis qui ont été piratés à l’époque, le show de Detroit a un son encore passable mais celui-ci est loin, très loin, d’être parfait. Je ne suis pourtant pas en général bégueule sur la qualité sonore mais ici, il faut quand même admettre que la ligne rouge a été dépassée.

Tout cela est d’autant plus rageant que l’on imagine aisément Captain Beefheart et son équipe prodiguant une musique délirante à un public en émoi. Mais le son lourdement étouffé, ne laissant surgir aucun détail de l’instrumentation, brise totalement les efforts que l’auditeur doit faire pour tenter de reconstituer l’ambiance de ce show, pourtant riche en morceaux intéressants de la période finale de la carrière musicale de Captain Beefheart. On se voit donc obligé de déconseiller l’objet, même aux fans irréductibles de Captain Beefheart qui seront d’autant plus frustrés de ne pas trouver ici leur héros au mieux de sa forme sonore.

Je le rappelle, il n’est pas question ici de déconsidérer l’immense artiste qu’était Captain Beefheart. Mais il y avait sans aucun doute d’autres façons de rendre hommage à sa mémoire, avec des exhumations de bootlegs bien meilleurs du point de vue sonore. Le concert au Cowtown de Kansas City en avril 1974, ou encore le live à Amsterdam de novembre 1980 (qui reprend quasiment la même set list que le concert de Detroit), ne sont que quelques exemples d’enregistrements formidables que l’on peut écouter gratuitement sur le Net. Les labels de disques devraient prendre garde à cette concurrence redoutable au moment d’éditer des enregistrements autrefois pirates.

Pays: US
Gonzo Multimedia
Sortie: 2014/04/28 (réédition, original 1980)

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