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HARRIS, Corey – Fulton blues

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Né en 1969 à Denver dans le Colorado, Corey Harris a su au fil du temps établir des ponts essentiels entre le passé et l’avenir du blues. C’est sans doute son séjour au Cameroun, effectué alors qu’il a une vingtaine d’années, qui l’a poussé à vouloir comprendre le lien unissant le blues des noirs américains avec la musique des origines, celle de l’Afrique occidentale.

C’est dans cette optique que Corey Harris ne tarde pas à entrer en contact avec le grand Ali Farka Touré, figure incontournable de la musique malienne qui participe à son album « Mississippi to Mali », sixième album de Corey Harris sorti en 2002. Auparavant, Harris avait débuté sa carrière discographique en 1995, avec l’album « Between midnight and day », où l’on trouve de nombreuses reprises de Sleepy John Estes, Fred McDowell, Charlie Patton, Muddy Waters et Booker White.

On le voit, Corey Harris a une palette blues très large à l’authenticité indiscutable. Son travail d’archéo-bluesman lui a d’ailleurs valu des distinctions pas banales, comme une première bourse pour ses études linguistiques au Cameroun, suivie une vingtaine d’années plus tard par le prix de la fondation McArthur qui récompense les personnes dont le domaine d’activité montre un mérite exceptionnel. Ce prix, également appelé le prix des génies, se monte quand même à 500 000 dollars, ce qui permet de voir venir.

Sérieux et solide, Corey Harris l’est sans conteste. Il suffit d’écouter son dernier album « Fulton blues » pour s’en rendre compte. Cet album est le premier d’une série de trois faisant l’objet d’un contrat avec le label Blues Boulevard. Et là où c’est intéressant, c’est que cet album est la réinterprétation d’un « Fulton blues » sorti l’année précédente mais uniquement disponible sur le site web de Corey Harris. Ce sain travail de vulgarisation permet de placer l’auditeur face au lumineux talent de Corey Harris.

Dès le premier morceau « Crying blues », on repère les intonations très Howlin’ Wolf de Corey Harris, qui glisse sur un morceau rythmé et lourdement souligné de cuivres. La suite est beaucoup plus rurale avec des pièces à la guitare acoustique qui font parfois penser à du John Lee Hooker (« Underground », « J. Gilly blues »). L’harmonica n’est pas là non plus pour faire tapisserie, il aide à plonger de plus en plus profondément dans les racines du blues (« Fulton blues », « Devil got my woman », reprise de Skip James). En matière de reprises, justement, Corey Harris n’a pas besoin de recourir à nombre d’entre elles, largement auto-suffisant avec ses propres compositions (13 sur les 16 du disque), tellement fortes qu’elles sonnent elles-mêmes comme des classiques.

Lorsque les cuivres interviennent (« Tallahatchie », « House of negro blues »), les propos prennent une allure moins rugueuse et plus majestueuse, confirmant un Corey Harris toujours à l’aise et convaincant sur un registre un peu plus soul. On retire également son béret devant la reprise pleine de force de « Catfish blues », classique incontournable de la culture blues.

On l’aura donc bien vite compris, Corey Harris est un bluesman d’une extraordinaire pureté, volant au-dessus des genres et des courants et laissant traîner ses filets au plus profond des eaux boueuses du blues, là où on attrape encore des poissons laissés intacts de toute trace de mélange douteux. On attend avec impatience les deux prochains albums du maître sur le label Blues Boulevard, qui nous annonce déjà un live dans le lot. Restez à l’affût!

Pays: US
Blues Boulevard 250360
Sortie: 2014/05/09

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