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GUERVENO, Brieg – Ar bed kloz

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Le rock français (ou francophone) a souvent été confronté au dilemme du choix de la langue. Faut-il chanter en français parce que c’est la langue maternelle, au risque de se fermer les portes du marché anglo-saxon en cas de succès? Faut-il choisir l’anglais parce qu’on joue du rock, optant ainsi pour une certaine trahison envers ses compatriotes? Il y en a un qui a tranché, c’est Brieg Guerveno : il chante en breton. En cas de succès, il ne dépassera jamais les limites allant de Fougères à Quimper mais il n’en a cure, il préfère cultiver la langue de ses ancêtres au profit d’un public qui ne dépassera pas la population de quatre départements français.

J’en vois déjà qui s’inquiètent. Brieg Guerveno, Breton bretonnant, non content de nous bercer avec une langue incomprise du plus grand nombre, sonnant pour le néophyte non-linguiste comme un mélange de suédois et d’hébreu, ferait-il aussi dans cette musique celtique traditionnelle, associant vaguement rock progressif et binious criards? Rassurez-vous, si vous ne comprenez rien de ce que chante Brieg Guerveno, vous pourrez toujours vous rattraper sur la musique, un rock énergique qui se faufile entre grunge, prog costaud et métal raffiné. Et pour les paroles, il y a le livret du CD qui fournit une traduction en anglais, histoire de découvrir les thèmes de prédilection du bonhomme, des choses sombres sur l’humanité, les angoisses existentielles et la rébellion à l’égard du système. Des thèmes rock traditionnels, en somme, et en aucun cas l’apologie des crêpes flambées au chouchen, la beauté des menhirs miroitant sous le crachin du soir ou le désespoir du marin pêcheur devant la disparition des bancs de harengs au large de l’île d’Ouessant.

Brieg Guerveno est un rocker solide. Il a déjà une expérience confirmée dans le rock du grand Ouest, avec son Brieg Guerveno Groupe monté en 2003. Ayant conservé son seul nom, Brieg Guerveno sort un premier EP en 2006, « Seder », qui reçoit un accueil très favorable localement et est même salué par le mythique Alan Stivell, symbole de la musique celtique. Ce premier effort est suivi cinq ans plus tard par le premier album « Nozioù deiou », qui permet à Brieg Guerveno de se faire connaitre sur les scènes des festivals locaux.

En 2012, il recrute Xavier Soulabail (basse, ou gitar bout en breton) et Joachim Blanchet (tamboulinou klavierou, traduction de batterie et claviers) pour cette suite « Ar bed kloz » (monde fermé) qui formule en une dizaine de titres une très bonne association entre rock tranchant, mélodies inquiètes, chant mélodieux et guttural, qui brille sur des titres comme les rocailleux « Al liver » et « Trahoñ ah hent », l’énervé « Dianhet », le tendu « Divent », le tendre « Ar Spilhenn » et le vaporeux « Door 911 ».

Voilà un bel exemple de mariage réussi entre culture régionaliste et rock ‘n’ roll. A quand le death metal corse, le punk hardcore alsacien ou la pop dansante en occitan?

Pays: FR
BGG 2014
Sortie: 2014/04/07

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