BUTCHER BABIES – Goliath
Il est loin le temps des femmes à la cuisine et des hommes au garage. Aujourd’hui, les stéréotypes sexuels ont tendance à disparaître et le meilleur endroit où la symbolique de la femme et de l’homme peuvent se retrouver en pleine harmonie est bien un groupe de rock, et plus particulièrement de métal. On ne compte plus les groupes mixtes qui font du boucan, avec Monsieur à la batterie et Madame derrière le micro : Within Temptation, Arch Enemy, Nashville Pussy, Nightwish et j’en passe.
Aujourd’hui, une nouvelle et prometteuse formation métallique américaine arrive dans cette catégorie avec l’intention de secouer un peu le bazar : Butcher Babies. Dans ses rangs, deux chanteuses aussi sexy que tapageuses (Carla Harvey et Heidi Shepherd). La petite brune irlando-italo-finno-éthiopienne (quelle généalogie!) et la grande blonde sont accompagnées de Henry Flury (guitare, ex-Amen), Jason Klein (basse, ex-Adzachao) et Chris Warner (batterie, ex-Scars Of Tomorrow) pour des résultats littéralement thermonucléaires dans la catégorie néo-thrash metal volontiers mâtiné de hardcore. Autant dire que ça va dépoter un petit peu dans la vallée, et ce n’est pas plus mal.
Le quintet se forme à Los Angeles en 2010 et assume ses influences héritées de Slayer, Slipknot, Marilyn Manson et Rob Zombie par son style brutal et son jeu de scène dévastateur. Il prend le nom de Butcher Babies en souvenir de la chanson « Butcher baby » des Plasmatics, mythique groupe punk hardcore des années 80 animé par la légendaire et regrettée chanteuse Wendy O’Williams. A ceux qui n’ont pas connu l’époque dorée du métal des Eighties, rappelons que Wendy O’Williams s’était fait connaître grâce à l’outrance de son chant et de son jeu de scène dans les Plasmatics, avant de mener une carrière solo davantage orientée heavy metal dans laquelle elle dévoyait le petit jeune bien-pensant à coups de sexe et de rock ’n’ roll graisseux et lascif. Son suicide en 1998 reste un mystère mais en fait surtout une icône regrettée.
Les Butcher Babies donnent ainsi l’occasion de se souvenir de cette grande dame, surtout avec leur premier album « Goliath » qui poursuit en quelque sorte, par sa violence et sa hargne, la philosophie nihiliste et libre de la grande Wendy O’Williams et de toutes les rockeuses qui mettent un doigt sinon plus au système en affirmant leur indépendance d’esprit et leur amour du métal burné. Et « Goliath », dans le genre, remplace avantageusement les balais-brosses et les aspirateurs dont les machistes de service affublent habituellement les représentants du sexe dit faible. Parce que le nettoyage par le vide, avec cet album, vous allez y goûter.
C’est le solide Josh Wilbur (Gojira, Lamb Of God, Hatebreed) qui a produit cet album brut de fonderie qui a rapidement trouvé son chemin vers les plus hauts sommets des charts indépendants lors de sa sortie américaine en juillet 2013 : n° 3 au Heatseeker, 107ème au Billboard, rien que ça. Et question énergie, violence, hurlements, double pédale de batterie, riffs colossaux, rapidité d’exécution, furie métallurgique, effondrement de plafond, appels à l’émeute, crachats à la gueule, contre-préparation d’artillerie, sueur acide, vapeur expulsée des oreilles et soudure à l’arc, il y a tout ce qu’il faut. Du surpuissant « I smell a massacre » au barbare « Axe wound » en passant par l’excellent « Goliath », onze morceaux passent sur l’auditeur avec la grâce et la finesse d’une division blindée soviétique, la pudeur et la candeur d’un congrès de sorcières nymphomanes et la politesse feutrée d’un chauffeur de taxi bulgare.
Ce n’est pas ce qu’il y a forcément de plus subtil et de plus original dans le genre, mais « Goliath » possède néanmoins la capacité réjouissante de vous réduire les tympans en bouillie et de vous fracasser les cervicales, sans prétention et avec talent. Quand la femme s’en mêle…
Pays: US
Century Media
Sortie: 2014/01/27