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MURCOF & PETIT, Philippe – First chapter

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Derrière cette association se cache un choc de titans de l’électronique avant-gardiste post-moderne. Amateurs de Bon Jovi ou des Editors, la sortie est par là, merci d’être passés mais vous n’avez pas intérêt à rester dans le coin car ce qui va suivre ne vous concerne vraiment pas.

Murcof est un des projets montés par le musicien mexicain Fernando Corona. Celui-ci est originaire de Tijuana mais s’est installé depuis quelques années à Barcelone, où son art est certainement plus compris des milieux expérimentaux européens que des amateurs de mariachi qui pullulent sur les bords du Rio Grande. Corona a d’abord attiré l’attention au Mexique avec Nortec Collective, une formation où il évoluait sous le pseudonyme de Terrestre. Nortec Collective est à l’origine d’un genre de musique à lui seul, le nortec, qui est un mélange de musique traditionnelle mexicaine du nord du pays (le norteño) et de techno. Déjà, c’est vous dire si ce collectif était furieusement original.

Fernando Corona a également l’occasion de se faire remarquer en Espagne avec son projet Murcof, qui signe une demi-douzaine d’albums entre 2002 et 2009, oscillant entre techno minimaliste, ambient, drone ou classique moderne. On lui doit aussi une illustration musicale à l’occasion des grandes eaux nocturnes de Versailles, où il associait musique classique et électronique à travers une utilisation peu orthodoxe de la viole de gambe.

Et lorsque cet homme rencontre un autre fondu du genre de Philippe Petit, on décolle pour d’autres galaxies sans espoir de retour. Parce que Philippe Petit n’est pas piqué des hannetons non plus. Ex-journaliste et ex-DJ marseillais, il fonde Pandemonium Records, dédié au rock expérimental, puis BIP_HOp Records qui se tourne davantage vers la musique électronique. À partir de 2009, il sort sa propre musique, mélange improbable de rock expérimental et de musique classique fondu dans un dosage d’électro-acoustique complexe, et cela au rythme stakhanoviste de deux à trois albums par an. Le talent de Philippe Petit se développe aussi avantageusement au fil de ses collaborations avec des artistes tels qu’Eugene S. Robinson, Lydia Lunch, Bella Emerson, Asva, Chapter 24 ou K11.

Côté musique, on est ici dans la huitième dimension et la rencontre entre Murcof et Philippe Petit sur ce « First chapter » emporte l’auditeur dans des zones jusque-là très peu explorées de l’avant-garde. L’album se compose de trois titres, affichant respectivement vingt, six et onze minutes. Les titres se rattachent à la mythologie grecque (« The call of Circé », « Pegasus ») ou nordique (« The summoning of the Kraken »). Mais en matière de mythologie, Murcof et Philippe Petit créent ici leur propre mythologie électro-expérimentale, digne de faire passer Sunn O))) ou Klaus Schulze pour des compositeurs de musiques de comédies burlesques.

Sur des nappes de synthétiseurs angoissantes ou de violes de gambe viennent se greffer des sonorités plus ou moins incongrues, entre chœurs de succubes hantées et grésillement d’ondes hertziennes. L’ambiance générale est à la lenteur extrême et au flottement morbide, source d’une indicible peur qui gagne peu à peu l’auditeur à la gorge. On se croit à la fois au beau milieu de l’espace intersidéral ou enfermé dans le plus sombre des caveaux d’un château des Carpates. Il faut une sérieuse implication dans le post-moderne et la musique des sphères pour appréhender cet univers en provenance direct de l’au-delà astral. Avis donc aux amateurs du genre ou aux curieux désireux de découvrir autre chose que les Kings Of Leon ou Lana Del Rey. Mais je vous préviens : sans une combinaison de spationaute ou un bon psychiatre, vous ne vous en sortirez pas indemnes.

Pays: ES/FR
Aagoo Records/Rev Lab
Sortie: 2013/09/15

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