VIBRATORS (The) – On the guest list
Le punk anglais historique n’a pas encore dit son dernier mot. À l’heure où les petits diablotins punk rock de 1977 approchent de la fatidique soixantaine, il est encore quelques combos de la première heure qui refusent de déposer les armes et de prendre le chemin de la maison de retraite. Parmi ces combos légendaires encore en activité, on citera les Damned, Stiff Little Fingers ou les ici présents Vibrators. À ceux qui croient briller en société en croyant faire le tour de la question punk en citant uniquement les Sex Pistols et les Clash, on rappellera poliment mais fermement que les Vibrators ont fait partie de cette deuxième division indispensable de la scène punk rock britannique, où ils ne se sont pas contentés de livrer quelques albums durant la période d’or, mais ont même persisté à durer jusqu’à encore aujourd’hui.
Rappel des faits : les Vibrators se forment en février 1976 à Londres (note : y a-t-il un autre endroit où les groupes punk anglais se sont formés ?) et sortent leur premier album en juin 1977, après avoir signé chez le label Epic. Les figures tutélaires de ce combo sont Ian « Knox » Carnochan (chant et guitare), Pat Collier (basse), John Ellis (guitare) et John « Eddie » Edwards (batterie). Knox et Eddie resteront les maîtres de l’affaire durant plus de 35 ans, au cours de la tumultueuse histoire des Vibrators, qui commettent l’exploit de sortir plus d’une vingtaine d’albums tout en restant relativement discrets dans les hit-parades. Leur grand coup commercial, c’est le single « Automatic lover » qui se hisse à la 35e place des charts en 1978, en soutien du deuxième album « V2 ». Ce dernier est encore bien considéré par le public, transporté par le succès du premier album « Pure mania » (1977), considéré par les spécialistes de bon goût comme un des cinquante meilleurs albums de punk rock de tous les temps.
Mais après avoir modérément brillé chez les esthètes du punk, les Vibrators entrent dans le grand tunnel de l’anonymat, poursuivant inlassablement leur œuvre à l’ombre des petits clubs, pour le plus grand plaisir d’un nombre de fans devant équivaloir à celui des membres du parti libéral en Corée du Nord. Il va aussi de soi que les effectifs du groupe connaîtront par conséquent une valse pas piquée de hannetons. Même Ian Carnochan décide de raccrocher en 2012. Mais, allez savoir pourquoi, l’année suivante, il est toujours à la tête de son groupe et sort avec lui un des meilleurs albums de la carrière des Vibrators. Comme quoi il ne faut jamais désespérer de rien.
L’album « On the guest list » est effectivement une petite merveille représentative de ce que savent encore faire des papys du punk qui ont toujours le feu sacré, le bruit dans les veines et les instruments bien aiguisés. En plus, le concept de la guest list est absolument imparable. Les invités de renom pullulent en effet tout au long des seize titres qui viennent nous congestionner les tympans avec savoir-faire et détermination. À chaque morceau son demi-dieu légendaire invité, afin de faire reluire les compositions incroyablement inspirées de Ian Carnochan. Car c’est lui qui a tout écrit, soit treize titres nouveaux et trois auto-reprises datant de la grande époque : « Baby baby », « Automatic lover » et « Whips and fur ».
Et côté invités, il va falloir s’accrocher : Walter Lure (des Heartbreakers), Chris Spedding (pour qui les Vibrators avaient justement ouvert quelques concerts en 1977), Ty Segall (le nouveau monstre sacré de la scène garage punk californienne), Brian James (des Damned), Wayne Kramer (MC5, tous à genoux !), Hugh Cornwell (The Stranglers), Campino (Die Toten Hosen), Ross The Boss (des métalleux des cavernes de Manowar, certes, mais précédemment chez les Dictators, un des tout premiers groupes punk new-yorkais). Il y en a plein d’autres, plus ou moins connus mais toujours exploités au mieux de leur forme sur cette série implacable de morceaux pleins de fougue, simples mais terriblement efficaces.
Ce sont bien sûr les classiques « Automatic over » ou « Baby baby » qui frappent le plus mais il faut aussi considérer sérieusement « View from my Cadillac », « 2nd skin », « Every dog », « Turn up the heat », « My stalker » ou « Rain to town ». Je n’en cite que quelques-uns, mais sachez que tout est bon, tout, tout, tout ! Il ne reste qu’à faire de ce « On the guest list » l’album du mois qui vous servira à vous lever pour aller au boulot, qui vous fera reconquérir votre époux/épouse blasé(e) par la scène rock contemporaine ou reprendre confiance dans la miraculeuse capacité du rock ‘n’ roll à survivre à tous les avatars et développements douteux de sa formidable progéniture. Oui, disons-le : punk is not dead.
Pays: GB
Cleopatra Records
Sortie: 2013/05/13