JUICY LUCY – Get a whiff a this
Il se sera écoulé près de trois ans entre la réédition des deux premiers albums de Juicy Lucy par le label Esoteric Recordings et la sortie du troisième album de ce groupe anglais ayant opéré dans une veine heavy blues rock entre 1969 et 1973. Un petit rappel des faits s’avère donc nécessaire. Juicy Lucy est formé en 1969 par Glen Campbell, guitariste américain échoué en Angleterre après la séparation de son groupe les Misunderstood, génies oubliés du garage rock. Juicy Lucy sort un premier album sur le label Vertigo et connaît un certain succès avec la reprise du « Who do you love » de Bo Diddley.
Les effectifs qui composent Juicy Lucy ne vont pas tarder à bouger. Ray Owen (chant et guitare) laisse sa place à Paul Williams. Neil Hubbard (guitare) est brièvement remplacé par Tommy Eyre à qui succède rapidement Micky Moody. Le batteur Pete Dobson est quant à lui remplacé par Rod Coombes. Chris Mercer (saxophone), Keith Ellis (basse) et Glen Campbell restent les membres originaux sur « Lie back and enjoy it« , qui sort également chez Vertigo en 1970. Le groupe continue d’attirer l’attention avec sa reprise de « Oh pretty woman », qui se classe également dans les charts, entraînant l’album à la 53e place du hit-parade anglais et consacrant Paul Williams comme l’un des meilleurs chanteurs de l’année 1970, d’après un sondage paru dans le magazine Record Mirror.
Le troisième album de Juicy Lucy se présente à nouveau sous le signe du changement. Keith Ellis est remplacé par Jim Leverton, un ancien de Fat Mattress (groupe fondé par Noel Redding après son passage chez Jimi Hendrix). Mais surtout, le groupe passe du label Vertigo à la maison Bronze Records, fondée par Gerry Bron et qui restera célèbre pour avoir été l’écurie d’Uriah Heep ou du Motörhead des débuts.
Au moment où « Get a whiff a this » est enregistré, Juicy Lucy souffre d’une relative impréparation. Le groupe rentre de tournée et a peu écrit. Il en est quitte pour composer des chansons un peu sur le pouce dans le studio d’enregistrement. Il n’est donc pas étonnant que les hommes de Juicy Lucy aient recours à deux reprises sur les neuf titres de l’album. C’est d’ailleurs l’une d’entre elles qui ouvre le disque : « Mr Skin », un titre de Spirit qui est rendu ici de façon fidèle. Suit alors ce qui est sans doute le meilleur morceau de l’album, un « Midninght sun » bien boogie et gras où les guitares de Glen Campbell et Micky Moody rivalisent de force avec la voix de Paul Williams.
Juicy Lucy utilise rapidement sa deuxième reprise pour continuer d’amadouer l’auditeur, avec une version encore une fois fidèle du « Midnight rider » de l’Allman Brothers Band. Puis, passé ce troisième morceau, Juicy Lucy s’endort gentiment dans une routine faite de funk nonchalant (« Harvest », « Big Lil »), de folk gentillet (« Mr. A. Jones », « Sunday morning ») ou des deux en même temps (« Jessica », « Future days »).
Il ne faut donc pas s’étonner de retrouver cet album, par ailleurs affublé d’une affreuse pochette signée Glen Campbell en personne, terminer sa course dans les bacs à soldes des disquaires. Tout ceci entraîne des départs massifs au sein de Juicy Lucy, dont celui du leader Glen Campbell. Il ne reste plus que Paul Williams et Micky Moody, deux membres non-originaux du groupe à qui revient la charge de remonter un nouveau line-up et d’accoucher d’un dernier album, « Pieces », en 1972.
Pour conclure sur « Get a whiff a this », on dira que si cet album n’atteint pas les niveaux des deux disques précédents de Juicy Lucy, il n’en demeure pas moins un témoin de la scène rock anglaise du début des années 70. Il sera donc susceptible d’intéresser les historiens de cette époque, ceux qui ont perdu leur vinyle original après leur 43e déménagement, ceux qui veulent compléter leur collection des œuvres complètes de Juicy Lucy ou simplement ceux qui veulent écouter de la bonne musique seventies sans en attendre des montagnes d’originalité.
Pays: GB
Esoteric Recordings ECLEC 2389
Sortie: 2013/04/29 (réédition, original 1971)