POWERDOVE – Do you burn?
L’univers musical d’Annie Lewandowski, Américaine du Minnesota, n’est pas très simple. Volontiers portée sur les expériences déviantes, comme l’atonalité, l’anti-mélodie ou l’utilisation de toutes sortes d’objets hétéroclites pour produire de la musique, Annie Lewandowski est une sorte d’égérie de l’avant-garde.
Elle fonde Powerdove en 2007, entre autres collaborations avec des musiciens avant-gardistes. Dans ce groupe, Annie Lewandowski évolue d’abord avec Alex Vittum (percussions) et Jason Hoopes (basse). « Be mine », premier album de Powerdove en 2009, est le fruit de cette collaboration.
En 2011, on retrouve Annie Lewandowski acoquinée au légendaire Fred Frith, génie anglais de l’art rock, de l’avant-prog ou du rock expérimental dont la carrière commencée en 1968 avec le groupe Henry Cow l’a amené à collaborer avec John Zorn, Bill Laswell, Brian Eno, les Residents, Robert Wyatt et d’autres régiments de furieux engagés dans le combat avant-gardiste, interdits de séjour sur les grands médias. Avec un tel parrain, Annie Lewandowski n’a désormais plus aucune crainte pour se lâcher et soumettre au monde sa vision décalée de la musique.
La preuve avec le nouvel album de Powerdove, mis au point avec l’aide du Californien John Dieterich et du Français Thomas Bonvalet. Avant d’achever ce disque, Annie Lewandowski est allée séjourner en Angleterre, quelque part dans le Hampshire, du côté de la rivière Itchen, dont les flots calmes et languissants poussent à la mélancolie et à l’introspection. Elle retourne alors à New York où elle met au point ce « Do you burn », qui transformera les plus énervés en sympathiques larves endormies et neurasthéniques.
« Do you burn » offre treize morceaux post-folk dénudés, bricolés à partir de quelques instruments brinquebalants, du violon grinçant à la contrebasse paresseuse, en passant par quelques bruitages divers, servant une voix d’elfe éthérée et vaporeuse, plongeant l’auditeur dans de somnolentes ballades en barques coulant nonchalamment sur des eaux dormantes. Les constructions linéaires et sans aspérités risquent de rendre fous tous ceux qui ont l’habitude de se détendre après le boulot avec un bon Dream Theater ou un bon Iron Maiden dans les oreilles. Tout cela n’est donc pas pour eux, ni pour pas grand monde, d’ailleurs. Powerdove ravira plutôt les flasques, les lymphatiques, les dormeurs, les anémiés sous péridurale, ceux qui écoutent pousser leurs ongles et pensent à la retraite dès l’âge de treize ans et demi. Tous les Gaston Lagaffe et grands Duduche tranquilles, peu concernés par la frénésie des temps modernes ou les menaces d’apocalypse économique ou nucléaire.
« Do you burn » arrête le temps, l’enferme dans une douillette camisole de coton, suspend le vol des corbeaux et convoque Morphée chez la Belle au Bois Dormant. Mieux qu’un tube d’anxiolytiques, ce disque est une invitation à la rêverie, à l’arrêt de toute activité susceptible d’accélérer le rythme cardiaque et un couloir vers un univers musical en dehors des normes et des idées communément acceptées. Ce qui est rassurant, c’est qu’Annie Lewandowski est convaincante dans le genre, sans doute authentiquement habitée par son monde musical. Mais, vous l’aurez compris, l’adhésion à cet album repose essentiellement sur une question de goûts personnels.
Pays: US
Murailles Music MM007 / Africantape AT041
Sortie: 2013/03/11