MATTHEWS, Ian – If you saw thro’ my eyes
Les quatre-vingt-neuf premières références d’albums sortis sur le label Vertigo entre 1969 et 1973 sont le Saint-Graal de tout bon collectionneur de rock progressif anglais des années 70. Enfin, on parle ici de progressif dans une acception générale puisque ce terme désignait au début des années 70 toutes les musiques nouvelles issues du rock et de la pop telle que de grands groupes anglais comme les Beatles, les Hollies ou les Zombies l’avaient forgée. Le label Vertigo, émanation progressive de la maison Phonogram, n’avait pas que du rock progressif à proposer. De Rod Stewart à Black Sabbath en passant par Uriah Heep et les africains d’Assagaï, Vertigo a commercialisé du rock et des musiques expérimentales mais n’était pas non plus à dédaigner du côté du folk.
Ian Matthews est un des exemples les plus parlants du registre folk diffusé par Vertigo. Né le 16 juin 1946 à Scunthorpe dans le Lincolnshire, Ian Matthews a comme principale distinction d’avoir été membre du fameux groupe Fairport Convention, un des fleurons du folk rock anglais des années 68-73. Recruté au chant par le leader Ashley Hutchings, Ian Matthews officie sur les albums « Fairport Convention » (1968), « What we did on our holidays » (1969) et « Unhalfbricking » (1969). Il quitte le groupe en 1970 pour divergences musicales et se lance dans une carrière solo. Malgré son départ de Fairport Convention, Matthews est accompagné sur son premier album « Matthews’ Southern Comfort » par trois membres de Fairport Convention : Ashley Hutchings, Simon Nicol et Richard Thompson. Ian Matthews monte alors le groupe Matthews Southern Comfort, qui sort « Second spring » en 1969 (52e place dans les charts anglais) et « Later that same year » (1970).
L’année suivante, Ian Matthews commet coup sur coup deux albums solo, « If you saw thro’ my eyes » et « Tigers will survive ». Ce sont ces deux disques qui sortent sur le prestigieux label Vertigo. Pour la réalisation du premier album, Ian Matthews travaille à nouveau avec ses anciens compagnons de Fairport convention : la célèbre Sandy Denny aux chœurs et aux claviers et Richard Thompson (guitare). Il y a également d’autres musiciens qui seront plus tard des chevilles ouvrières des studios anglais en tant qu’accompagnateurs des Pink Floyd, Cat Stevens ou Jethro Tull : Pat Donaldson (basse), Andy Roberts (guitare), Tim Renwick (guitare) et Gerry Conway (batterie). Andy Roberts joue un rôle important dans la confection de ce premier album, dont toutes les chansons ont été écrites par Ian Matthews, à l’exception de deux reprises de Richard Fariña (« Reno Nevada » et « Morgan the pirate ») et une de Jerry Burnham et Allan Jacobs (« It came without warning »). Les reprises de Richard Fariña sont plus américaines et dynamiques que le reste du disque, qui se compose de jolies ballades folk auxquelles on s’attache au fil des écoutes. « Desert inn », « Little known », « Southern wind » déroulent de douces mélodies qui prennent parfois des colorations country ou west coast. Les guitares de Richard Thompson, Tim Renwick et Andy Roberts coopèrent ensemble et fournissent de belles harmonies ou des sorties solo intéressantes. Le titre final qui donne son nom à l’album est une superbe façon de conclure ce disque sensible et délicat : la voix fine et claire de Ian Matthews se marie à celle de Sandy Denny qui l’accompagne au piano. Tout cela possède la simplicité des classiques et mérite d’être redécouvert.
Cet album bénéficie à sa sortie d’un accueil favorable de la critique et Ian Matthews bat le fer tant qu’il est chaud avec la sortie, toujours en 1971 et toujours sur Vertigo, de son « Tigers will survive », évoqué dans une autre chronique.
Pays: GB
Esoteric Recordings ECLEC 2360
Sortie: 2012/11/19 (réédition, original 1971)
